Champ gravitationnel : la plus petite mesure de la gravité jamais réalisée
Des physiciens ont enregistré le plus petit champ gravitationnel jamais mesuré, montrant que la loi de la gravité de Newton tient même pour de petites masses.
Image d’entête : la bille en or utilisée en comparaison de la taille d’une pièce de 1 centime. La gravité peut être considérée comme provenant d’une déformation de l’espace-temps, comme le montre la déformation artistique. (Arkitek Scientific)
Cette nouvelle étude, lien plus bas, pourrait nous aider à explorer la physique fondamentale, comme la nature de la matière noire, ou la relation entre la gravité et la physique quantique.
Bien que les effets de la gravité nous soient familiers dans notre vie quotidienne, il s’agit de la plus faible et de la moins bien comprise des quatre forces fondamentales. Les physiciens ne savent même pas comment elle s’inscrit dans le modèle standard de la physique, ni comment elle peut être conciliée avec la physique quantique.
Si les observations récentes d’objets massifs du domaine de l’astrophysique, comme la détection des ondes gravitationnelles d’une fusion de trous noirs, ont amélioré notre perception de ce phénomène à grande échelle, notamment en testant la théorie de la relativité générale d’Einstein, les études à petite échelle, ici sur Terre, sont également importantes.
Dans cette nouvelle étude (lien plus bas), dirigée par le physicien quantique Markus Aspelmeyer de l’université de Vienne, en Autriche, les chercheurs ont testé la force de liaison entre deux sphères dorées d’une masse d’environ 90 milligrammes, soit la masse de quatre mouches domestiques.
Selon les chercheurs dans leur étude :
À notre connaissance, il s’agit du plus petit objet unique dont le champ gravitationnel a été mesuré.
Le dispositif expérimental n’a pas été facile à mettre en place. Pour tester la gravité, il faut un environnement hautement contrôlé, sans le « bruit » d’autres forces plus fortes que la gravité. L’équipe a donc relié l’une des sphères à une chambre à vide pour minimiser les effets sismiques et acoustiques, et elle a bloqué les forces électrostatiques avec un écran en aluminium plaqué or. L’autre sphère a ensuite été rapprochée de quelques millimètres.
La gravité est mesurée entre deux masses d’or (de 1 mm de rayon chacune) que l’on rapproche l’une de l’autre. (Tobias Westphal/ Université de Vienne)
Le test a confirmé la physique newtonienne classique que nous avons tous apprise au lycée : la force gravitationnelle entre les sphères dépend de leur masse et de leur distance.
Selon Christian Rothleitner, de l’Institut national de métrologie d’Allemagne dans un article accompagnant l’étude :
La détection d’un signal gravitationnel aussi minuscule est en soi un résultat passionnant, mais les chercheurs sont allés encore plus loin en déterminant une valeur pour G à partir de leur expérience.
G est la constante gravitationnelle de Newton, essentielle au calcul de la force gravitationnelle. Alors que les mesures expérimentales d’autres constantes fondamentales se sont améliorées et ont convergé avec le temps, comme celle de la vitesse de la lumière, cela n’a pas été le cas pour G.
Aspelmeyer et son équipe fournissent une nouvelle estimation de G, qui diffère d’environ 9 % de la valeur convenue au niveau international.
Mais, note Rothleitner, il s’agit là d’un « faible écart, étant donné que les incertitudes expérimentales de leur système n’ont pas encore été optimisées pour des mesures précises de G« .
La prochaine étape consiste à améliorer la sensibilité du dispositif expérimental et à commencer à mesurer des masses encore plus petites.
Ce type d’observations pourrait aider les physiciens à mesurer des champs gravitationnels si faibles qu’ils pourraient entrer dans le domaine quantique.
Selon les chercheurs :
Ce travail ouvre la voie à la frontière inexplorée des masses sources microscopiques, qui permettra d’étudier les interactions fondamentales et fournira une voie vers l’exploration de la nature quantique de la gravité.
L’étude publiée dans Nature : Measurement of gravitational coupling between millimetre-sized masses et présentée sur le site de l’Université de Vienne : How a ladybug warps space-time.