Des ondes sismiques indiquent qu’un changement se produit dans le noyau externe de la Terre
La plupart de nos connaissances sur ce qui se trouve au centre de notre planète proviennent de l’étude des ondes sismiques émises par les tremblements de terre. Une analyse minutieuse de ces vibrations peut révéler la composition des roches et des métaux sous la surface de la Terre.
Une nouvelle étude des ondes sismiques se propageant à partir de deux tremblements de terre différents, situés dans des endroits similaires mais séparés par un intervalle de 20 ans, a révélé les changements qui se produisent dans le noyau externe de la Terre, la couche tourbillonnante de fer et de nickel liquides entre le manteau (la roche sous la surface) et le noyau interne (la couche la plus profonde).
Le noyau externe et le fer qu’il contient influencent directement le champ magnétique de notre planète, qui assure à son tour une protection contre les rayonnements spatiaux et solaires qui, autrement, rendraient la vie sur Terre impossible.
C’est pourquoi il est essentiel de comprendre comment fonctionne le noyau externe et son évolution dans le temps. Les données enregistrées par quatre moniteurs d’ondes sismiques sur les deux tremblements de terre ont montré que les ondes du dernier événement se déplaçaient environ une seconde plus vite lorsqu’elles traversaient la même région du noyau externe.
Selon le géoscientifique Ying Zhou de Virginia Tech (Institut polytechnique et université d’État de Virginie) :
Quelque chose a changé sur le trajet de cette onde, de sorte qu’elle peut aller plus vite maintenant.Le matériau qui était là il y a 20 ans n’est plus là.C’est un nouveau matériau, et il est plus léger. Ces éléments légers vont se déplacer vers le haut et modifier la densité dans la région où ils se trouvent.
Les types d’ondes analysés ici sont des ondes SKS : elles traversent le manteau sous forme d’ondes de cisaillement (le S), puis pénètrent dans le noyau externe sous forme d’ondes de compression (le K), puis ressortent de l’autre côté et traversent à nouveau le manteau sous forme d’ondes de cisaillement (le deuxième S). La chronologie de ce voyage peut être révélatrice.
Quant aux deux tremblements de terre, ils se sont produits près des îles Kermadec, dans l’océan Pacifique Sud, le premier en mai 1997 et le second en septembre 2018, donnant aux chercheurs une occasion unique de voir comment le noyau de la Terre a pu changer au fil du temps.
La convection qui se produit dans le fer liquide du noyau externe de la Terre lorsqu’il se cristallise sur le noyau interne crée des courants électriques qui circulent, et c’est ce qui contrôle le champ magnétique qui nous entoure. Cependant, la relation entre le noyau externe et le champ magnétique de la Terre n’est pas entièrement comprise, elle repose en grande partie sur une modélisation hypothétique.
La ligne bleue illustre une onde sismique pénétrant dans le noyau et traversant une région du noyau externe, où la vitesse sismique a augmenté parce qu’un flux de faible densité s’est déplacé dans la région. Image reproduite avec l’aimable autorisation de Ying Zhou.(Ying Zhou)
Si vous regardez le pôle géomagnétique nord, il se déplace actuellement à une vitesse d’environ 50 kilomètres par an. Il s’éloigne du Canada et se rapproche de la Sibérie. Le champ magnétique n’est pas le même tous les jours. Il est en train de changer.
Puisqu’il change, nous supposons également que la convection dans le noyau externe change avec le temps, mais il n’y a pas de preuve directe. Nous ne l’avons jamais vu.
Cette nouvelle étude, et potentiellement de futures analyses similaires, pourrait fournir des indications utiles sur la façon exacte dont le noyau externe et sa convection changent. Bien que les changements observés ici ne soient pas énormes, plus nous en savons, mieux c’est.
Dans ce cas, Zhou suggère que des éléments plus légers comme l’hydrogène, le carbone et l’oxygène ont été libérés dans le noyau externe depuis 1997. Cela correspond à une réduction de la densité d’environ 2 à 3 % et à une vitesse du flux de convection d’environ 40 kilomètres par heure, selon l’étude.
Il existe actuellement 152 stations du Réseau sismographique mondial, qui surveillent les ondes sismiques en temps réel. Bien que nous ne puissions pas contrôler l’emplacement ou le moment des tremblements de terre, nous pouvons faire en sorte qu’un maximum de données soient enregistrées les concernant.
Nous sommes en mesure de les voir maintenant. Si nous sommes capables de le voir à partir des ondes sismiques, à l’avenir, nous pourrions installer des stations sismiques et surveiller ce flux.
L’étude publiée dans Nature Communications Earth & Environment : Transient variation in seismic wave speed points to fast fluid movement in the Earth’s outer core et présentée sur le site de Virginia Tech : Seismic waves from earthquakes reveal changes in the Earth’s outer core.