“Saumon-mouth” : ce saumon préhistorique géant avait des dents semblables à des défenses
Comme tout droit sorti du film RRRrrrr!!!, ,avec son bestiaire à défenses de poulemouth, chevalmouth, chienmouth… voici un saumon préhistorique arborant des défenses.
Image d’entête, à partir de l’étude : représentation artistique d’un saumon préhistorique femelle, l’Oncorhynchus rastrosus. (K. Claeson et col./ PLOS ONE)
Les plus anciens fossiles d’Oncorhynchus rastrosus datent d’environ 12 millions d’années, le long de la côte californienne. Ce saumon vivait le long des côtes pacifiques de l’Amérique du Nord et du Japon, atteignant une taille de 2,4 mètres et pesant 200 kg. De précédentes études des fossiles ont montré que le saumon du Pacifique avait d’étranges dents ressemblant à des défenses. Aujourd’hui, une nouvelle analyse (lien plus bas) suggère qu’elles étaient orientées vers le côté et qu’elles servaient probablement à se battre.
Un fossile d’Oncorhynchus rastrosus. (Philadelphia College of Osteopathic Medicine)
Les saumons sont de puissants nageurs qui migrent sur des milliers de kilomètres et qui atteignent des tailles impressionnantes. Mais aucun n’était aussi grand que l’O. rastrosus. C’était le plus grand saumon que la Terre est hébergé (du moins à notre connaissance). Dès les premiers fossiles, il était évident qu’il possédait des dents surdimensionnées. Au départ, les chercheurs pensaient qu’elles pointaient vers l’arrière, comme des crocs.
Taille du saumon à dents de scie comparée à celle du plus grand saumon vivant et à celle d’un pêcheur d’1,80 m. (Ray Troll)
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont effectué des tomodensitométries pour obtenir une nouvelle vue de ces fossiles. La tomodensitométrie est une technique d’imagerie non invasive qui permet aux chercheurs de visualiser des structures invisibles à l’œil nu, sans endommager le fossile. Elle permet d’exposer les moindres détails de l’anatomie d’un organisme, y compris les minuscules os, les tissus mous et même les restes des derniers repas, ce qui donne un aperçu de la biologie, du comportement et de l’évolution des espèces disparues. Dans le cas présent, la tomodensitométrie a montré que les dents pointaient en fait sur le côté, comme celles d’un phacochère. Il ne s’agit donc pas d’un « saumon à dents de sabre », mais d’un « saumon à dents en pointe », affirment les chercheurs.
A partir de l’étude : l’Oncorhynchus rastrosus. (A) Modèle de tomographie du crâne en vue latérale droite avec un dessin stylisé de la position « en dents de sabre » proposée à l’origine pour le prémaxillaire isolé ; (B) vue antérieure du crâne, avant la préparation complète et la tomographie ; (C) Rendu artistique du crâne du poisson emblématique mâle avec la configuration précise des dents en pointe ; (D) Rendu artistique du poisson emblématique femelle complet avec la configuration précise des dents en pointe. (Claeson et col./ PLOS ONE)
On ne sait pas exactement à quoi servaient ces dents, mais elles n’étaient probablement pas utilisées à des fins pacifiques ou pour être exhibées. Les chercheurs pensent qu’elles auraient servi à se battre, soit entre eux, soit contre d’autres espèces.
Selon Kerin Claeson, auteur principal et professeur d’anatomie au Philadelphia College of Osteopathic Medicine :
Nous savons depuis des décennies que ces saumons disparus du centre de l’Oregon étaient les plus grands de tous les temps. Des découvertes comme la nôtre montrent qu’ils n’étaient probablement pas de gentils géants. Ces pointes massives à l’extrémité de leur museau leur auraient été utiles pour se défendre contre les prédateurs, entrer en compétition avec d’autres saumons et, enfin, construire les nids où ils couvaient leurs œufs.
L’équipe soupçonne que les dents n’étaient pas utilisées pour la parade, car les mâles et les femelles semblaient en posséder, ce qui signifie qu’elles devaient avoir une utilité pratique.
Selon Brian Sidlauskas, professeur au département des sciences de la pêche, de la faune et de la conservation de l’université d’État de l’Oregon (États-Unis) :
Nous soulignons également que les femelles comme les mâles possédaient ces énormes dents en forme de défenses. Les deux sexes étaient donc aussi redoutables l’un que l’autre.
Les dents pourraient éventuellement servir d’outil, pour creuser des nids. Mais il est clair qu’elles ne servaient pas à chasser. Ce saumon géant était un filtreur qui se nourrissait de plancton, précisent les chercheurs.
Ces dernières recherches soulignent l’importance de réévaluer continuellement nos hypothèses dans les récits scientifiques. La révélation que ce saumon gargantuesque maniait ses dents en forme de pointes latéralement ouvre de nouvelles voies pour comprendre la dynamique écologique des anciens environnements marins.
L’étude publiée dans PLoS ONE : From sabers to spikes: A newfangled reconstruction of the ancient, giant, sexually dimorphic Pacific salmon, †Oncorhynchus rastrosus (SALMONINAE: SALMONINI) et présentée sur le site du Philadelphia College of Osteopathic Medicine : ‘Saber’ No More: A Giant Prehistoric Salmon Had Spike Teeth.