Les cinq premières heures de la naissance révèlent la capacité des bébés à différencier les sons du langage
Dans une étude récente, des chercheurs ont révélé les détails de l’impressionnant et rapide processus d’apprentissage des sons du langage chez les bébés, dès les premières heures de la naissance.
On pense souvent que les nourrissons sont comme des toiles vierges qui n’ont que peu de capacité d’apprentissage pendant les premières semaines de leur vie. Pourtant, les nouveau-nés commencent à traiter le langage et la parole assez tôt selon cette nouvelle étude.
Même lorsqu’ils sont dans le ventre de leur mère, les bébés apprennent à discerner les voix et certains sons de la parole. À la naissance, ils préfèrent la parole aux autres types de sons sans rapport avec le langage.
L’équipe du professeur de neurosciences cognitives Guillaume Thierry de l’université de Bangor (Royaume-Uni) a collaboré avec un groupe de chercheurs chinois qui ont équipé la tête des bébés d’un bonnet standard recouvert de dispositifs sophistiqués d’émission de lumière mis au point pour mesurer les légères variations du niveau d’oxygène dans le cerveau des bébés.
En fait, les détecteurs de la casquette aident les scientifiques à déterminer quelles parties du cerveau sont actives au fil du temps.
La procédure, qui est totalement sûre et indolore, a été réalisée dans les 3 heures suivant la naissance des bébés. Il a suffi que ces derniers portent une minuscule casquette élastique pour que de minuscules lumières infrarouges, essentiellement des radiations thermiques, soient projetées à travers leur tête.
Cela correspond à la pratique courante dans plusieurs cultures : envelopper les nouveau-nés dans une couverture bien ajustée pour les apaiser et faciliter la transition entre le confort de l’utérus et le monde sauvage de l’existence physique autonome.
Comme l’indique l’étude, dans les trois heures suivant la naissance, tous les bébés ont été exposés à des paires de sons que la plupart des scientifiques prévoient qu’ils devraient être capables de déterminer. Ces sons comprenaient des voyelles comme « o », et ces mêmes voyelles étaient jouées à l’envers.
En général, la parole inversée est très différente de la parole normale, bien que, dans le cas de voyelles isolées, cette différence soit subtile.
En fait, dans cette étude, les chercheurs ont découvert que les auditeurs adultes ne pouvaient différencier les deux cas que dans 70 % des cas.
Ce qui a surpris les chercheurs de l’étude, c’est que les nouveau-nés ne pouvaient pas différencier les voyelles avant et arrière tout de suite après la naissance puisqu’ils n’ont pas trouvé de différence entre les signaux cérébraux recueillis dans tous les cas pendant les trois premières heures de la naissance.
Selon Guillaume Thierry :
Avec le recul, nous n’aurions pas dû être surpris, compte tenu de la subtilité d’une telle différence.
Néanmoins, le professeur a déclaré qu’ils avaient été stupéfaits de découvrir que les nouveau-nés commençaient à différencier les voyelles « vers l’avant et vers l’arrière » après avoir écouté ces sons pendant 5 heures.
Les chercheurs ont déclaré qu’ils pouvaient également considérer ces résultats dans le contexte du concept à la mode des neurosciences actuelles, plus précisément la « théorie de l’embodiment« .
Essentiellement, l’embodiment ou cognition incarnée est une notion selon laquelle les pensées et les activités mentales d’une personne ne sont pas préprogrammées, ni ne fonctionnent mystérieusement à partir d’un code génétique inhérent, mais se fondent au contraire sur une expérience directe du monde qui l’entoure, par le biais de canaux sensoriels qui commencent à fonctionner dès la naissance, comme l’odorat, le goût, le toucher, la vue et l’ouïe.
Même si le cerveau a une prédisposition à apprendre selon sa fonction et son organisation définies par le code génétique hérité des parents, il peut ressentir ainsi que l’environnement dès sa naissance, ce qui favorise les représentations internes du monde entier de manière instantanée.
L’étude publiée dans Nature Human Behavior : Rapid learning of a phonemic discrimination in the first hours of life et le chercheur Guillaume Thierry présente leurs travaux dans un article publié dans The Conversation : Babies can learn language sounds in the first few hours of being born – new research.