Des abeilles solitaires construisent leur nid à partir de déchets plastiques
Dans les champs cultivés d’Argentine, les abeilles construisent des nids pour leurs descendances avec des matériaux étranges. Pour la première fois, des scientifiques ont trouvé des nids d’abeilles entièrement fabriqués à partir de déchets plastiques.
Image d’entête : hôtel pour abeilles, comme ceux utilisés dans cette étude. (jeans_Photos/ Flickr/ CC by 2.0)
Beaucoup de plastique sous forme d’emballage se retrouve dans les fermes et s’infiltre souvent dans le paysage. Le monde change et les espèces sauvages doivent s’adapter, mais la question de savoir si elles peuvent s’adapter assez rapidement pour survivre à l’impact de l’activité humaine fait toujours l’objet de débats.
Des chercheurs de l’Institut national argentin de technologie agricole ont découvert les nids en plastique dans le cadre de leurs recherches sur les pollinisateurs de Chicorées.
L’équipe avait installé 63 nids pièges autour des champs de culture : un peu comme ces “hôtels” pour abeilles que l’on peut construire dans son jardin pour les abeilles solitaires (image d’entête), avec de longs tubes creux, semblables aux nids d’abeilles où se développent les larves.
Les abeilles peuvent tapisser ces cavités avec des matériaux qu’elles récoltent comme la boue, les feuilles, la pierre, les pétales et la résine. Elles construisent un nid dans la cavité, séparé en cellules à couvain sur toute la longueur, chacune d’elles contenant une larve d’abeille.
Au cours du printemps et de l’été 2017 et 2018, l’équipe a vérifié mensuellement leurs nids pièges afin de déceler tout signe d’activité apicole. Ils n’ont trouvé que 3 nids utilisés par les abeilles. Deux ont été construits avec de la boue et des pétales, et 5 abeilles adultes en bonne santé en sont sorties.
La troisième avait 3 cellules entièrement construites en plastique, soigneusement découpées en forme oblongue et ovale par l’abeille, et disposées de façon à se chevaucher. Les deux premières cellules étaient construites en plastique mince et bleu clair, semblable à un sac en plastique. La troisième cellule était faite de plastique blanc plus épais.
Images tirées de l’étude : (a) déchets plastiques pris dans une clôture, (b) nid d’abeilles en plastique ; (c) les morceaux de plastique ; (d) les cellules. (Allasino et coll./ Apidologie)
Selon les chercheurs dans leur étude :
Parmi les trois cellules, l’une contenait une larve morte ; de l’autre, l’adulte semblait avoir émergé du nid ; et la troisième cellule n’était pas terminée.
Ainsi, des deux cellules occupées, une larve est morte et l’autre a grandi jusqu’à l’âge adulte, ce qui indique que le plastique n’est peut-être pas le meilleur choix de matériau de construction, mais ce n’est peut-être pas le pire non plus.
L’équipe n’a pas été en mesure d’identifier l’abeille qui avait construit le nid, mais elle pense qu’il s’agissait peut-être d’une abeille découpeuse de la luzerne (Megachile rotundata). Il s’agit d’une espèce européenne introduite en Amérique que l’équipe avait déjà vue sur le site de l’étude, et son mode de vie correspond.
C’est une abeille solitaire qui, comme son nom l’indique, coupe les feuilles pour tapisser ses nids, de la même manière que les fragments de plastique étaient taillés. Et, en Amérique du Nord, des scientifiques ont observé cette abeille utilisant du plastique pour construire des cellules souches individuelles dans un nid plus grand.
Ce qui rend ce nouveau nid si particulier, c’est que toutes les cellules du nid étaient construites en plastique et c’est le premier cas documenté où deux types différents de plastique ont été utilisés.
Et ce n’est peut-être pas une si mauvaise nouvelle. Selon les chercheurs, cela pourrait signifier que les abeilles disposent d’une flexibilité adaptative qui leur permettra de s’adapter aux changements environnementaux rapides.
Ou encore, cela pourrait signifier que les herbicides utilisés dans les champs réduisent le nombre de plantes que les abeilles préfèrent utiliser dans leur nid. Ou, parce que l’abeille dans ce cas-ci n’utilisait que du plastique, sans feuilles, elle préfère ce matériau pour une autre raison. Peut-être que le plastique offre un avantage adaptatif dont nous n’avons pas conscience, comme certains oiseaux utilisent des mégots de cigarette pour repousser les parasites.
C’est impossible à distinguer d’un seul nid.
Pour les chercheurs :
Cela pourrait mettre en évidence la capacité de réponse des abeilles dans la recherche de matériaux alternatifs pour la construction de leurs nids face aux perturbations humaines.
L’étude publiée dans la revue Apidologie : Scientific note: first global report of a bee nest built only with plastic.