L’intérieur de la Terre se refroidit plus vite que prévu
L‘intérieur extrêmement chaud de la Terre se refroidit lentement, mais on ignore à quelle vitesse exactement. En étudiant la façon dont un minéral commun des profondeurs de la Terre conduit la chaleur, des chercheurs de la Carnegie Institution de Washington (Etats-Unis) et de l’ETH Zurich (Suisse) ont découvert que l’intérieur de la planète pourrait se refroidir beaucoup plus rapidement que nous le pensions.
La Terre est essentiellement une tarte géante qui refroidit sur le rebord d’une fenêtre depuis 4,5 milliards d’années. Au début, elle était brûlante de la surface au centre, couverte d’océans de magma, mais au fur et à mesure qu’elle se refroidissait de l’extérieur vers l’intérieur, une solide croûte de roche se formait. Le noyau dégage encore d’énormes quantités de chaleur dans le manteau, qui alimente des processus vitaux comme la tectonique des plaques et le volcanisme, mais il finira lui aussi par se refroidir.
Le temps exact que cela prendra reste un mystère, mais les scientifiques de cette nouvelle étude ont cherché des réponses en étudiant un minéral clé appelé bridgmanite. La couche limite entre le noyau externe et le manteau inférieur est principalement composée de bridgmanite, de sorte que l’étude de la façon dont le minéral conduit la chaleur pourrait avoir des implications majeures pour la planète. Le problème est que la collecte de ces mesures est délicate à réaliser en laboratoire.
Les chercheurs ont donc placé des échantillons de bridgmanite dans une cellule à enclume de diamant, chauffée à l’aide d’un système laser pour simuler les pressions et les températures intenses qui règnent dans les profondeurs de la Terre. Ils ont ensuite mesuré la conductivité thermique de la bridgmanite à l’aide d’un système d’absorption optique.
Dispositif de mesure pour déterminer la conductivité thermique de la bridgmanite sous haute pression et température extrême. (d’après Murakami M, et col./ Earth and Planetary Science Letters)
L’équipe a découvert que la bridgmanite conduisait environ 1,5 fois mieux la chaleur qu’on ne l’avait supposé pendant longtemps. Cela signifie que la chaleur passe plus facilement du noyau au manteau, ce qui accélère le refroidissement de la Terre.
Et cela pourrait s’accélérer avec le temps. En se refroidissant, la bridgmanite se transforme en un autre minéral appelé post-pérovskite, qui est un conducteur de chaleur encore plus efficace. Lorsque ce nouveau minéral commencera à dominer la frontière, les entrailles de la Terre pourraient se refroidir encore plus rapidement.
Selon Motohiko Murakami, auteur correspondant de l’étude :
Nos résultats pourraient nous donner une nouvelle perspective sur l’évolution de la dynamique de la Terre. Ils suggèrent que la Terre, comme les autres planètes rocheuses Mercure et Mars, se refroidit et devient inactive beaucoup plus rapidement que prévu.
Bien que les chercheurs ne puissent pas être sûrs de la durée de ce processus, il est important de noter que cette accélération se produit sur des échelles de temps géologiques. L’intérieur de la Terre peut se refroidir plus rapidement qu’on ne le pensait auparavant, mais cela se fera toujours sur des milliards d’années.
L’étude publiée dans Earth and Planetary Science Letters : Radiative thermal conductivity of single-crystal bridgmanite at the core-mantle boundary with implications for thermal evolution of the Earth et présentée sur le site de l’ETH Zurich : Earth’s interior is cooling faster than expected.