Les abeilles sont probablement issues d’un ancien supercontinent avant qu’elles ne se dispersent en Afrique et en Amérique du Sud
Les abeilles sont les principaux pollinisateurs des plantes à fleurs. Ce partenariat a débuté il y a environ 120 millions d’années, mais l’incertitude quant à la façon dont elles se sont répandues sur la planète et au moment où elles l’ont fait a grandement obscurci les recherches sur ce mutualisme essentiel.
Trouver des fossiles d’abeilles est extrêmement difficile. Des chercheurs de l’université d’État de Washington ont donc emprunté une autre voie pour déterminer quand et comment les abeilles ont évolué : ils se sont penchés sur la génétique. Ils ont donc séquencé et comparé les gènes de nombreuses espèces d’abeilles et les ont comparés à des fossiles pour reconstruire l’histoire de leur évolution, estimer leur âge et identifier leur probable expansion géographique.
Une abeille pollinisatrice Discoscapa apicula trouvée dans un morceau d’ambre vieux de 99 millions d’années (milieu de la période crétacée) provenant du Myanmar. (George Poinar Jr. / College of Science, Université de l’État de l’Oregon)
Selon Silas Bossert, coauteur de l’étude et professeur adjoint au département d’entomologie de l’université d’État de Washington (WSU) :
L’origine spatiale des abeilles est une énigme de longue date. Pour la première fois, nous avons la preuve statistique que les abeilles sont nées sur le Gondwana. Nous savons maintenant qu’à l’origine, les abeilles sont des insectes de l’hémisphère sud.
Dans cette étude, Bossert et son équipe ont séquencé et comparé les gènes de plus de 200 espèces. Ils les ont ensuite mis en correspondance avec les traits de 185 abeilles fossiles et d’espèces éteintes, élaborant ainsi une histoire de l’évolution et des modèles généalogiques pour la répartition des abeilles. Ils ont analysé des centaines de milliers de gènes pour s’assurer que les relations qu’ils avaient déduites étaient correctes.
Quelques familles d’abeilles analysées dans cette étude. (Silas Bossert lab)
Selon Elizabeth Murray, professeure adjointe d’entomologie à la WSU :
C’est la première fois que nous disposons de données étendues à l’échelle du génome pour les sept familles d’abeilles.
De précédentes études ont montré que les abeilles ont probablement évolué à partir des guêpes, passant du statut de prédateur à celui de collecteur de pollen et de nectar. Cette étude montre qu’elles sont apparues pour la première fois dans les régions arides de l’ouest du Gondwana au début du Crétacé (il y a 145 millions d’années à 100,5 millions d’années).
Les chercheurs ont trouvé des preuves que les abeilles ont migré vers le nord lors de la formation de nouveaux continents. Elles ont continué à se diversifier et à se répandre avec l’apparition des angiospermes, les plantes à fleurs. Elles ont ensuite formé des colonies en Inde et en Australie. Toutes les grandes familles d’abeilles avaient déjà divergé avant le début du Tertiaire, il y a 65 millions d’années.
Abeille coupeuse de feuilles mâle du genre Megachile. Ce genre a fait partie du vaste effort d’échantillonnage des scientifiques impliqués dans la nouvelle étude sur l’évolution des abeilles. (Andrew Murray/ Université d’État de Washington)
Les chercheurs pensent que la flore exceptionnellement riche des régions tropicales de l’hémisphère occidental est probablement due à leur longue collaboration avec les abeilles. Environ 25 % des plantes à fleurs appartiennent à la grande et variée famille des roses, qui constitue une part importante des plantes hôtes des abeilles dans les régions tropicales et tempérées.
Les chercheurs poursuivront ensuite le séquençage et l’étude de la génétique et de l’histoire d’autres espèces d’abeilles. Comprendre les mécanismes par lesquels elles se sont dispersées et ont occupé leurs niches écologiques modernes pourra largement contribuer à la préservation des populations de pollinisateurs, garantissant ainsi la pérennité de leur santé et de leur bien-être.
Les abeilles sont responsables de la pollinisation d’environ un tiers de l’approvisionnement alimentaire mondial, mais leur nombre diminue dans le monde entier en raison des pesticides, du changement climatique, de la perte d’habitat, des maladies, etc.
L’étude publiée dans Current Biology : The evolutionary history of bees in time and space et présentée sur le site de l’Université d’État de Washington : Bees evolved from ancient supercontinent, diversified faster than suspected.