Le plus mortel des champignons semble avoir un antidote
Après une journée de cueillette en forêt, vous préparez votre délicieuse récolte de champignons. Cependant, comme des milliers d’autres personnes dans le monde chaque année, vous avez accidentellement ingéré une Amanite phalloïde (Amanita phalloides).
Image d’entête : Amanite phalloïde dans une forêt française. (Wikimedia)
Trente grammes suffisent pour tuer un être humain, et les personnes intoxiquées par ce champignon peuvent présenter des symptômes terribles, notamment une insuffisance hépatique et rénale. Bien que le taux de mortalité soit inconnu, on pense qu’il se situe entre 10 et 30 %, et il n’existe actuellement aucun antidote.
Une équipe de chercheurs de l’École des sciences pharmaceutiques (Shenzhen) de l’université Sun Yat-sen (Chine), a découvert qu’une substance déjà approuvée par la Food and Drug Administration (FDA, l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux) des États-Unis pourrait réduire la toxicité du champignon mortel, même si des recherches supplémentaires seront nécessaires pour le confirmer.
Selon les chercheurs dans leur nouvelle étude (lien plus bas) :
Parmi tous les champignons vénéneux, les amatoxines sont responsables de plus de 90 % des décès. L’empoisonnement à l’amatoxine est généralement associé à des issues défavorables, principalement en raison de l’insuffisance aiguë irrémédiable du foie ou des reins.
Nous démontrons que le vert d’indocyanine est efficace pour bloquer l’effet toxique de l’α-amanitine dans les cellules, les organoïdes hépatiques et les souris mâles, ce qui se traduit par une augmentation globale de la survie des animaux.
On trouve des Amanites phalloïdes dans de nombreux endroits du monde, y compris en Europe et en Amérique, et malheureusement, comme ils ressemblent aux volvaires volvacées et à l’Amanite des Césars, ils sont parfois confondus et mangés.
Les chercheurs de cette nouvelle étude se sont penchés sur la toxine la plus mortelle contenue dans le champignon, l’α-amanitine.
En utilisant l’outil de « couper-coller” génétique CRISPR/Cas9, les chercheurs ont d’abord examiné les gènes importants lorsque l’α-amanitine pénètre dans le système. Ils ont découvert qu’une autre voie génétique appelée biosynthèse des N-glycanes (N-glycosylation) et une protéine désignée STT3B, un composant essentiel pour cette voie, étaient également fortement affectées par l’α-amanitine.
Après avoir ciblé la protéine, les chercheurs ont procédé à un dépistage virtuel des médicaments pour découvrir quels composés pouvaient inhiber la STT3B. Ils ont découvert qu’un colorant cyanine appelé vert d’indocyanine, qui a déjà été approuvé par la FDA, pouvait prévenir la toxicité hépatique.
Testé sur des lignées cellulaires humaines et sur des souris, le colorant a augmenté de manière significative la probabilité de survie. Chez les souris, cette probabilité est passée de moins de 25 % au bout de 10 jours pour les souris qui n’avaient reçu que de l’α-amanitine à 50 % pour celles qui avaient également reçu du vert d’indocynanine.
Malheureusement, ce problème n’est pas encore complètement résolu. D’autres recherches devront être menées, notamment en ce qui concerne l’innocuité pour les humains et le moment le plus propice pour administrer ces traitements, mais il s’agit d’une étape importante.
Selon les chercheurs :
Nous avons observé que le vert d’indocynanine perdait son effet thérapeutique sur la toxicité de l’α-amanitine lorsqu’elle était administrée 8 et 12 heures après l’injection d’α-amanitine. Cela peut être dû au fait que l’α-amanitine a causé des dommages irréversibles au cours des premières heures de la cytotoxicité, qui ne peuvent pas être récupérés par le traitement au vert d’indocynanine. Cela suggère que le vert d’indocyanine devrait être administré le plus tôt possible au cours du traitement.
L’étude publiée dans Nature Communications : Identification of indocyanine green as a STT3B inhibitor against mushroom α-amanitin cytotoxicity.