Une source mystérieuse dans les profondeurs de l’espace génère 1 652 sursauts radio rapides en 47 jours seulement
Un nouvel et énorme ensemble de données pourrait bientôt aider à percer le mystère cosmique des sursauts radio rapides (ou FRB pour Fast Radio Burst). En l’espace de quelques semaines, plus de 1 600 nouveaux signaux ont été détectés en provenance de l’une des sources de FRB les plus étudiées, ce qui a permis d’écarter une hypothèse dominante sur leur origine.
Dans la plus pure tradition scientifique, le nom dit tout ce qu’il faut savoir : ces signaux sont des salves/ sursauts d’ondes radio d’une durée de quelques millisecondes, chacune transportant plus d’énergie que le Soleil n’en émet en un an. Certains de ces signaux ne se répètent qu’une seule fois, tandis que d’autres se répètent de manière aléatoire ou selon un cycle prévisible.
Mais ce qui les crée exactement reste un mystère. Les trous noirs, les supernovæ, les étoiles à neutrons, d’étranges particules et, bien sûr, les extraterrestres ont tous été proposés comme explication, mais le principal candidat est les magnétars, des étoiles compactes dotées de champs magnétiques incroyablement puissants. La détection récente d’un magnétar dans notre propre galaxie, qui émettait des signaux suspects de type FRB, semblait être la preuve irréfutable de cette hypothèse.
Représentation artistique du magnétar SGR 1935+2154 dans notre galaxie, qui a été détecté comme émettant des ondes radio qui pourraient ressembler à des sursauts radio rapides. (ESA)
Une nouvelle étude vient toutefois compliquer le tableau. Des astronomes ont utilisé le télescope FAST (Five-hundred-meter Aperture Spherical Telescope) en Chine pour examiner de près l’une des plus célèbres sources de FRB. Le FRB 121102 fut le premier signal répétitif découvert, il a donc été l’un des plus étudiés au fil des années. Mais ces nouvelles observations révèlent qu’il est beaucoup plus actif qu’on ne le pensait.
L’équipe a observé la source pendant près de 60 heures sur 47 jours en 2019, détectant un nombre étonnant de 1 652 sursauts. Il s’agit d’une considérable augmentation : auparavant, seuls 347 sursauts au total avaient été recensés à partir de cette source depuis sa découverte en 2012. L’expansion, de manière aussi radicale, de l’ensemble des données pourrait aider à percer le mystère des FRB.
Le cercle vert indique la source du FRB 121102. (Rogelio Bernal Andreo)
Selon les chercheurs :
C’est la première fois qu’une source de FRB a été étudiée de manière aussi détaillée. Le grand ensemble de sursauts a aidé notre équipe à affiner comme jamais auparavant l’énergie caractéristique et la distribution de l’énergie des FRB, ce qui apporte un nouvel éclairage sur le mécanisme qui alimente ces mystérieux phénomènes.
Lorsqu’il était le plus actif, le FRB 121102 a été détecté produisant 122 sursauts en l’espace d’une heure, soit le taux de répétition le plus élevé de toutes les sources de FRB. Selon l’équipe, ce regain d’activité pourrait aider à départager les deux principaux modèles expliquant comment les magnétars pourraient produire des FRB répétés. Le premier suppose que les signaux proviennent de l’intérieur du champ magnétique de l’étoile, tandis que le second affirme qu’ils sont produits par des « chocs » récurrents de la matière autour de l’étoile.
Toujours selon les chercheurs :
Ces résultats remettent en question le second modèle. Les sursauts sont trop fréquents et, étant donné que cet épisode représente à lui seul 3,8 % de l’énergie disponible d’un magnétar, il s’ajoute à une trop grande quantité d’énergie pour que le second modèle fonctionne.
Avec autant de données en main, l’équipe a également vérifié la présence d’un quelconque modèle répétitif des sursauts, sur des échelles allant d’une milliseconde à 1 000 secondes. Aucun n’a été trouvé, ce qui semble suggérer qu’aucun objet compact unique, tel qu’un magnétar, n’est responsable.
D’une certaine manière, cela ne fait qu’approfondir le mystère. Mais cela n’exclut pas complètement les magnétars comme source de FRB. Il pourrait y en avoir deux qui gravitent très près l’un de l’autre, et les signaux pourraient provenir de leurs interactions. Même si le FRB 121102 n’est pas un magnétar, cela ne signifie pas que les objets ne sont pas à l’origine d’autres FRB. Après tout, les différents signaux présentent un tel éventail de caractéristiques que de multiples explications pourraient être en jeu.
L’étude publiée dans Nature : A bimodal burst energy distribution of a repeating fast radio burst source et présentée sur le site de Université du Nevada à Las Vegas : International Team of Astronomers Reports on Largest-ever Observed Set of Mysterious Fast Radio Bursts.