En Irak, une sévère sécheresse révèle une cité antique engloutie
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Lorsqu’une grave sécheresse en Irak a entraîné une baisse du niveau d’eau du barrage de Mossoul, les personnes qui en dépendaient ont eu beaucoup d’ennuis. Mais elle a également offert une opportunité aux archéologues : la baisse du niveau des eaux a révélé les ruines d’une ancienne cité de la culture Mittani, un puissant royaume qui occupait certaines parties de l’Irak actuel il y a environ 3 600 ans.
Image d’entête : le site archéologique de Kemune dans la zone asséchée du réservoir de Mossoul. (Université de Tübingen)
Une équipe d’archéologues allemands et kurdes s’est trouvée dans une situation inhabituelle. Normalement, il n’y a guère d’empressement à fouiller des structures archéologiques, après tout, elles sont là depuis des siècles et des siècles. Mais cette fois, c’était différent.
L’Irak est l’un des pays les plus vulnérables au changement climatique. Le pays est exposé non seulement aux sécheresses, mais aussi aux inondations, aux tempêtes de poussière et à d’autres événements violents. L’agriculture est touchée par la hausse des températures et la modification des précipitations, ce qui a des répercussions sur la disponibilité des aliments et les revenus des ménages. Les petits exploitants agricoles sont généralement les plus touchés, et les femmes et les filles sont également touchées de manière disproportionnée, en raison des normes et des inégalités de genre préexistantes.
L’Irak souffrant de sécheresse, de grandes quantités d’eau du réservoir de Mossoul (le plus grand stockage d’eau du pays) ont été prélevées pour aider à l’irrigation, ce qui a fait baisser le niveau d’eau du barrage, exposant une ville de l’âge du bronze qui a été submergée lors de la construction du réservoir, avant que des recherches archéologiques puissent être menées sur le site.
Vue aérienne du barrage de Mossoul, en Irak. (Rehman Abubakr/ Wikimedia)
La ville recouverte d’eau se trouve sur le site de Kemune, dans le Kurdistan irakien. Elle a été construite par le royaume de Mittani. Aucune source native de l’histoire des Mitanni n’a été trouvée jusqu’à présent, et la plupart de ce que nous savons d’eux provient de ce que d’autres cultures (comme les Assyriens, les HIttites ou les Égyptiens) ont écrit. C’est une autre raison pour laquelle il est si important de profiter de cette rare opportunité pour étudier la ville.
Le vaste établissement date d’environ 1550-1350 avant J.-C., une époque où les Mittani contrôlaient de grandes parties de la Syrie et de la Mésopotamie. Le site comprend un palais et plusieurs grands bâtiments, ce qui amène les chercheurs à penser qu’il pourrait s’agir de l’ancienne Zakhiku (ou Kemune-Zahiku), un centre important pour les Mittani.
Le palais avait déjà été découvert lors d’une brève campagne en 2018, mais plusieurs autres grands bâtiments étaient jusqu’alors inconnus des archéologues ceux-ci comprennent un bâtiment monumental à plusieurs étages, un complexe industriel, ainsi que de gigantesques fortifications avec des murs et des tours. Un impressionnant site de stockage a également été découvert.
Des archéologues et des ouvriers fouillent les murs d’un grand bâtiment de la ville antique, qui est considéré comme un bâtiment de stockage datant de l’époque de l’empire Mittani. (Université de Tübingen)
Selon Ivana Puljiz, de l’université de Fribourg (Suisse) :
L’énorme bâtiment abritant des magasins est particulièrement important car d’énormes quantités de marchandises ont dû y être stockées, probablement apportées de toute la région.
Le président de l’Organisation d’archéologie du Kurdistan, Hasan Qasim, ajoute :
Les résultats des fouilles montrent que le site était un centre important de l’empire Mittani.
Ironiquement, si la ville a été si bien conservée, même sous l’eau, c’est parce qu’elle a été détruite. Les chercheurs s’attendaient à ce que de nombreux murs (parfois, de plusieurs mètres de haut) soient très endommagés, car ils étaient constitués de briques de boue séchées au soleil et restées sous l’eau pendant quelque 40 années. Mais lorsque la ville a été détruite en 1350 avant J.-C., certains des murs supérieurs ont dû s’effondrer sur les autres structures, les protégeant ainsi de la majeure partie des dégâts causés par l’eau.
Les chercheurs ont également découvert cinq récipients en céramique contenant plus d’une centaine de tablettes cunéiformes, qui ont été datées de la période suivant de peu le tremblement de terre qui a frappé la ville. Certaines des tablettes d’argile sont des lettres et sont encore en excellent état. Les chercheurs espèrent qu’elles pourraient apporter un éclairage supplémentaire sur la fin de la période Mittani, qui a également marqué le début de la domination assyrienne dans la région.
Des récipients en poterie, dans lesquels étaient stockées des tablettes cunéiformes, se trouvent dans le coin d’une pièce datant de la période de l’Assyrie moyenne (vers 1350-1100 av. J.-C.). (Université de Tübingen)
Selon Peter Pfälzner, également de l’université de Tübingen :
C’est presque un miracle que des tablettes cunéiformes faites d’argile non cuite aient survécu à tant de décennies sous l’eau.
Après avoir examiné minutieusement le site, les chercheurs ont recouvert les bâtiments de bâches en plastique, qui ont ensuite été recouvertes de gravier, afin de les protéger le mieux possible à la prochaine montée des eaux. Ce vaste projet de conservation a pour but de protéger les murs et les autres objets qui se trouvent encore cachés dans les ruines.
Une fois que l’équipe de recherche a terminé son travail, les fouilles sont largement recouvertes d’une bâche en plastique pour les protéger de la montée des eaux du réservoir de Mossoul. (Université de Tübingen)
Aujourd’hui, alors que la sécheresse a pris fin, la ville est à nouveau complètement submergée.
Les travaux de recherche présentés sur le site de l’Université de Tübingen : A 3400-year-old city emerges from the Tigris River.
Comme la prévalence de la sécheresse augmente dans de nombreuses régions du monde, d’autres trésors aquatiques (ou de sombres secrets) pourraient remonter à la surface. Ainsi, dans l’Ouest américain, on retrouve des corps dans des zones qui étaient autrefois recouvertes de dizaines de mètres d’eau. Début mai, un corps dans un tonneau a été retrouvé près du lac Mead, dans le Nevada. Environ une semaine plus tard, d’autres restes humains ont été découverts sur le lac, près d’un centre de loisirs. Et la sécheresse qui a sévi dans le Midwest en 2021 a permis de découvrir un morceau de crâne vieux de 8 000 ans le long de la rivière Minnesota.