Les mégalodons avaient le sang chaud, et c’est peut-être ce qui a entraîné leur disparition
Les dents fossilisées constituent la plupart des vestiges que nous avons aujourd’hui du mégalodon, ce qui complique la tâche pour déterminer à quoi il ressemblait ou comment il vivait. Aujourd’hui, des scientifiques ont utilisé ces dents pour estimer la température corporelle de l’ancien requin et ils ont découvert qu’il n’était pas exactement un tueur à sang froid. Curieusement, c’est peut-être ce qui a contribué à sa disparition.
Le mégalodon était une espèce de requin géant qui régnait sur les océans il y a environ 20 millions d’années. Comme les requins modernes, son squelette était essentiellement constitué de cartilage, si bien que nous ne disposons pas de fossiles pour savoir à quoi il ressemblait vraiment. Tout ce que nous avons, c’est une pile de dents énormes et terrifiantes.
Mais il y a certaines choses que nous pouvons déduire de ces dents. En examinant leurs proportions et en les comparant à celles de requins vivants, les scientifiques ont estimé que le mégalodon mesurait environ 15 m de long, voire plus, soit au moins trois fois plus que les plus imposants des grands requins blancs.
Une dent de mégalodon. (Lonfat)
A présent, des scientifiques de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) ont découvert de nouvelles informations sur les dents du mégalodon, à savoir leur température corporelle. Des mélanges spécifiques d’isotopes sont emprisonnés dans les minéraux lorsqu’ils se forment, ce qui permet de conserver une trace des conditions environnementales auxquelles le minéral a été exposé à l’époque. L’analyse de la composition isotopique des dents d’un animal peut révéler des détails tels que l’endroit où il vivait, ce qu’il mangeait ou, dans le cas présent, sa température corporelle.
Reconstruction paléoartistique d’un mégalodon de 16 m à l’échelle d’un humain de 1,65 m (Oliver E. Demuth/ Jack A. Cooper et col.)
Selon Randy Flores, l’un des auteurs de l’étude (lien plus bas) :
On peut considérer les isotopes conservés dans les minéraux qui composent les dents comme une sorte de thermomètre dont la lecture peut être conservée pendant des millions d’années. Comme les dents se forment dans les tissus d’un animal vivant, nous pouvons mesurer la composition isotopique des dents fossiles afin d’estimer la température à laquelle elles se sont formées, ce qui nous indique la température corporelle approximative de l’animal au cours de sa vie.
Ce faisant, les chercheurs ont découvert que le mégalodon était capable de maintenir une température corporelle supérieure d’environ 7 °C à celle de l’eau dans laquelle il vivait. Cette différence est suffisamment importante pour le classer parmi les créatures à sang chaud, contrairement à la plupart des requins. Il y serait parvenu grâce à un processus appelé mésothermie, qui consiste à stocker la chaleur générée par ses muscles pour alimenter ses activités. Certains requins vivants, comme les grands blancs, sont connus pour réguler leur température corporelle de cette manière.
Les chercheurs ont calculé la température de l’eau de l’époque en analysant la composition isotopique de coquilles Saint-Jacques de la même période. Les dents du mégalodon ont donné des indications de température systématiquement beaucoup plus élevées.
Un corps plus chaud aurait permis au mégalodon de se déplacer plus rapidement et de vivre dans des eaux plus froides, ce qui l’aurait aidé à prospérer dans le monde entier à l’époque. Mais il est intéressant de noter que cela a pu également conduire à son extinction il y a environ 3,6 millions d’années, lorsque les conditions écologiques ont radicalement changé.
Selon Flores :
Le maintien d’un niveau d’énergie permettant au mégalodon d’avoir une température corporelle élevée nécessiterait un appétit vorace qui n’aurait peut-être pas été viable à une époque où l’équilibre des écosystèmes marins changeait et où il aurait même dû rivaliser avec de nouveaux venus tels que le grand requin blanc.
C’est une histoire d’extinction un peu plus crédible que certaines hypothèses plus dramatiques qui ont été lancées auparavant, notamment celle selon laquelle une supernova relativement proche aurait contribué à leur disparition.
L’étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences : Endothermic physiology of extinct megatooth sharks et présentée sur le site de l’Université de Californie à Los Angeles : Megalodon was no cold-blooded killer.