Repérer une balle de golf à 27 km de distance : le plus grand capteur d’appareil photo du monde prend les toutes premières photos à 3 200 mégapixels
Un instrument d’imagerie de nouvelle génération, conçu pour sonder les plus grands mystères de l’univers, a été mis à l’essai et a permis de reconstituer les plus grandes photos jamais prises. Le plan focal de ce qui sera le plus grand appareil photo numérique du monde a été utilisé pour prendre les toutes premières images de 3 200 mégapixels. L’équipe se prépare maintenant à installer ce réseau de capteurs dans un télescope ultra-sensible capable de repérer des objets 100 millions de fois plus ténus que ce qui peut être vu à l’œil nu.
La caméra numérique la plus grande et la plus puissante du monde est en cours d’élaboration au Laboratoire national de l’accélérateur SLAC du ministère américain de l’énergie depuis 2015. L’appareil est la pièce maîtresse de l’Observatoire Vera-C.-Rubin actuellement en construction au Chili, qui passera 10 ans à rassembler les vues les plus larges, les plus rapides et les plus profondes du ciel nocturne jamais réalisées.
Cette initiative est connue sous le nom de Legacy Survey of Space and Time (LSST), et la caméra qui en est le cœur est dotée d’un matériel suffisamment sophistiqué. Le plan focal a été assemblé en janvier dernier et comporte 189 capteurs d’images individuels qui enregistrent chacun 16 mégapixels.
Le plan focal complet de ce qui sera l’appareil photo numérique le plus puissant du monde. (Jacqueline Orrell/ SLAC National Accelerator Laboratory)
Alors qu’un appareil photo grand public plein cadre peut être équipé d’un capteur d’image de 3,5 cm de diamètre, ce plan focal s’étend sur plus de 61 cm de large. Il est suffisamment large pour capturer une partie du ciel de la taille de 40 pleines lunes et repérer les objets astronomiques avec une telle sensibilité qu’on pourrait croire qu’un humain voit une bougie à des milliers de kilomètres de distance.
Pour mettre ce plan focal à l’épreuve, l’équipe a d’abord dû le placer à l’intérieur d’un cryostat pour refroidir les capteurs à -101,1 °C afin d’atteindre la température de fonctionnement requise. Il a ensuite été utilisé pour imager une tête de brocoli (image d’entête), choisie pour ses détails complexes, ainsi que des images de l’équipe et de Vera Rubin, la scientifique qui a donné son nom à l’observatoire.
Vera Rubin par la caméra LSST. (SLAC National Accelerator Laboratory)
Ces images sont si grandes qu’il faudrait 378 écrans de télévision 4K pour en présenter une en taille réelle, alors que la résolution est suffisamment élevée pour qu’on puisse apercevoir une balle de golf à une distance d’environ 24 km.
Un champ de vision assez large pour contenir 7 Lunes avec une très grande résolution (Greg Stewart/SLAC National Accelerator Laboratory)
Selon Steven Kahn, directeur de l’observatoire SLAC :
Cette réalisation est l’une des plus importantes de tout le projet de l’observatoire Rubin. L’achèvement du plan focal de la caméra LSST et la réussite de ses tests constituent une énorme victoire de l’équipe de caméra qui permettra à l’observatoire Rubin de fournir une science astronomique de nouvelle génération.
À partir de là, l’équipe commencera à travailler à l’intégration du plan focal dans le corps de la caméra, avec ses objectifs, un obturateur et un système de filtres pour observer le ciel nocturne dans une variété de couleurs. Le produit fini sera de la taille d’un grosse voiture, et les essais finaux devraient commencer en 2021.
Selon Joanne Hewett, directrice de la recherche du SLAC :
C’est une étape importante qui nous rapproche de l’exploration des questions fondamentales sur l’univers d’une manière que nous n’avons jamais pu faire auparavant.
Présentée sur le site du SLAC National Accelerator Laboratory : Sensors of world’s largest digital camera snap first 3,200-megapixel images at SLAC.