La rapidité avec laquelle les poissons-clowns obtiennent leurs bandes blanches dépend des anémones avec lesquelles ils vivent
Selon une nouvelle étude, la rapidité avec laquelle les poissons-clowns obtiennent leurs rayures blanches dépend des anémones avec lesquelles ils vivent.
Image d’entête : poissons-clowns du Pacifique (Amphiprion percula) photographiés dans la baie de Kimbe, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. (Tane Sinclair-Taylor)
Ces jolis poissons orange développent leurs bandes blanches lorsqu’ils passent de l’état de larve à celui d’adulte, un processus appelé métamorphose, mais la manière dont cela se produit était jusqu’à présent inconnue.
Une équipe de chercheurs, dirigée par Pauline Salis de l’Université de Paris et de l’Observatoire Océanologique de Banyuls-sur-Mer (CNRS), a découvert que certains gènes et hormones thyroïdiennes contrôlent la vitesse à laquelle les poissons développent leurs rayures, mais que les niveaux hormonaux sont influencés par le type d’anémone dans laquelle vivent les poissons-clowns. Les anémones de mer, armées de cellules urticantes toxiques sur leurs tentacules, protègent les poissons-clowns des prédateurs du récif. Les poissons-clowns protègent également l’anémone de mer des prédateurs et assurent la nutrition et l’oxygénation de leur hôte.
Selon Pauline Salis :
Nous voulions comprendre non seulement pourquoi la formation des bandes est plus rapide ou plus lente selon l’anémone de mer, mais aussi ce qui motive ces différences.
L’équipe a étudié l’espèce de poisson-clown du Pacifique, Amphiprion percula dans la baie de Kimbe, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Cette espèce vit dans deux types d’anémones différents : l’anémone magnifique (Heteractis magnifica) ou l’anémone carpette géante (Stichodactyla gigantea).
L’espèce de poisson-clown Amphiprion percula a pour hôte soit l’anémone de mer à longues tentacules Heteractis magnifica (à gauche), soit l’anémone de mer à courtes tentacules Stichodactyla gigantea (à droite). (Kina Hayashi)
Ils ont constaté que les jeunes poissons vivant dans l’anémone carpette développaient leurs rayures plus rapidement.
En laboratoire, l’équipe a administré à une espèce apparentée de poisson-clown, le Poisson-clown à trois bandes (Amphiprion ocellaris) différentes doses d’hormones thyroïdiennes, connues pour déclencher la métamorphose chez les grenouilles. Les poissons ayant reçu une dose plus élevée ont développé leurs rayures plus rapidement.
Ils ont ensuite analysé les niveaux d’hormones des poissons A. percula de la baie de Kimbe et ils ont constaté, conformément aux résultats obtenus en laboratoire, que les poissons vivant dans l’anémone carpette présentaient des niveaux d’hormones thyroïdiennes plus élevés que les poissons vivant dans l’anémone magnifique. C’est peut-être la raison pour laquelle leurs rayures se sont développées plus rapidement.
Pendant la métamorphose, le poisson-clown, Amphiprion percula, prend une couleur orange vif et développe successivement trois bandes blanches, de la tête à la queue. Ceux vivant dans l’anémone à longs tentacules, Heteractis magnifica, (à gauche) ont moins de bandes que les poissons-clowns du même âge et de la même taille vivant dans l’anémone carpette, Stichodactyla gigantea (à droite). L’image montre l’apparence typique des poissons-clowns âgés de 150 à 200 jours. (Fiona Lee, Academia Sinica, Taiwan)
Pour approfondir les causes de ces différences de taux d’hormones, l’équipe a mesuré l’activité des gènes des poissons-clowns.
Selon l’auteur principal, Vincent Laudet, du Collège doctoral de science et technologie d’Okinawa, au Japon :
La grande surprise fut que sur tous ces gènes, seuls 36 différaient entre les poissons-clowns des deux espèces d’anémones de mer. Et l’un de ces 36 gènes, appelé duox, nous a donné un véritable moment eurêka.
Le gène DUOX joue un rôle important dans la formation des hormones thyroïdiennes, disent-ils, et ce gène était plus actif chez les poissons-clowns qui vivaient dans l’anémone carpette géante.
Au final, cela signifie que les poissons-clowns qui vivent dans ces anémones ont favorisé une plus grande activité du DUOX, qui produit une plus grande quantité d’hormones thyroïdiennes, ce qui permet aux poissons de développer des rayures plus rapidement.
Toujours selon Laudet :
Nous soupçonnons que ces changements dans la formation des bandes blanches ne sont que la partie émergée de l’iceberg, et que de nombreuses autres différences sont présentes qui aident les poissons-clowns à s’adapter aux deux différents hôtes des anémones de mer.
L’étude publiée dans The Prceedings of the National Academy of Sciences : Thyroid hormones regulate the formation and environmental plasticity of white bars in clownfishes et présentée sur le site du Collège doctoral de science et technologie d’Okinawa : How do clownfish earn their stripes?