D’étranges îles découvertes par la NASA sur un lac de lave de la lune de Jupiter, Io
La NASA a découvert une merveille géologique sur Io, la lune ardente de Jupiter, le monde le plus volcanique du système solaire. Les survols effectués par la sonde Juno ont révélé des montagnes inhabituellement escarpées et jusqu’alors inconnues, ainsi que de surprenantes îles dans un lac de lave.
Image d’entête: la lune Io vue par Juno le 30 décembre 2023. (NASA/SWRI/ Kevin McGIll)
En utilisant les données de Juno, les chercheurs ont créé des animations qui mettent en valeur ces lacs volcaniques et ces imposantes montagnes, un paysage à la fois violent et étrangement beau.
Sur cette image, prise le 5 juillet 2022, à 80 000 kilomètres de distance, on peut voir les formes des coulées de lave et des lacs de lave sous forme de taches rouge vif. (NASA/JPL-Caltech/SwRI/ASI/INAF/JIRAM)
Selon Scott Bolton, chercheur principal de la mission Juno :
Io est tout simplement parsemée de volcans, et nous en avons surpris quelques-uns en pleine action. Nous avons également obtenu de superbes gros plans et d’autres données sur un lac de lave de 200 kilomètres de long appelé Loki Patera. Il y a des détails étonnants montrant ces îles bizarres noyées au milieu d’un lac magmatique potentiellement bordé de lave brûlante. La réflexion spéculaire du lac enregistrée par nos instruments suggère que certaines parties de la surface de Io sont aussi lisses que du verre, rappelant l’obsidienne créée par les volcans sur Terre.
Cette animation est une représentation artistique de Loki Patera, un lac de lave sur la lune de Jupiter Io, réalisée à partir des données de l’imageur JunoCam à bord de la sonde spatiale Juno de la NASA. Avec plusieurs îles à l’intérieur, Loki est une dépression remplie de magma et bordée de lave en fusion. (NASA/JPL-Caltech/SwRI/MSSS)
Juno recueille des données sur Jupiter, ses anneaux et ses lunes (collectivement connus sous le nom de système jovien) depuis la mi-2016, date à laquelle elle est arrivée dans ce lointain voisinage cosmique après un voyage de de 5 ans. Depuis qu’elle a transmis ses premières données, Juno a apporté à la science une succession de découvertes sur le fonctionnement interne de la plus grande planète du système solaire et de ses satellites. Par exemple, Juno a permis de découvrir des images sans précédent de l’atmosphère de Jupiter, notamment d’énormes cyclones aux deux pôles, ainsi que de la structure interne profonde de la planète. La sonde a également fourni des images étonnamment détaillées des nuages de Jupiter, mettant en évidence leurs motifs complexes et leurs couleurs vives.
À chaque survol, Juno se rapproche de plus en plus du pôle nord de la géante gazeuse. À chaque passage, le radiomètre à micro-ondes (MWR) de la sonde peut étudier les cycles polaires nord avec une meilleure résolution.
L’apparence en bandes de Jupiter est créée par la « couche météorologique » formée par les nuages. Dans cette image composite, l’image de gauche montre l’énergie thermique de Jupiter émise en lumière infrarouge, avec des bandes nuageuses sombres apparaissant comme des silhouettes contre la lueur thermique de Jupiter. L’image de droite montre l’apparence de Jupiter en lumière visible, avec les « zones » nuageuses blanches et les « ceintures » relativement sans nuages apparaissant en couleurs rouge-brun. (International Gemini Observatory/NOIRLab/NSF/AURA/NASA/ESA)
Selon Steve Levin, responsable scientifique du projet Juno au Jet Propulsion Laboratory de la NASA, en Californie du Sud :
L’exemple le plus frappant de cette disparité est peut-être le cyclone central du pôle nord de Jupiter. Il est clairement visible dans les images infrarouges et en lumière visible, mais sa signature micro-onde est loin d’être aussi forte que celle d’autres tempêtes proches. Cela nous indique que sa structure souterraine doit être très différente de celle des autres cyclones. L’équipe MWR continue de collecter des données micro-ondes plus nombreuses et de meilleure qualité à chaque orbite. Nous prévoyons donc de développer une carte 3D plus détaillée de ces intrigantes tempêtes polaires.
Un autre aspect important de la mission de Juno est l’étude de l’abondance de l’eau sur Jupiter. Définit la distribution de l’eau, ou plus précisément la distribution de l’hydrogène et de l’oxygène, est cruciale pour reconstituer les origines de notre système solaire. Jupiter a probablement été la première planète à se former dans le système solaire à partir de tous les gaz et poussières qui n’ont pas été incorporés par le Soleil. Des mesures récentes indiquent que la teneur en eau près de l’équateur de Jupiter est plusieurs fois supérieure aux estimations initiales, ce qui remet en question les précédents modèles basés sur les données de la sonde Galileo de 1995.
Ces résultats renforcent l’idée que des matériaux constitués de glace d’eau ont pu contribuer à l’enrichissement de Jupiter en éléments lourds (éléments chimiques plus lourds que l’hydrogène et l’hélium) au cours de sa formation ou de son évolution. Cependant, les observations de Juno sont à la fois éclairantes et déroutantes. Ses données indiquent également une teneur en eau étonnamment faible dans le noyau de Jupiter, ce qui explique que la formation de la géante gazeuse échappe encore aux scientifiques.
Les scientifiques de Juno ont également pu recréer (vidéo ci-dessous) une caractéristique spectaculaire sur Io, une montagne en forme de flèche qui a été surnommée « The Steeple » (le clocher). Cette montagne mesure entre 5 et 7 kilomètres de haut. Il est difficile de comprendre le type d’activité volcanique qui a pu créer une forme de relief aussi étonnante.
(NASA/JPL-Caltech/SwRI/MSSS)
Au fur et à mesure que la mission de Juno se poursuit, de nouvelles données pourraient clarifier les différences d’abondance d’eau entre les régions polaires et équatoriales de Jupiter et fournir des informations plus approfondies sur le noyau énigmatique et diffus de la planète. Le prochain survol important de Juno est prévu pour le 12 mai, et la communauté scientifique l’attend avec impatience. Chaque passage permet non seulement de mieux comprendre la dynamique et la composition de l’atmosphère de Jupiter, mais aussi de répondre à des questions fondamentales sur la formation de notre système solaire.
L’équipe Juno a présenté ses dernières découvertes lors de l’European Geosciences Union General Assembly à Vienne et l’étude publiée dans la revue Icarus : Super-adiabatic temperature gradient at Jupiter’s equatorial zone and implications for the water abundance et présentée sur le site de la NASA : NASA’s Juno Gives Aerial Views of Mountain, Lava Lake on Io.