La “mère” de toutes les fleurs pourrait ressembler à ça
Une nouvelle étude menée par Hervé Sauquet de l’université Paris-Sud avec ses collègues d’Australie, de Suisse, de Londres, des États-Unis… suggère que toutes les fleurs vivantes sont les descendantes d’un seul ancêtre qui vivait il y a environ 140 millions d’années.
Près de 90% de toutes les plantes terrestres actuelles sont des angiospermes (en grec : “graine dans un récipient”) ou des plantes à fleurs. Pourtant, bien que nous disposions de quelques restes fossilisés (comme dans l’image ci-dessous une tomatille fossilisée de 52 millions d’années décrite récemment), les plus importants, du point de vue de l’évolution, restent insaisissables.
Fossile de Physalis infinemundi découvert récemment en Patagonie (Argentine) âgé de 52,2 millions d’années. (Ignacio Escapa/ Museo Paleontológico Egidio Feruglio)
Tel est le cas de la première angiosperme qui a évolué, selon l’estimation des chercheurs, il y a entre 140 millions et 250 millions d’années. Une fois en place, les plantes à fleurs se sont rapidement diversifiées, se répandant dans le monde entier en prenant le dessus sur les gymnospermes qui étaient dominantes et qui subsistent aujourd’hui en tant que conifères, cycadales et diverses espèces de buisson.
Les gymnospermes, qui ont perduré pendant au moins 383 millions d’années, disposaient de parties reproductives exposées aux yeux de tous. Mais les angiospermes ont évolué pour avoir le plus souvent leurs parties entourées de structures florales élaborées qui se transforment en fruits.
Aujourd’hui, environ 9 plantes sur 10 sur les sept continents sont des angiospermes, allant du phallus de titan à l’odeur nauséabonde, au pissenlit que vous croisez dans votre cour. Malgré leur énorme variété d’apparence, de cycle de vie et de niche écologique, les chercheurs pensent que l’ensemble des 225 000 espèces d’angiospermes descendent d’un seul ancêtre.
Trouver cette première “fleur ancestrale” fut la mission de nombreux paléobotaniste en herbe. Mais jusqu’à présent, les plus anciennes fleurs fossiles dataient d’il y a environ 130 millions d’années et ce petit échantillon connu s’est déjà diversifiés en bien des espèces distinctes. Sans preuve fossile, les chercheurs se sont tournés vers une autre voie de recherche : l’analyse de données.
Dans une étude publiée cette semaine, une équipe a rassemblé le plus grand nombre de données sur les traits des fleurs dans le monde : près de 13 500, provenant de 792 espèces représentant 98% de la division des angiospermes.
De toutes ces informations sur les fleurs vivantes et fossilisées, les chercheurs ont utilisé la datation moléculaire pour construire un chronogramme. En d’autres termes, ils ont analysé les chiffres concernant un arbre généalogique, en fonction des différences entre les espèces, qui ont surgi par mutations. Celles-ci se produisent à un rythme assez régulier, donc plus il y a de différence entre deux espèces, plus vous trouverez le dernier ancêtre commun.
Dans le même temps, en remontant dans le temps le long de la lignée, les chercheurs peuvent éliminer les traits dérivés, les caractéristiques qui résultaient de ces dernières mutations, et cibler les traits les plus susceptibles d’être présents dans le dernier ancêtre commun.
L’équipe a utilisé trois approches différentes dans leur méthode d’analyse, toutes assez complexes comme les méthodes de Monte-Carlo par chaînes de Markov que le Guru vous laisse découvrir (et, par pitié, ne lui demandez pas !). Mais ce qui est important à comprendre, c’est qu’il s’agit de méthodes testées et respectées, largement utilisées dans le domaine.
L’arbre évolutif des angiospermes selon l’étude. (Hervé Sauquet/ Jürg Schönenberger/ Nature Com.)
Plus importants encore, les résultats de l’équipe ont créé une hypothèse vérifiable pour la diversification des premières angiospermes que d’autres chercheurs peuvent maintenant tester.
Selon l’étude, la « mère » de toutes les fleurs était bisexuelle, avec des parties masculines et féminines, et avait des formations en verticille, semblables à des pétales, en groupe de trois, plutôt que de formations en spirale. Il est important de noter qu’aucune espèce vivante n’a la même combinaison de caractéristiques suggérée par le modèle basé sur les données.
Comme pour le GIF d’entête, à partir de l’étude, modélisation de la “fleur ancestrale”, comme estimée par les chercheurs. (Hervé Sauquet/ Jürg Schönenberger/ Nature Com.)
L’étude publiée dans Nature Communications : The ancestral flower of angiosperms and its early diversification.
Très intéressant, comme toujours ici ! Est-ce que vous savez comment les chercheurs ont determiné les caractères dérivés des espèces de plantes les plus proches de la « fleur ancestrale » ?