Des expériences suggèrent que le poisson-archer pourrait différencier les nombres
Il est interdit de cracher dans les lieux publics, surtout aujourd’hui où la pandémie nous oblige à suivre une série de mesures préventives qui pourraient atténuer la courbe de transmission. Bien qu’il existe une règle stricte chez les humains concernant la production de fluides corporels à base de salive, le poisson-archer fait fi de ce règlement.
Image d’entête : poisson-archer (Toxotes jaculatrix). (Wikimédia)
Des chercheurs en psychologie et en sciences cognitives de l’université de Trente, en Italie, ont étudié un animal marin particulier doté d’une capacité unique par rapport au reste des espèces de poissons. Le Toxotes jaculatrix, plus connu sous le nom de poisson-archer, que l’on trouve généralement dans les eaux présentant un fort taux de salinité, est capable de propulser des jets d’eau pour cibler à vue une proie potentielle tout en corrigeant la réfraction de la lumière entre l’eau et l’air. Il arrive même à reconnaitre les visages humains.
Il peut devenir plus grand que la taille moyenne des nageurs à branchies, atteignant au maximum 20 cm de long. La capacité du poisson-archer à cracher est également étonnante. Lorsqu’il émet des jets d’eau à partir de sa bouche, le Toxotes jaculatrix peut cibler des proies situées à une distance de 1 m 50.
Un poisson-archer tentant de déloger un insecte avec son crachat d’eau. (Nat Geo)
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont apparemment enseigné au poisson un autre talent unique qui pourrait s’ajouter à sa panoplie. Ce poisson est endémique dans de nombreuses régions de l’Asie indo-pacifique et, heureusement, il est loin d’être éteint, contrairement à d’autres groupes de poissons.
Selon l’étude, le poisson-archer a appris à cracher sur des écrans d’ordinateur, montrant ainsi sa nouvelle capacité à identifier les chiffres.
Bien que le Toxotes jaculatrix ait montré des résultats prometteurs lors d’essais contrôlés, des animaux et même des insectes ont déjà présenté leur capacité à compter ou à appréhender l’existence des nombres.
Cependant, les expériences passées qui ont conduit à un manque de confirmation concernant la cognition des animaux sur les nombres font l’objet d’un débat. Dans un cas, les poissons examinés précédemment ont été suspectés de se fier à la présence de leur grand banc et non de compter. Une autre étude a également montré que les poissons pouvaient se fier à la taille de leur sélection plutôt qu’au nombre d’éléments contenus à l’intérieur.
Pour déterminer si les poissons pouvaient compter, la nouvelle étude a reproduit le processus de la précédente recherche. Cette fois, les propositions ont été fournies sous différentes tailles et ont été mélangées. Ces recherches ont été couronnées de succès, et les chercheurs ont conclu que les poissons-archer ont réellement fait preuve d’une aptitude à compter.
Pour Davide Potrich, expert au Centre des sciences de l’esprit et du cerveau de l’Université de Trente et auteur de l’étude, il existe des doutes quant à la familiarité des poissons avec les expressions numériques, car ces notions relèvent de domaines différents par rapport aux propriétés continues observées chez l’espèce.
Potrich a ajouté que de nombreuses études ont tenté de résoudre ce problème. Toutefois, l’approche adoptée par ces recherches et les informations correspondantes ne contenaient pas les données complètes requises. Pour obtenir de meilleurs résultats lors des nouvelles expériences, les chercheurs ont contrôlé le plus strictement possible les variables qui n’étaient pas liées aux nombres. Les écrans placés devant les bassins des poissons-archers ont servi de support aux données.
Sur les écrans, des choix de points apparaissaient, que le poisson-archer sélectionnait en crachant. Après une série d’essais, les poissons se sont familiarisés aux quantités auxquels ils étaient exposés. Pour garantir une sélection non biaisée, chacun des points affichés à l’écran a été analysé par un programme pour être distinct des autres.
Ci-dessous, à partir de l’étude, détails sur le dispositif expérimental : l’appareil et la méthode d’entraînement ont été mis en place sur la base d’études précédentes menées avec des poissons-archers sur des tâches de discrimination visuelle. Chaque réservoir expérimental consistait en un aquarium rectangulaire surmonté d’un écran, maintenu à 30 cm du niveau de l’eau. Chaque réservoir était entouré de panneaux blancs opaques afin que le poisson ne soit pas distrait par des signaux extérieurs. Chaque réservoir était surélevé de 8 cm par rapport à la table grâce à des supports latéraux, ce qui permettait de positionner une caméra vidéo sous le centre du réservoir pour enregistrer une vue de dessous du poisson et de l’écran. (Davide Potrich et col./ bioRxiv)
En conclusion, le poisson-archer est capable de comprendre les nombres relatifs mais il a eu tendance à sélectionner les points plus grands ou plus petits à plusieurs reprises au cours des expériences.
L’étude en prépublication dans bioRxiv : Archerfish number discrimination.