Des astronomes ont découvert soit le plus léger des trous noirs, soit la plus lourde des étoiles à neutrons
Une équipe de scientifiques a découvert un objet compact à 40 000 années-lumière de la Terre qui est soit une étoile à neutrons très massive, soit un petit trou noir.
Dans un amas d’étoiles situé aux confins de la galaxie, des astronomes ont identifié un objet très petit et très dense, engagé dans une danse orbitale avec un pulsar milliseconde. Selon eux, l’objet mystérieux ne peut être qu’une étoile à neutrons ou un trou noir, mais l’une ou l’autre de ces deux possibilités serait une découverte passionnante.
S’il s’agit d’une étoile à neutrons, elle pourrait être la plus lourde de ce type qui n’ait jamais été observée. S’il s’agit d’un trou noir, c’est le plus léger de sa catégorie. Avec une masse équivalente comprise entre 2,09 et 2,71 soleils, elle se situe à l’extrémité inférieure d’un désert d’objets compacts connu sous le nom “d’écart de masse inférieur” (lower mass gap) un espace compris entre 2,2 et 5 masses solaires dans lequel très peu d’étoiles à neutrons ou de trous noirs ont été détectés.
Simulation orbitale détaillant le système binaire original pulsar/ naine blanche dans un amas globulaire perturbé par l’arrivée d’un troisième corps massif. Le nouveau venu chasse la naine blanche de son orbite et capture le pulsar, formant ainsi un nouveau système binaire avec un pulsar en orbite autour, très probablement, d’un trou noir léger ou d’une étoile à neutrons supermassive. (OzGrav, Swinburne University of Technology)
Dirigée par les astrophysiciens Ewan Barr et Arunima Dutta de l’Institut Max Planck de radioastronomie (Allemagne), une équipe internationale de chercheurs a découvert l’objet en étudiant un étrange pulsar milliseconde appelé PSR J0514-4002E, situé dans un amas d’étoiles appelé NGC 1851 à quelque 54 000 années-lumière du centre de la galaxie. Les données radio recueillies par le réseau MEERKat en Afrique du Sud ont révélé la présence d’un compagnon binaire invisible sur une orbite de 7,44 jours avec le pulsar, les chercheurs ont voulu savoir quel était cet objet.
L’amas globulaire NGC 1851. (NASA, ESA et G. Piotto/ Università degli Studi di Padova, Gladys Kober/ Catholic University of America)
Les pulsars millisecondes sont des étoiles à neutrons qui tournent extrêmement vite. En tournant sur elles-mêmes, elles émettent des ondes radio à intervalles précis. PSR J0514-4002E tourne 170 fois par seconde, émettant des pulsations comme un son statique. Grâce à cette précision, les astronomes peuvent rechercher de minuscules variations dans les impulsions et utiliser ces informations pour calculer les caractéristiques du pulsar, ainsi que sa distance et ses éventuels compagnons binaires.
Représentation d’une étoile à neutrons, encore appelée pulsar, en rotation rapide. (NASA Goddard)
Selon Barr :
C’est un peu comme si l’on pouvait mettre un chronomètre presque parfait en orbite autour d’une étoile située à près de 40 000 années-lumière et chronométrer ces orbites avec une précision de l’ordre de la microseconde.
Grâce à ces données de synchronisation du pulsar, les chercheurs ont pu calculer la distance de PSR J0514-4002E, la masse du pulsar et la masse du système dans son ensemble. En soustrayant la masse du pulsar, ils ont pu déterminer la masse du mystérieux objet. Celui-ci est beaucoup trop pâle pour être une étoile de la séquence principale, et beaucoup trop massif pour être une naine blanche (objet compact plus léger que les étoiles à neutrons, sur l’échelle des étoiles mortes). Il ne reste donc que deux possibilités : une étoile à neutrons ou un trou noir.
Il est impossible à ce stade de déterminer laquelle, mais les chercheurs pensent qu’il s’agit du produit d’une fusion antérieure entre deux étoiles à neutrons. Il y a quelques années, une collision similaire détectée grâce aux ondes gravitationnelles avait donné naissance à un objet de 2,6 masses solaires. Avec une limite supérieure de 2,76 masses solaires, cette dernière découverte pourrait être une étoile à neutrons plus grosse. Si aucune des deux n’est en fait un trou noir.
Maintenant qu’il a été découvert, les chercheurs sont déterminés à démasquer son identité.
Selon Dutta :
Nous n’en avons pas encore fini avec ce système. La découverte de la véritable nature du compagnon constituera un tournant dans notre compréhension des étoiles à neutrons, des trous noirs et de tout ce qui peut se cacher dans l’espace de masse des trous noirs.
L’étude publiée dans Science : A pulsar in a binary with a compact object in the mass gap between neutron stars and black holes et présentée sur le site de l’Université de Manchester : Lightest black hole or heaviest neutron star? Manchester astronomers uncover a mysterious object in Milky Way.