Cela fait des milliers d’années que les océans ne se sont pas réchauffés ainsi
Les océans se réchauffent en même temps que le reste de la planète, atteignant des températures record jamais atteintes depuis des milliers d’années. Deux études récentes ont montré que le réchauffement climatique entraîne des changements de température à la surface de l’océan, ainsi que dans les zones de glaciation au fond de celui-ci.
Une équipe de chercheurs d’universités des États-Unis et du Canada a découvert que l’océan Atlantique a atteint sa température la plus élevée depuis 2 900 ans. Ils se sont penchés sur la « variabilité pluridécennale de la température de surface de la mer » (AMV pour multidecadal sea surface temperature variability), à savoir les phases chaudes et froides naturelles qui peuvent durer jusqu’à 40 ans chacune.
L’étude portait sur les données de température ainsi que sur des carottes de glace et de sédiments, prélevées dans des calottes glaciaires et au fond de la mer. Cela a permis aux scientifiques de passer au crible des couches de microbes et des indices chimiques pour reconstruire le passé. Les échantillons ont été prélevés dans le lac South Sawtooth de 80 mètres de profondeur dans l’Arctique canadien.
Nicholas Balascio et François Lapointe travaillent avec une foreuse pour percer la glace de 3,5 m d’épaisseur au lac South Sawtooth, au Canada. (Mark B Abbott)
Les chercheurs ont analysé le titane dans les carottes de sédiments pour reconstituer l’histoire des températures de l’océan Atlantique au cours des 2 900 dernières années, révélant une variabilité d’une décennie à l’autre. Ils ont trouvé des périodes chaudes de 100 avant J.-C. à 420 après J.-C., suivies de la période où la chute des températures a été la plus longue et la plus persistante au cours du Petit Âge glaciaire.
Selon les chercheurs :
Les températures ont augmenté régulièrement depuis le minimum du XVe siècle. Le taux et l’ampleur du réchauffement au cours des derniers siècles sont sans précédent dans l’ensemble des relevés, ce qui a conduit à la dernière décennie qui a été la plus chaude au cours des 2 900 dernières années.
Ils ont également comparé d’autres preuves provenant de l’Atlantique Nord, qui ont étayé leurs conclusions concernant le lac Sawtooth. Ils ont observé que d’autres carottes de sédiments prélevées sur la côte islandaise donnaient des indices sur ce qui se passait sur une période plus courte, les deux derniers siècles environ.
Ils ont découvert que le Turborotalita quinqueloba, minuscule organisme unicellulaire à coquille qui aime les eaux froides, « a décliné à un rythme accéléré au cours du siècle dernier et a atteint des valeurs basses sans précédent au cours de la dernière décennie ». Cela les a amenés à conclure que le récent réchauffement de l’Atlantique est « sans précédent » depuis au moins 2 900 ans.
L’étude a été publiée dans la revue PNAS : Annually resolved Atlantic sea surface temperature variability over the past 2,900 y et présentée sur le site de l’université du Massachussets à Amherst : Recent Atlantic Ocean Warming Unprecedented in Nearly 3,000 Years.
Une autre étude a révélé que les eaux gelées au fond de l’océan se réchauffent également, les températures augmentant plus rapidement qu’on ne le pensait auparavant. Entre 2009 et 2019, les températures de l’eau à quatre profondeurs différentes de l’océan Atlantique se sont réchauffées de 0,002 – 0,04°C. Cela peut sembler minuscule, mais c’est en fait assez significatif.
Selon Christopher Meinen, océanographe à l’Administration nationale américaine des océans et de l’atmosphère (NOAA) et auteur principal de l’étude :
Si vous pensez à la taille des profondeurs de l’océan, c’est une énorme quantité de chaleur.
Il estime que les résultats sont cohérents avec le changement climatique anthropomorphique (causé par l’humain).
Les données ont été obtenues grâce à un ensemble d’instruments que les scientifiques utilisent depuis des années pour étudier les courants océaniques. Ils ont conclu que les températures des profondeurs océaniques doivent être relevées au moins une fois par an pour comprendre les tendances sur le long terme. Ils espèrent que l’étude incitera d’autres personnes à examiner leurs propres données sur les températures provenant des instruments existants. Selon M. Meinen, un meilleur système d’observation de l’océan pourrait aider les scientifiques à prévoir les conditions météorologiques saisonnières.
L’étude publiée dans Geophysical Research Letters : Observed Ocean Bottom Temperature Variability at Four Sites in the Northwestern Argentine Basin: Evidence of Decadal Deep/Abyssal Warming Amidst Hourly to Interannual Variability During 2009–2019 et présentée sur le site de l’AGU : The deep sea is slowly warming.
Salut,
Si je peux me permettre une petite correction, sans vouloir vous vexer, on dit « anthropique » pour ce qui est de cause humaine. Le terme d’anthropomorphique désigne quelque chose qui a forme humaine…
Bien à vous.
Effectivement… petite erreur d’inattention du Guru. Merci Bertrand !