Les effets cumulatifs de petits impacts sur la surface de la lune de Jupiter, Europe, montre que nous devrons creuser profondément pour y trouver des signes de vie extraterrestre
Des astronomes ont les yeux rivés sur la lune de Jupiter, Europe, depuis un certain temps. À première vue, il ne se passe pas grand-chose dans ce monde stérile, mais ce satellite gelé a en fait beaucoup d’atouts. Tout d’abord, il n’est peut-être pas stérile. Grâce aux observations au sol, les chercheurs savent que la surface d’Europe est principalement recouverte de glace d’eau, mais ces dernières années, nous avons trouvé des preuves irréfutables de la présence d’un océan liquide et salé sous la croûte gelée, ainsi que de volcans actifs au fond de l’océan.
Image d’entête : la surface de la lune Europe obtenue par la sonde Galileo. (NASA / JPL-Caltech)
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La vie, telle que nous la connaissons, semble avoir trois exigences principales : de l’eau liquide, les éléments chimiques appropriés et une source d’énergie, et ces trois éléments pourraient se trouver sur Europe.
Dans une nouvelle étude, un modèle informatique estime que la surface d’Europe a été bouleversée par un processus appelé « jardinage par impact » (impact gardening). D’après les études, les 30 premiers centimètres de la surface ont été remués pendant des dizaines de millions d’années. Cela signifie qu’ils ont été exposés à des radiations, qui auraient probablement détruit tous signes de vie, si ces signes existaient.
Une version retraitée de la superbe image de la lune de Jupiter, Europe, obtenue par la sonde Galileo. (NASA)
La vie sur Terre est protégée des radiations grâce à notre atmosphère et au champ magnétique terrestre, qui tient à distance les parties les plus nocives du rayonnement solaire. D’autres corps célestes, comme notre Lune ou Europe, n’ont pas cette chance, et ils sont constamment bombardés. La couche de glace pourrait protéger les formes de vie sur Europe si elles vivent assez profondément sous celle-ci. Mais si ces formes de vie (ou leurs signatures chimiques) devaient atteindre la surface, elles seraient presque certainement détruites.
L’atmosphère nous protège également des impacts d’astéroïdes et de météorites. C’est pourquoi la Lune, par exemple, est criblée de cratères d’impact, alors que la Terre est beaucoup moins touchée car beaucoup de ces corps se consument dans l’atmosphère. Ces impacts projettent également des matériaux à la surface, les exposant ainsi aux radiations.
Sur cette image agrandie de la surface d’Europe, capturée par la mission Galileo de la NASA, la fine couche brillante, visible au sommet d’une falaise au centre, montre le type de zones perturbées par le jardinage d’impact. (NASA/ JPL-Caltech)
Donc si nous voulons rechercher des signes de vie sur Europe, nous devons fouiller un peu plus profondément.
Selon l’auteur principal Emily Costello, une scientifique spécialisée dans la recherche planétaire à l’Université d’Hawaï à Manoa
Si nous espérons trouver des biosignatures chimiques vierges, nous devrons regarder sous la zone où les impacts ont été conservés. Les biosignatures chimiques dans les zones moins profondes que cette zone peuvent avoir été exposées à un rayonnement destructeur.
Selon l’équipe de recherche dans l’étude :
Même à des latitudes plus élevées, où les biosignatures peuvent être préservées contre les radiations à des profondeurs de quelques centimètres, le jardinage par impact fait remonter les matériaux vers la surface et peut contrecarrer les espoirs de préservation et d’échantillonnage à faible profondeur.
Le “jardinage par impact” sur Europe a déjà été proposé auparavant, mais cette nouvelle étude offre l’un des arguments les plus complets en sa faveur. En outre, elle estime également la profondeur à laquelle il se produit.
C’est la première fois que l’on prend en compte les impacts secondaires causés par les débris qui retombent sur la surface d’Europe après avoir été soulevés par un premier impact. Les recherches suggèrent également que les latitudes moyennes et élevées d’Europe seraient moins affectées par le double choc du jardinage d’impact et des radiations. C’est donc là que nous devrions probablement commencer à chercher des signes de vie.
Selon Cynthia Phillips, un scientifique pour Europe au Jet Propulsion Laboratory de la NASA en Californie du Sud et un des coauteurs de l’étude :
Ce travail élargit notre compréhension des processus fondamentaux sur les surfaces à travers le système solaire. Si nous voulons comprendre les caractéristiques physiques et la façon dont les planètes en général évoluent, nous devons comprendre le rôle que joue le jardinage d’impact dans leur remodelage.
Bien qu’aucune mission à la surface d’Europe ne soit prévue, le lancement de la mission Europa Clipper de la NASA est prévu pour 2024. La sonde spatiale effectuera une série de survols rapprochés d’Europe, transportant des instruments permettant d’étudier la lune à distance et d’analyser des échantillons de poussière et de gaz éjectés de la surface d’Europe.
Représentation artistique de la mission Europa Clipper avec la sonde approchant de sa cible dans l’un de ses nombreux survols. (NASA/JPL-Caltech)
L’étude publiée dans Nature Astronomy : Impact gardening on Europa and repercussions for possible biosignatures et présentée sur le site de la NASA : Surface of Jupiter’s Moon Europa Churned by Small Impacts.