Les scientifiques pourraient détecter la vie dans un seul grain de glace extraterrestre
Selon une nouvelle étude, nous pourrions trouver de la vie extraterrestre dès 2030. Une expérience en laboratoire a montré que les instruments à bord d’une sonde spatiale se dirigeant vers l’un des mondes les plus prometteurs pour la recherche de la vie sont suffisamment sensibles pour détecter une seule cellule vivante dans un seul grain de glace.
La lune glacée Encelade photographiée par la sonde Cassini. (NASA/ JPL/ Caltech/ Space Science Institute)
Lorsque l’on pense à l’endroit où la vie au-delà de la Terre serait susceptible d’apparaître pour la première fois, on peut penser à Mars ou à une exoplanète lointaine qui nous transmettrait des messages. Mais les endroits les plus prometteurs, étonnamment, semblent être les lunes glacées des planètes géantes gazeuses de notre propre système solaire. Encelade, la lune de Saturne, et Europe, la lune de Jupiter, contiendraient toutes deux des océans globaux sous leur coquille de glace, avec des conditions et des molécules essentielles susceptibles d’abriter la vie.
Une version retraitée de la superbe image de la lune de Jupiter, Europe, obtenue par la sonde Galileo. (NASA)
Représentation de l’océan qui se cache sous la surface d’Europe, s’infiltrant à travers certaines de ses fissures en surface. (NASA)
Pour se faire une idée plus précise de ces conditions, la NASA enverra une mission sur l’une de ces lunes dans le courant de l’année. La sonde Europa Clipper se mettra en orbite autour d’Europe et l’analysera, descendant jusqu’à 25 km au-dessus de la surface pour cartographier sa composition et sa géologie, recueillir des mesures de l’océan interne et même collecter et analyser les grains de glace et de poussière qui pourraient être projetés dans les panaches. Bien qu’elle n’ait pas été conçue pour être une mission à la recherche de la vie, une nouvelle étude suggère qu’elle pourrait tout de même découvrir des extraterrestres.
Représentation artistique de la mission Europa Clipper avec la sonde approchant de sa cible dans l’un de ses nombreux survols. (NASA/JPL-Caltech)
Une équipe dirigée par des scientifiques de l’université de Washington et de l’Université libre de Berlin a mené une expérience pour vérifier si les instruments d’Europa Clipper pouvaient détecter des microbes emprisonnés dans des grains de glace. Pour simuler ce que la sonde spatiale subira lorsqu’elle recueillera des données sur les panaches d’Europe, les chercheurs ont envoyé un mince faisceau d’eau liquide dans le vide, puis ils ont utilisé un laser pour exciter les gouttelettes et les ont analysées par spectrométrie de masse afin de déterminer ce qu’elles contenaient.
Les extraterrestres étaient remplacés par la Sphingopyxis alaskensis (Sphingomonadaceae), une espèce commune de bactérie qui prospère dans des environnements froids et pauvres en nutriments comme les eaux au large de l’Alaska. Les microbes de ce type sont entourés d’une membrane lipidique et peuvent former une couche d’écume à la surface de l’océan, qui est ensuite transportée dans l’air sous forme d’embruns. Si une vie similaire existe dans l’océan d’Europe, elle pourrait potentiellement transporter ces grains de glace dans l’espace, où le spectromètre de masse de Clipper pourrait détecter leurs acides gras et leurs lipides chargés négativement.
Le dessin de gauche représente Encelade et son océan glacé, avec des fissures près du pôle sud qui pénétreraient à travers la croûte glacée. Le dessin du milieu montre l’endroit où les auteurs pensent que la vie pourrait se développer : à la surface de l’eau, dans une fine couche proposée (en jaune) comme dans les océans de la Terre. Le cadre de droite montre que lorsque les bulles de gaz montent et éclatent, les cellules bactériennes peuvent être transportées dans l’espace avec des gouttelettes qui deviennent alors les grains de glace détectés par Cassini. (Agence spatiale européenne)
Selon Fabian Klenner, auteur principal de l’étude (lien plus bas) :
Nous décrivons ici un scénario plausible sur la façon dont les cellules bactériennes peuvent, en théorie, être incorporées dans un matériau glacé formé à partir d’eau liquide sur Encelade ou Europe et qui est ensuite émis dans l’espace. Pour moi, il est encore plus excitant de chercher des lipides, ou des acides gras, que de chercher des éléments constitutifs de l’ADN, et ce parce que les acides gras semblent être plus stables.
L’équipe a constaté que l’instrument pouvait détecter un échantillon biologique aussi petit qu’une cellule dans un seul grain de glace.
Selon Klenner :
Pour la première fois, nous avons montré qu’une fraction minuscule de matériel cellulaire pouvait être identifiée par un spectromètre de masse à bord d’un vaisseau spatial. Nos résultats nous confortent dans l’idée qu’avec les instruments à venir, nous serons en mesure de détecter des formes de vie similaires à celles de la Terre, dont nous pensons de plus en plus qu’elles pourraient être présentes sur les lunes océaniques.
Alors que nous sommes presque désensibilisés aux histoires de découverte de preuves que d’autres planètes et lunes ont le potentiel d’abriter la vie, il est assez excitant d’en avoir enfin une qui pourrait plausiblement détecter une vie extraterrestre réelle, si elle existe.
A suivre… avec l’arrivée d’Europa Clipper sur Europe en 2030.
L’étude publiée dans Science Advances : How to identify cell material in a single ice grain emitted from Enceladus or Europa et présentée sur le site de l’Université de Washington : Signs of life detectable in single ice grain emitted from extraterrestrial moons.