Superbulle : des astronomes découvrent dans la Voie lactée une énorme "cavité" spatiale qui pourrait avoir été engendrée par une grosse explosion
En mesurant la forme et la taille de deux nuages de gaz dans l’espace, des astronomes ont découvert un grand vide entre eux, ce qui les amène à penser que ce sont les restes d’une série d’explosions stellaires ou d’une seule et unique très grosse explosion.
La cavité dans l’espace a un diamètre de 500 années-lumière et se situe entre les constellations Persée et Taureau, qui abritent toutes deux des nuages de gaz géants appelés nuages moléculaires. Les chercheurs qui étudient cet espace vide pensent que l’une des deux choses suivantes a pu se produire : soit une supernova unique et massive a projeté toute la matière gazeuse vers l’extérieur, soit plusieurs supernovæ ont créé les deux nuages, avec énormément d’espace entre eux.
Image d’entête : gigantesque cavité sphérique au sein de la Voie lactée ; son emplacement est représenté à droite. Une vue agrandie de la cavité (à gauche) montre les nuages moléculaires de Persée et du Taureau en bleu et rouge, respectivement. Cette image a été produite par collage à l’aide du WorldWide Telescope. (Alyssa Goodman/Center for Astrophysics)
Les supernovae sont censées pousser le gaz vers l’extérieur du site de leur explosion, ce qui entraîne la formation d’une structure en forme de coquille. Dans ce cas, les deux structures nuageuses de part et d’autre de l’espace sont devenues Persée et Taureau. Ensemble, ils forment la « super-coquille ou superbulle de Per-Tau » (Perseus-Taurus Supershell) .
Les nuages de gaz de Persée et de Taureau sont des pouponnières stellaires dans la Voie lactée, ce qui signifie qu’ils donnent naissance à de nouvelles étoiles. L’équipe a en fait découvert la cavité entre les nuages après avoir rendu les objets en 3D, un genre d’approche réalisée pour la première fois, afin de voir leur structure. Persée et Taureau ne sont que deux des douze nuages dont l’équipe a maintenant cartographié la structure en 3D.
Selon l’auteur principal, Catherine Zucker, chercheur postdoctoral au Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics (États-Unis) :
Nous avons pu voir ces nuages pendant des décennies, mais nous n’avons jamais connu leur véritable forme, leur profondeur ou leur épaisseur. Nous ne savions pas non plus à quelle distance se trouvaient les nuages. Maintenant, nous savons où ils se trouvent avec seulement 1 % d’incertitude, ce qui nous permet de discerner ce vide entre eux.
La cavité est peut-être plus visible dans un modèle interactif qui permet de déplacer et de redimensionner les nuages moléculaires et l’espace entre eux. L’équipe va sonder le centre de cet espace pour trouver des preuves de l’origine de la supernova. Le modèle 3D peut également être visualisé en réalité augmentée à l’aide d’un code QR figurant dans le document de recherche (lien plus bas).
La superbulle de Per-Tau peut être assimilée à une nébuleuse, c’est-à-dire à la forme éblouissante des nuages de gaz qui apparaissent après la mort d’une étoile. Mais dans ce cas, les nuages de gaz ne sont pas apparus dans les suites immédiates de l’explosion, et la coquille de Per-Tau n’émet pas de rayons X à haute énergie comme les nébuleuses.
Les chercheurs pensent que la superbulle de Per-Tau observée est le résultat direct de la supernova, mais vu à un stade beaucoup plus tardif (après 10 à 20 millions d’années), et donc la superbulle s’est déjà bien étendue. De plus il est possible que d’autres supernovae se soient produites entre-temps, contribuant ainsi à l’expansion de la coquille.
À l’avenir, l’équipe espère déterminer si ces cavités entre les nuages de gaz à la suite de supernovae sont la règle ou l’exception pour la formation d’étoiles. L’émergence de nouvelles étoiles à partir des restes éloignés d’anciennes étoiles montre comment l’univers continue de se remodeler, de gaz en gaz et de poussière en poussière.
Les recherches de l’équipe sont publiées aujourd’hui dans deux études publiées dans la revue Astrophysical Journal Letters :
… et présentées sur le site du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics : Gigantic Cavity in Space Sheds New Light on How Stars Form.