Informatique quantique : des atomes artificiels améliorent la stabilité des puces quantique en silicium
En Australie, des ingénieurs quantiques ont créé des atomes artificiels dans des puces de silicium qui, selon eux, permettrait de produire des bits quantiques plus cohérents, ou qubits, les unités de base de l’information dans un système quantique.
Les recherches s’appuient sur de précédents travaux de l’équipe, qui a produit les tout premiers qubits sur une puce en silicium, capable de traiter des informations avec une précision de plus de 99 %. Maintenant, ils ont trouvé un moyen de minimiser le taux d’erreur dû aux imperfections du silicium.
Et, ajoutent-ils, il existe des parallèles avec le tableau périodique des éléments.
Dans un véritable atome, les électrons tournent en trois dimensions autour d’un noyau. Ces orbites tridimensionnelles sont appelées couches électroniques (ou coquilles d’électrons), et les éléments peuvent avoir des nombres d’électrons différents.
Les atomes artificiels, également appelés boites ou points quantiques, sont des cristaux semi-conducteurs à l’échelle nanométrique dont l’espace peut piéger les électrons et confiner leur mouvement en trois dimensions, en les maintenant en place grâce à des champs électriques.
L’idée de créer des atomes artificiels qui ont des électrons, mais pas de noyau, n’est pas nouvelle. Elle a été proposée pour la première fois en théorie dans les années 1930, puis démontrée expérimentalement dans les années 1990.
Selon Andrew Dzurak de l’université de Nouvelle-Galles du Sud (UNSW/ Australie) :
Mais ce qui nous passionne vraiment dans nos dernières recherches, c’est que les atomes artificiels ayant un nombre d’électrons plus élevé s’avèrent être des qubits beaucoup plus robustes qu’on ne le pensait auparavant, ce qui signifie qu’ils peuvent être utilisés de manière fiable pour les calculs dans les ordinateurs quantiques.
C’est significatif, car les qubits basés sur un seul électron peuvent être très peu fiables.
Dans leur étude, Dzurak et ses collègues décrivent la configuration leur dispositif quantique dans le silicium pour tester la stabilité des électrons dans les atomes artificiels.
Un plateau en silicium de mesure haute fréquence qubit, qui est placé à l’intérieur d’un réfrigérateur à dilution pour refroidir la puce (le rectangle) à environ 0,1 degré au-dessus du zéro absolu. (UNSW/ Ken Leanfore)
Ils ont appliqué une tension au silicium via une électrode « porte » à surface métallique afin d’attirer les électrons de réserve du silicium pour former une boite quantique, un espace infiniment petit de seulement 10 nanomètres de diamètre environ. Selon André Saraiva, qui a dirigé l’analyse théorique des résultats :
En augmentant lentement la tension, nous attirions de nouveaux électrons, les uns après les autres, pour former un atome artificiel dans notre boite quantique.
Dans un atome réel, vous avez une charge positive au milieu, qui est le noyau, et ensuite les électrons chargés négativement sont maintenus autour de lui dans des orbites tridimensionnelles.
Dans notre cas, plutôt que le noyau positif, la charge positive provient de l’électrode porte qui est séparée du silicium par une barrière isolante d’oxyde de silicium, puis les électrons sont suspendus en dessous, chacun orbitant autour du centre de la boite quantique. Mais au lieu de former une sphère, ils sont disposés à plat, en un disque.
Les chercheurs se sont intéressés à ce qui se passait lorsqu’un électron supplémentaire commençait à peupler une nouvelle couche électronique extérieure, et c’est là que les comparaisons avec le tableau périodique entrent en jeu. En chimie, les éléments ayant un seul électron dans leur enveloppe extérieure comprennent l’hydrogène et les métaux Lithium, Sodium et Potassium. Selon l’auteur principal Ross Leon :
Lorsque nous créons l’équivalent de l’hydrogène, du lithium et du sodium dans la boite quantique, nous pouvons utiliser cet électron isolé sur la couche extérieure comme un qubit.
Jusqu’à présent, les imperfections des dispositifs en silicium au niveau atomique ont perturbé le comportement des qubits, ce qui a entraîné un fonctionnement peu fiable et des erreurs.
Mais il semble que les électrons supplémentaires dans les couches internes agissent comme une « amorce » sur la surface imparfaite de la boite quantique, donnant de la stabilité à l’électron dans la couche externe ». Et c’est une étape cruciale pour que les ordinateurs quantiques en silicium deviennent une réalité, selon Dzurak, car le spin (rotation) d’un électron est utilisé pour coder la valeur du qubit.
Le spin est une propriété de la mécanique quantique. Un électron agit comme un minuscule aimant et, selon la façon dont il tourne, son pôle nord peut pointer vers le haut ou vers le bas, ce qui correspond à un 1 ou un 0.
Lorsque les électrons d’un atome réel ou de nos atomes artificiels forment une coquille complète, ils alignent leurs pôles dans des directions opposées de sorte que le spin total du système soit nul, ce qui les rend inutiles en tant que qubit.
Mais lorsque nous ajoutons un électron de plus pour former une nouvelle coquille, cet électron supplémentaire a un spin que nous pouvons à nouveau utiliser comme qubit.
Contrôler le spin d’un électron pour créer un qubit : les électrons dans la couche interne apportent de la stabilité aux électrons de la couche externe de la boite quantique. (Université de Nouvelle-Galles-du-Sud)
Les dernières recherches, explique Dzurak, montrent que l’équipe peut contrôler le spin des électrons dans les enveloppes extérieures des atomes artificiels pour fournir des qubits fiables et stables.
C’est vraiment important, car cela signifie que nous pouvons maintenant travailler avec des qubits beaucoup moins fragiles. Un électron est une chose très fragile. Cependant, un atome artificiel de cinq électrons, ou 13 électrons, est beaucoup plus robuste.
L’étude publiée dans Nature Communications : Coherent spin control of s-, p-, d- and f-electrons in a silicon quantum dot et présentée sur le site de l’université de Nouvelle-Galles du Sud : Artificial atoms create stable qubits for quantum computing.