Les premiers chromosomes sexuels connus sont apparus chez les pieuvres
Les premiers chromosomes sexuels connus ont été découverts chez une espèce de pieuvre originaire de l’océan Pacifique. Ces chromosomes ont évolué il y a 380 millions d’années et constituent la première preuve de la détermination génétique du sexe chez les céphalopodes, un groupe qui comprend les calmars, les seiches, les pieuvres et les nautiles.
Image d’entête : pieuvre à deux points de Californie (Octopus bimaculoides). (Roger T. Hanlon/ Marine Biological Laboratory)
Chez de nombreux animaux, dont la plupart des mammifères et certains insectes, les chromosomes sexuels (ou gonosomes) déterminent si un individu devient mâle ou femelle. Chez les humains, les femelles ont généralement deux chromosomes sexuels X, et les mâles un chromosome sexuel X et un chromosome sexuel Y. Mais pour certains groupes d’animaux, comme les poissons et les mammifères, les chromosomes sexuels ne sont pas les mêmes. Mais pour certains groupes d’animaux, comme les céphalopodes, qui comprennent des animaux à corps mou tels que les calmars et les pieuvres, ainsi que des créatures à coquille dure appelées nautiles, les chercheurs n’étaient pas certains de la manière dont les individus devenaient mâles ou femelles. Les scientifiques pensaient généralement que des facteurs environnementaux tels que la température jouaient un rôle, comme c’est le cas pour certains reptiles et poissons.
En 2015, des chercheurs ont rapporté avoir séquencé pour la première fois le génome d’un céphalopode, celui d’un mâle de la pieuvre à deux points de Californie, Octopus bimaculoides. Dans cette dernière étude (lien plus bas), Kern et ses collègues ont cartographié le génome d’une pieuvre californienne femelle. Ils ont découvert 29 paires de chromosomes et un seul chromosome, appelé chromosome 17. En revanche, le génome du poulpe mâle comportait deux copies de ce chromosome. Cette différence a conduit les chercheurs à émettre l’hypothèse que le chromosome 17 était un chromosome sexuel.
Le séquençage de l’ADN d’autres pieuvres O. bimaculoides a confirmé cette idée. Les mâles avaient toujours deux copies du chromosome 17, alors que les femelles n’en avaient qu’une. Le chromosome 17 contenait également plusieurs gènes similaires à ceux qui codent pour des protéines présentes dans les tissus reproducteurs humains, y compris une protéine présente dans le sperme. Chez les animaux, notamment les oiseaux et les papillons, c’est un système de détermination sexuelle de type ZW/ZZ, les mâles ont également deux chromosomes sexuels Z, tandis que les femelles ont un chromosome sexuel Z et un chromosome sexuel W.
Selon Kern :
Il semblait bien que nous étions en présence d’un chromosome Z chez les O. bimaculoides. Mais les chercheurs n’ont pas trouvé de chromosome W chez les pieuvres femelles. Cela suggère que les mâles ont des chromosomes sexuels ZZ, tandis que les femelles sont ZO, le O indiquant l’absence d’un chromosome W.
L’équipe a également trouvé des chromosomes Z chez d’autres espèces de pieuvres et de calmars, mais pas chez un nautile.
Toujours selon Kern :
Ce schéma suggère que le chromosome Z a évolué une fois dans la lignée qui a conduit aux calmars et aux pieuvres modernes, après que cette lignée se soit séparée des nautiloïdes à carapace dure. Cela signifie que le chromosome Z est apparu pour la première fois il y a 450 à 250 millions d’années et qu’il s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui. Auparavant, on pensait que le plus ancien chromosome sexuel animal connu était apparu chez l’esturgeon il y a environ 180 millions d’années.
Selon Matthias Stöck, généticien évolutionniste à l’Institut Leibniz d’écologie des eaux douces et des pêches continentales de Berlin, ce chromosome est profondément conservé au cours de l’évolution.
L’étude disponible en prépublication dans bioRxiv : Cephalopod Sex Determination and its Ancient Evolutionary Origin Revealed by Chromosome-level Assembly of the California Two-Spot Octopus.