Vous pouvez continuer à remplir la mangeoire, les oiseaux ne semblent pas devenir dépendants à votre nourriture
A celles et ceux qui nourrissent les oiseaux sauvages, rassurez-vous, les chanteurs qui visitent les mangeoires dans votre jardin ne risquent pas de développer une dépendance malsaine à leur égard. Dans une nouvelle étude, des chercheurs se sont penchés sur les habitudes d’utilisation des mangeoires par les mésanges à tête noire (Poecile atricapillus) et n’ont rien trouvé qui suggère une telle dépendance, qui commençait à inquiéter les propriétaires de mangeoire du monde entier.
Image d’entête : mésanges à tête noire utilisant une mangeoire. (Université d’État de l’Oregon)
Nourrir intentionnellement les animaux sauvages est une activité très répandue dans le monde entier, qui représente une industrie mondiale de plusieurs milliards d’euros. Par exemple, plus de 50 millions de personnes aux États-Unis fournissent un complément de nourriture aux oiseaux, et plus de 4 milliards de dollars (3,5 milliards d’euros environ) sont dépensés chaque année en nourriture, mangeoires et accessoires pour oiseaux.
Cependant, la nature extensive et répandue de l’alimentation intentionnelle a une série de conséquences sur les populations d’animaux sauvages en liberté, qui sont mieux documentées chez les oiseaux. Il s’agit notamment d’effets négatifs tels que la transmission de maladies, l’intensification de la concurrence et la diminution des performances de reproduction, ainsi que la restructuration des communautés locales.
Au fur et à mesure que l’on en apprend davantage sur la façon dont les populations d’oiseaux sauvages sont affectées, le débat sur l’opportunité de réglementer ces pratiques a conduit certains pays à établir des politiques et de meilleures pratiques de gestion concernant l’alimentation complémentaires des animaux sauvages. Ce point est particulièrement pertinent pour les latitudes nord, où l’alimentation des oiseaux est plus courante.
Néanmoins, très peu d’études ont réellement évalué si les oiseaux en liberté augmentent leur dépendance à l’égard de ces sources de nourriture supplémentaires pendant les périodes exigeantes comme l’hiver. Ainsi, le débat sur la question de savoir si les mangeoires à oiseaux produisent ou non une dépendance malsaine se fait toujours à l’aveugle. Ou plutôt, c’était le cas jusqu’à présent.
Selon Jim Rivers, écologiste animalier à l’Université d’État de l’Oregon (Etats-Unis) et coauteur de l’étude :
Il y a encore beaucoup de choses que nous ne savons pas sur la façon dont l’alimentation intentionnelle peut induire des changements dans les populations d’oiseaux sauvages, mais notre étude suggère que mettre de la nourriture pour les petits oiseaux en hiver ne conduira pas à une dépendance accrue à la nourriture fournie par l’homme.
Les chercheurs ont étudié les habitudes d’utilisation des mangeoires des mésanges à tête noire soumises à un déplumage expérimental : un enlèvement intensif des plumes de vols, un enlèvement léger ou, comme contrôle, pas d’enlèvement. Le retrait expérimental des plumes de vol primaires est une technique établie pour modifier la charge alaire et augmenter les coûts énergétiques du vol.
La mésange a été spécifiquement choisie en raison de sa petite taille et du fait qu’elle fréquente les mangeoires en hiver dans toute son aire de répartition. Elle a des besoins énergétiques quotidiens élevés et prend généralement une graine à chaque visite de la mangeoire, ce qui permet de mesurer clairement le taux de fréquentation des mangeoires. Les oiseaux ont été marqués avec des puces, et 21 mangeoires ont été remplies de graines de tournesol.
L’étude a révélé que les mésanges handicapées expérimentalement, c’est-à-dire celles qui subissent des coûts de vol élevés, n’ont pas augmenté leur taux de fréquentation des mangeoires. Au contraire, les oiseaux à plumes soustraites ont en fait diminué leur utilisation des mangeoires pendant quelques semaines, probablement en raison d’une moindre exposition à la prédation, mais ont ensuite utilisé les mangeoires à des niveaux similaires à ceux des oiseaux témoins à plumes non enlevées.
Toujours selon Rivers :
La réduction de l’utilisation des mangeoires par les mésanges déplumées par rapport aux oiseaux témoins suggère que la nourriture dans l’environnement était suffisamment disponible pour compenser l’augmentation des coûts de vol et leur a permis de réduire l’utilisation des mangeoires. Il est clair que les mésanges de notre étude n’ont pas augmenté leur taux de fréquentation ni leur dépendance à l’égard des aliments complémentaires.
L’étude publiée dans le Journal of Avian Biology : Experimentally induced flight costs do not lead to increased reliance on supplemental food in winter by a small songbird et présentée sur le site de l’Université d’État de l’Oregon : Don’t worry, birds won’t become dependent on you feeding them, OSU study suggests.