Sur les origines des mystérieuses rayures de tigre de la lune de Saturne, Encelade
La lune glacée de Saturne, Encelade, a une apparence unique, et maintenant des chercheurs américains pensent savoir d’où viennent ses « rayures tigrées ».
Image d’entête : cette image en fausses couleurs de la mission Cassini montre en bleu les fissures en » rayure de tigre » sur Encelade, la lune de Saturne. (NASA/ JPL/ Space Science Institute)
Dans leur étude publiée le 9 décembre (lien plus bas), une équipe dirigée par Doug Hemingway de la Carnegie Institution for Science (Washington) affirme que la réponse réside dans la physique qui régit les fissures par lesquelles l’eau d’un océan jaillit de la surface gelée de la Lune.
D’abord remarquées par la mission Cassini en direction de Saturne, les bandes sont parallèles et uniformément espacées, d’environ 130 kilomètres de long et 35 kilomètres de distance. Elles portent le nom de lieux mentionnés dans le recueil d’histoires que nous connaissons sous le nom des Mille et une Nuits.
Selon Hemingway :
Ce qui les rend particulièrement intéressants, c’est qu’elles sont continuellement en éruption avec de la glace d’eau, au moment même où nous parlons. Aucune autre planète ou lune glacée n’a quelque chose comme ça.
Avec Max Rudolph et Michael Manga de l’université de Californie, Hemingway a développé des modèles pour étudier les forces physiques qui permettent aux fissures de se former et de demeurer.
(NASA/ JPL-Caltech/Space Science Institute/Cassini imaging team)
Encelade subit un échauffement interne dû à l’excentricité de son orbite. Sa distance de Saturne varie, ce qui la déforme légèrement en fonction de la gravité de la planète. Ce processus l’empêche de geler complètement.
Selon les chercheurs, la clé de la formation des fissures réside dans le fait que les pôles de la lune subissent les effets les plus importants de cette déformation induite par la gravité, de sorte que l’inlandsis (calotte polaire) y est plus mince.
Pendant les périodes de refroidissement graduel d’Encelade, une partie de son océan souterrain gèlera.
Comme l’eau prend de l’expansion lorsqu’elle gèle et que la croûte de glace s’épaissit par en dessous, la pression dans l’océan sous-jacent augmente jusqu’à ce que la coquille de glace finisse par s’ouvrir, créant une fissure.
Ce graphique illustre comment les scientifiques de la mission Cassini pensent que l’eau interagit avec la roche au fond de l’océan de la lune glacée de Saturne, Encelade, produisant de l’hydrogène gazeux. (NASA / JPL-Caltech / Southwest Research Institute)
En raison de leur glace relativement mince, les pôles sont les plus sensibles aux fissures.
Les chercheurs pensent que la fissure qui porte le nom de la ville de Bagdad a été la première à se former. Cependant, elle ne s’est pas simplement figée à nouveau. Elle est restée ouverte, permettant à l’eau de s’échapper de sa crevasse, ce qui a provoqué la formation de trois autres fissures parallèles.
Les fissures supplémentaires formées par le poids de la glace et de la neige qui s’accumulent le long des bords de la fissure de Bagdad sont dues au gel et à la chute des jets d’eau de l’océan sous la surface. Ce poids a ajouté une nouvelle forme de pression sur l’inlandsis.
Selon M. Rudolph :
L’inlandsis s’est alors fléchi juste assez pour provoquer une fissure parallèle à environ 35 kilomètres de distance.
Pour les chercheurs, le fait que les fissures restent ouvertes et entrent en éruption est également dû aux forces de marée de la gravité de Saturne.
La déformation de la lune empêche la plaie de cicatriser, en élargissant et en rétrécissant les fissures et en faisant entrer et sortir l’eau, empêchant la glace de se refermer.
Dans le cas d’une lune plus grande, sa propre gravité serait plus forte et empêcherait les fissures supplémentaires de s’ouvrir jusqu’au bout. Donc, affirment les chercheurs, ces rayures n’ont pu se former que sur Encelade.
Et pourquoi ne se sont-elles formées que sur le pôle sud ? C’est une question de hasard, suggèrent-ils. Les fissures auraient pu se former à l’un ou l’autre pôle, mais le sud s’est ouvert en premier.
L’étude publiée dans Nature Astronomy : Cascading parallel fractures on Enceladus et présentée sur le site de la NASA : How Enceladus got its stripes.