La mission ExoMars capture une lumière verte inattendue dans le ciel martien
Pour la première fois, une légère lueur verte visible à l’œil nu a été détectée dans le ciel nocturne de Mars.
En orbite autour de la planète rouge, la mission ExoMars Trace Gas Orbiter de l’Agence spatiale européenne (ESA) a repéré dans son ciel nocturne des lueurs dans le spectre optique. Cette lumière est si brillante dans les régions polaires que des explorateurs humains pourraient même l’utiliser pour voir, si la nuit est exempte de nuages.
Image d’entête : représentation artistique de ce à quoi le ciel pourrait ressembler lors d’une nuit martienne claire, à partir d’une image réelle de la surface de Mars. (NASA/JPL-Caltech/Université de Cornell/Université d’État de l’Arizona – E. W. Knutsen)
Selon le planétologue Jean-Claude Gérard, de l’université de Liège, en Belgique :
Ces observations sont inattendues et intéressantes pour les futurs voyages sur la planète rouge.
En fait, les lueurs nocturnes sont un phénomène relativement courant dans les atmosphères du système solaire. Un certain nombre de facteurs peuvent amener notre atmosphère à émettre sa propre lumière la nuit, mais peu de choses plus que notre propre Soleil. Pendant la journée, la lumière du soleil sépare les molécules par un processus appelé photodissociation. Toutefois, du côté nocturne de l’atmosphère, à l’abri du rayonnement solaire, les atomes détachés peuvent se recombiner en molécules, libérant ainsi leur énergie excédentaire sous forme de photons.
Animation montrant comment les atomes d’oxygène se déplacent et se combinent pour produire une lueur nocturne sur Mars. (ESA)
Sur Terre, les lueurs nocturnes sont visibles depuis l’espace sous forme de couches de lumière verte, dorée et même rougeâtre, en fonction des molécules impliquées. Mais sur d’autres planètes, les choses sont un peu moins spectaculaires, du moins pour les yeux humains. Sur Vénus, la lueur nocturne est infrarouge. Sur Jupiter, la lueur est plutôt ultraviolette et apparemment variable.
Lueur nocturne sur la Terre vue depuis la Station spatiale internationale. (NASA)
Sur Mars, des lueurs nocturnes infrarouges et ultraviolettes ont été observées. Les scientifiques ont même observé sur Mars des lueurs diurnes causées par l’absorption atmosphérique et la libération de l’énergie du rayonnement solaire dans le spectre visible, bien que vous ne puissiez pas les voir vous-même, en tant qu’explorateur de Mars, car la lumière du jour est tout simplement trop brillante.
Mais selon les chercheurs :
Aucun spectre de lueur nocturne n’a été observé jusqu’à présent dans le domaine visible. La lumière solaire diffuse empêche de telles mesures depuis le sol de la Terre et aucun instrument spatial n’a observé la lueur nocturne visible de Mars.
Jusqu’à aujourd’hui. Intrigués par la découverte de lueurs nocturnes dans l’infrarouge et l’ultraviolet et de lueurs diurnes dans le visible et l’ultraviolet sur Mars, Gérard et ses collègues ont étudié les données de la sonde Trace Gas Orbiter, en pointant les instruments à la lisière de l’atmosphère, à la recherche de signes de lueurs nocturnes dans les longueurs d’onde de l’ultraviolet et du visible.
Ils en ont trouvé. Entre 40 et 60 kilomètres d’altitude, des lueurs nocturnes visibles ont été observées au pôle sud pendant l’hiver martien. Selon les chercheurs, cette lueur est le résultat de la combinaison d’atomes d’oxygène transportés depuis la journée martienne ensoleillée avec du dioxygène (O2), émettant ainsi une lueur suffisamment brillante pour être vue depuis le sol.
Représentation artistique de la sonde ExoMars Trace Gas Orbiter de l’ESA détectant la lueur verte de l’oxygène dans l’atmosphère martienne. Cette émission, repérée sur le côté jour de Mars, est similaire à la lueur nocturne observée dans l’atmosphère terrestre depuis l’espace. (ESA)
À l’heure actuelle, aucun être humain n’est encore présent sur Mars. Les agences spatiales y travaillent, mais on en est encore loin. Dans l’immédiat, la découverte d’une lueur nocturne visible permet de tirer des conclusions scientifiques intéressantes. En effet, les lueurs atmosphériques de toutes sortes sont des indicateurs de la chimie, de la circulation et des processus atmosphériques. Mars n’a qu’une très fine atmosphère, et comprendre ce qu’elle contient peut aider à comprendre pourquoi, et où est passé le reste de l’atmosphère. Cela peut également nous aider à comprendre pourquoi certains mondes sont habitables, comme la Terre, et comment certains finissent autrement, ce qui intéresse les scientifiques à la recherche de mondes habitables ailleurs dans la galaxie. Et, bien sûr, le fait de savoir comment fonctionne l’atmosphère de Mars sera utile aux futurs explorateurs.
Selon les chercheurs :
Cette lueur nocturne d’O2 devrait être observable depuis un orbiteur martien ainsi que depuis la surface martienne à l’œil nu dans des conditions de ciel clair. Ces observations ouvrent la voie à de futures observations globales de la circulation atmosphérique martienne à l’aide d’instruments plus simples et moins coûteux.
L’étude publiée dans Nature Astronomy : Observation of the Mars O2 visible nightglow by the NOMAD spectrometer onboard the Trace Gas Orbiter et présentée sur le site de l’ESA : A green glow in the martian night.