Réensauvageons : la protection et la restauration de la faune et de la flore représentent une nouvelle solution pour lutter contre le changement climatique
Une nouvelle étude suggère qu’en protégeant et en restaurant les espèces sauvages, nous pouvons renforcer les mécanismes naturels de capture du carbone et réduire le changement climatique.
L’introduction de solutions naturelles pour lutter contre le changement climatique en protégeant et en améliorant la capture du carbone dans les écosystèmes terrestres et aquatiques présente l’avantage supplémentaire de protéger les espèces animales.
Alors que la plupart des solutions naturelles actuelles pour lutter contre le changement climatique sont axées sur la protection et la restauration des écosystèmes végétaux, les chercheurs affirment que nous négligeons un autre moyen de limiter les émissions négatives : les animaux sauvages. Le processus consistant à utiliser la conservation des animaux sauvages pour améliorer la capture et le stockage du carbone s’appelle l’animation du cycle du carbone (ACC pour animating the carbon cycle).
Toutefois, pour tirer pleinement parti de l’animation du cycle du carbone, il faut protéger et rétablir les espèces animales en nombre suffisant pour leur permettre de remplir leur fonction écologique, ce que l’on appelle le réensauvagement trophique.
Selon une nouvelle étude menée par 15 scientifiques de huit pays, les animaux sauvages jouent un rôle essentiel dans le contrôle du cycle du carbone sur terre et dans l’eau grâce à des actions telles que la recherche de nourriture, le piétinement, l’enfouissement, la dispersion des graines et l’ingénierie écologique.
Selon Oswald Schmitz, auteur principal de l’étude :
Les espèces sauvages, par leur interaction avec l’environnement, sont le chaînon manquant entre la biodiversité et le climat. « Cette interaction signifie que le réensauvagement peut être l’une des meilleures solutions climatiques basées sur la nature dont dispose l’humanité.
Les chercheurs ont examiné neuf espèces sauvages : poissons marins, baleines, requins, loups gris, gnous, loutres de mer, bœufs musqués, éléphants de forêt d’Afrique et bisons d’Amérique, et ils ont constaté que la protection ou la restauration des populations de ces animaux pourrait collectivement permettre la capture supplémentaire de 6,41 milliards de tonnes de dioxyde de carbone par an. Cela représente 95 % de la quantité nécessaire pour atteindre l’objectif de l’Accord de Paris sur le climat de maintenir le réchauffement climatique en dessous du seuil de 1,5 °C.
Les chercheurs se sont concentrés sur les animaux de grande taille, car leurs effets écologiques sont généralement plus prononcés. En outre, ils sont plus sensibles aux interférences humaines, à la perte et à l’altération de l’habitat.
Cependant, la dynamique de l’absorption et du stockage du carbone dépend de la présence d’animaux. Les populations d’animaux sauvages ayant diminué de près de 70 % au cours des 50 dernières années, les chercheurs ont constaté qu’en poussant les populations d’animaux sauvages jusqu’à l’extinction, leurs écosystèmes pourraient passer du statut de puits de carbone à celui de source de carbone.
Les chercheurs recommandent de renforcer les efforts actuels de récupération des animaux et d’introduire une législation, des politiques et un financement pour aider à la conservation des animaux dont le nombre a été réduit par l’intervention humaine.
Ils savent que l’adoption d’une approche de réensauvagement trophique face au changement climatique nécessitera un changement d’état d’esprit.
Selon les chercheurs :
Pour soutenir ces efforts sur le plan scientifique, il faudra modifier la façon de penser et d’exécuter les recherches sur les sciences de la Terre et des écosystèmes afin de prendre en compte et de quantifier les contrôles exercés par les animaux sur l’ensemble du cycle du carbone. Cela nécessite également un changement dans la pensée politique pour reconnaître que le réensauvagement trophique peut être un élément essentiel des solutions naturelles au problème du climat. Il y a urgence sur les deux fronts, car nous perdons des populations de nombreuses espèces animales au moment même où nous découvrons à quel point elles ont un impact fonctionnel sur la capture et le stockage du carbone.
L’étude publiée dans Nature Climate Change : Trophic rewilding can expand natural climate solutions et présentée sur le site de l’Université Yale : Conserving Wildlife Can Help Mitigate Climate Change.