Découverte d’une nouvelle ceinture de radiations pour Saturne
Le champ magnétique de Saturne est déjà reconnu comme étrange, mais les chercheurs ont maintenant découvert qu’il l’est encore plus que prévu, en découvrant une ceinture intérieure, complètement isolée, de rayonnement emprisonnée dans la magnétosphère juste au-dessus de l’atmosphère de la planète.
Alors que la sonde Cassini de la NASA entrait dans la dernière phase de sa mission d’exploration de Saturne, en septembre 2017, les scientifiques au sol ont poussé ses 22 orbites finales de plus en plus près de la planète dans une série de mouvements risqués qui effleuraient la partie supérieure de l’atmosphère.
Ce risque s’est avéré payant, la sonde a détecté une ceinture interne de rayonnement piégée près de la surface de la planète.
Saturne possède des ceintures de rayonnement bien connues, composées de protons et d’électrons à haute énergie qui entourent la planète à l’extérieur de ses anneaux. Le rayonnement s’étend sur plus de 285 000 kilomètres dans l’espace et il est fortement influencé par les nombreuses lunes de Saturne, qui le segmentent en 5 secteurs.
En 2004, alors qu’ils utilisaient le système de mesure magnétosphérique à basse énergie (LEMMS) et l’instrument d’imagerie magnétosphérique (MIMI) de Cassini pour étudier les champs magnétiques extérieurs, des chercheurs, dont Elias Roussos du Max Planck Institute for Solar Systems en Allemagne, ont découvert un anneau intérieur de rayonnement imprévu entre la planète et sa ceinture intérieure, appelé l’anneau D.
Les mesures ont indiqué de la présence possible d’une population de particules chargées, mais sa composition et ses propriétés exactes sont restées obscures. Ce n’est que vers la fin de la mission de Cassini qu’ils ont pu donner suite aux conclusions.
Selon Roussos :
Ce n’est que 13 ans plus tard, peu avant la fin de la mission, que nous avons eu l’occasion de faire le suivi de nos toutes premières mesures de Saturne et de voir si un secteur de ceinture de rayonnement supplémentaire coexiste avec l’anneau D et la haute atmosphère de la planète.
Les particules de haute énergie formant la ceinture sont capturées par le rayonnement cosmique galactique incident. Lorsqu’un tel rayonnement interagit avec la matière dans l’atmosphère de Saturne ou dans ses anneaux denses, il déclenche une chaîne de réactions qui génère les protons emprisonnés par la suite par le champ magnétique de la planète.
Image d’entête : un graphique de la NASA montrant la couche inattendue de protons piégés de Saturne. (MPS/ JHUAPL)
Cependant, le champ est au moins 10 fois plus fort près de la planète qu’il ne l’est dans les principales ceintures de rayonnement plus éloignées, ce qui signifie que les protons peuvent rester logés au même endroit pendant des années. Piégées, les particules interagiraient en permanence avec la planète et l’anneau D intérieur, perdant progressivement leur énergie.
Le bord intérieur du rayonnement atteint le bord de l’atmosphère de Saturne, tandis que la portée extérieure de la ceinture était limitée par un composant de l’anneau D, surnommé D73. Un autre anneau, D68, divise la ceinture en deux. La différence de densité entre les régions intérieure et extérieure forme ainsi une prison à protons.
Selon Roussos :
À l’extérieur de l’anneau D, les anneaux A, B et C de Saturne sont beaucoup plus denses et poussiéreux, formant une barrière efficace de 62 000 kilomètres pour piéger les particules chargées.
Cette séparation signifie que la ceinture de rayonnement interne est complètement isolée du reste de la magnétosphère. Ceci rend la région intérieure unique dans notre système solaire. La planète a essentiellement fourni aux scientifiques une ceinture de rayonnement qui peut être étudiée dans des conditions hautement contrôlées, car ses protons sont créés par un processus très stable guidé et contrôlé par le fort champ magnétique de la planète.
Les orbites finales de Cassini ont également révélé d’autres bizarreries. Contrairement à toutes les autres planètes ayant un champ magnétique dans notre système solaire, celle de Saturne s’avère être inclinée à moins de 0,01¨° de l’axe de rotation de la planète.
Ce fut une surprise, car les scientifiques croyaient que les planètes ne pouvaient générer des champs magnétiques que lorsqu’il y avait une différence entre la rotation et les axes magnétiques.
Une telle inclinaison soutiendrait les courants dans une couche de métal liquide profondément à l’intérieur d’une planète. Selon les physiciens, en l’absence d’un tel système, les courants finiraient par s’apaiser, ce qui provoquerait la dissipation du champ magnétique.
À seulement 0,01 °, l’inclinaison de Saturne est bien en dessous de la limite inférieure de 0,06 ° que les scientifiques estimaient nécessaire pour maintenir le courant interne.
L’étude publiée dans Science : A radiation belt of energetic protons located between Saturn and its rings.