Pour la première fois, deux nouvelles méthodes d’édition génétique pourraient contribuer à réduire les maladies transmises par les tiques
Il pourrait désormais être possible de réduire les maladies transmises par les tiques, telles que la maladie de Lyme, grâce à deux nouvelles méthodes d’édition génétique mises au point par des chercheurs américains. Ces nouveaux outils pourraient être utilisés pour mieux comprendre la biologie des tiques et potentiellement modifier certaines parties de leur génome impliquées dans l’hébergement et la transmission d’agents pathogènes.
Les tiques sont des parasites qui consomment du sang animal et humain. Il existe de nombreuses espèces de tiques à travers le monde et ils sont vecteurs de bactéries qui entraînent des maladies telles que la maladie de Lyme, la peste porcine, la leishmaniose et bien d’autres en fonction du lieu sur Terre où l’on peut les croiser.
Selon Jason Rasgon, professeur d’entomologie et d’épidémiologie des maladies à l’université d’État de Pennsylvanie, aux États-Unis
Les tiques sont un ennemi redoutable pour la santé publique. Nous avons désespérément besoin de nouveaux outils pour lutter contre les tiques et les agents pathogènes qu’elles propagent.
Dans la première étude démontrant une modification génétique chez les tiques, l’équipe a utilisé deux protocoles différents utilisant le système CRISPR/Cas9, un système d’édition génétique qui permet de couper l’ADN à un endroit ciblé du génome pour ajouter ou supprimer des séquences d’ADN.
Ce processus est généralement réalisé en injectant le CRISPR/Cas9 dans les embryons, mais jusqu’à présent, il était impossible de le faire dans les œufs de tiques en raison de leur revêtement de cire dure.
Toujours selon Rasgon :
Pendant de nombreuses années, on a pensé qu’il serait impossible de fabriquer une tique transgénique parce que les œufs de tique sont enduits d’une cire dure qui faisait voler en éclats les délicates aiguilles de verre utilisées pour les injections.
Les chercheurs ont pu contourner ce problème en retirant les organes maternels qui fabriquent cette cire avant que les tiques ne pondent leurs œufs. Ils ont ainsi obtenu des œufs auxquels ils ont pu injecter le complexe permettant de réaliser des délétions dans deux gènes différents.
Ensuite, à l’aide d’un protocole différent, ils ont injecté le CRISPR/Cas9 directement dans des tiques femelles adultes en gestation et ils ont utilisé un processus appelé “ReMOT Control” (Receptor-Mediated Ovary Transduction of Cargo) pour cibler spécifiquement les ovaires. Un petit peptide (une courte chaîne d’acides aminés) qui se lie à des récepteurs sur les ovaires de la plupart des espèces d’insectes a été fusionné avec le Cas9, permettant au complexe d’être délivré dans les ovaires en développement pour modifier les génomes de la progéniture.
Une photo de la tique à pattes noires, Ixodes scapularis. (Andrew Nuss/ Université du Nevada, Reno)
Il s’agit de la première recherche démontrant que ce peptide est fonctionnel chez les tiques.
Les chercheurs ont constaté que, lorsqu’il est appliqué à un gène appelé ProbB, les taux d’efficacité de l’édition génétique des deux protocoles (« injections dans l’embryon » (14 %) et « ReMOT Control » (11,7 %)) étaient similaires. L’efficacité de l’édition génétique permet d’évaluer dans quelle mesure la procédure modifie le gène, et se réfère à la fréquence des mutations par insertion ou suppression qui se produisent.
Pour Rasgon :
Le protocole ReMOT Control était tout aussi efficace que l’injection d’embryons et nettement plus facile.
Rien qu’aux États-Unis, les tiques infectent chaque année environ 300 000 personnes avec la maladie de Lyme, et si elle n’est pas traitée, l’infection peut se propager aux articulations, au cœur et au système nerveux. Actuellement, il n’existe pas de vaccin, et les traitements existants ne sont pas toujours pleinement efficaces.
Cette recherche est particulièrement importante, car le changement climatique permet aux tiques d’envahir rapidement de nouvelles zones, et de mettre encore plus de personnes et d’animaux à risque d’infections.
Les méthodes peuvent être utilisées pour mettre au point de nouvelles méthodes de lutte contre des maladies, comme la maladie de Lyme, et aussi pour mieux comprendre la biologie des tiques.
L’étude publiée dans iScience : Cas9-mediated gene editing in the black-legged tick, Ixodes scapularis, by embryo injection and ReMOT Control et présentée sur le site de l’Université du Nevada : Gene-editing breakthrough made in the battle against tick-borne diseases.