Les chiens anxieux présentent des différences mesurables dans leur cerveau qui sont similaires aux nôtres
Qu’il s’agisse de leur compagnie ou de leur contribution pour rester en forme, la pandémie a montré de manière flagrante l’importance que nous accordons aux chiens. Par exemple, près d’un foyer américain sur cinq a adopté un animal de compagnie au cours de cette période, et la majorité d’entre eux étaient des chiens, ce qui signifie que le meilleur ami de chacun se trouve aujourd’hui dans 69 millions de foyers américains.
Cependant, de nombreux propriétaires sont également confrontés à une lutte quotidienne avec des animaux souffrant de maladies mentales difficiles à traiter. Selon une étude finlandaise réalisée en 2020, des symptômes liés à l’anxiété ont été signalés chez plus de 70 % des chiens. C’est aussi l’une des principales raisons pour lesquelles les animaux finissent dans des refuges ou y sont renvoyés.
A partir de l’étude, symptômes d’anxiété chez les chiens, dans l’ordre de lecture : craintif, distrait, mâche un objet, a peur des bruits forts, agressif, regarde fixement, devient agité, gémit/aboie, tremble, demande de l’attention. (Y. Xu et col./ PLOS One)
Pour mieux comprendre l’aspect neurologique des comportements problématiques des toutous, des chercheurs de l’université de Gand, en Belgique, ont cherché à savoir si les “cartes” cérébrales variaient entre les chiens souffrant de ces troubles.
Selon les chercheurs :
La prévalence des troubles anxieux chez les chiens est élevée et il s’agit du trouble comportemental le plus rencontré dans la pratique quotidienne. En outre, ils constituent un problème sérieux non seulement pour le bien-être de l’individu, mais ils compromettent également la relation avec le propriétaire, ce qui conduit à l’abandon, à la restitution ou même à l’euthanasie.
Pour cartographier le cerveau des animaux, l’équipe de recherche a recruté 25 beagles « sains » dans un service médical universitaire et 13 chiens « anxieux » (six provenant d’un refuge, sept élevés en famille) qui ont manifesté divers comportements similaires à de l’anxiété entre 8 mois et 2 ans. Grâce à un anesthésique et à une IRM fonctionnelle non invasive (IRMf), les chercheurs ont pu constater des différences entre les voies neuronales des chiens anxieux.
Toujours selon les chercheurs :
La connexion entre l’hippocampe et le mésencéphale est l’un des points forts de nos résultats. Ici, une communication moins efficace a été trouvée entre l’hippocampe et le mésencéphale dans le groupe anxieux.
A partir de l’étude : Les connexions qui sont significativement plus élevées dans le groupe de sujets sont indiquées en jaune, les connexions qui sont significativement plus faibles sont indiquées en bleu. Abréviations : AMG, amygdale ; FL, lobe frontal ; HC, hippocampe ; MES, mésencéphale et THL, thalamus. (Y. Xu et col./ PLOS One)
L’hippocampe joue un rôle essentiel dans la mémoire et les capacités d’apprentissage, et il est également au cœur des troubles anxieux chez les humains.
Les dysfonctionnements de ces régions peuvent conduire à des symptômes d’anxiété tels que plus de peur, moins d’excitabilité, moins de capacité d’entraînement, ce qui est en accord avec de précédentes recherches chez l’humain.
L’approche multiple a permis aux chercheurs de recueillir des informations auprès des propriétaires des animaux anxieux et, en recoupant les données avec les scanners cérébraux, les scientifiques ont découvert que les chiens qui manifestaient de la peur et de l’anxiété à l’égard des étrangers, et qui montraient par ailleurs de l’excitabilité, étaient plus susceptibles d’avoir des cerveaux présentant des anomalies dans la métrique du réseau de l’amygdale.
L’étude comporte des limites : la petite taille de l’échantillon, les chiens sains étudiés en laboratoire, l’environnement dans lequel ils sont nés et ont été élevés, et les animaux anxieux qui ont été hébergés dans des refuges et dont on ne connaît pas les traitements antérieurs qui auraient pu influer sur leur état. Toutefois, les différences marquées entre les réseaux neuronaux des deux groupes sont un signe prometteur pour la poursuite des recherches sur des thérapies ciblées.
Les traitements actuels sont essentiellement comportementaux et thérapeutiques et comprennent des ISRS ou des antidépresseurs comme la fluoxétine et la clomipramine, des benzodiazépines pour gérer les symptômes à court terme et même de l’huile de CBD. En outre, il existe un marché énorme pour les gadgets calmants destinés à atténuer les comportements problématiques.
Les chercheurs estiment que plus nous en savons sur les voies neuronales présentes chez les animaux anxieux, mieux nous pourrons traiter et gérer leurs troubles.
Pour les chercheurs :
Nos résultats pourraient permettre de mieux comprendre l’organisation topologique du connectome cérébral fonctionnel dans les troubles anxieux, ce qui permettrait de mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques et l’évolution de l’anxiété chez l’animal et chez l’humain, et d’aider au développement de thérapies plus personnalisées et plus efficaces.
L’étude publiée dans PLOS One : Network analysis reveals abnormal functional brain circuitry in anxious dogs.