L’océan Atlantique s’agrandit, puis il se rétrécira
Il y a environ 180 millions d’années, le supercontinent Pangée s’est disloqué et l’océan Atlantique s’est formé dans la faille entre les continents. Depuis lors, l’Atlantique n’a cessé de s’étendre et continue sur sa lancée, tandis que le Pacifique se rétrécit, la « ceinture de feu » volcanique du Pacifique étant la marque d’une terre qui se rapproche de l’océan.
Image d’entête : la surface des dorsales (en rouge) atteint 33 % de la surface du plancher océanique. (National Oceanic and Atmospheric Administration)
Mais l’expansion de l’Atlantique n’est peut-être pas inévitable. Une nouvelle étude basée sur une modélisation suggère que dans environ 20 millions d’années (bientôt, en termes géologiques) l’Atlantique aura son propre anneau de feu en train d’empiéter. L’étude (lien plus bas) révèle que l’Atlantique est envahi par une zone de subduction située à Gibraltar, au bord de la mer Méditerranée.
Contrairement à ce que l’on croyait, les auteurs affirment que la zone de Gibraltar est toujours active et qu’elle reviendra à la vie.
À l’échelle de milliards d’années, les océans suivent un schéma appelé cycle de Wilson. Un continent se brise et un océan se forme à l’intérieur, l’océan grandit au fur et à mesure que les continents s’éloignent les uns des autres, puis ils atteignent un point d’inflexion, le début de la subduction, où les vieilles plaques lourdes au bord de l’océan commencent à glisser sous les plaques continentales plus légères. L’océan se rétrécit alors jusqu’à ce que les continents situés à sa périphérie entrent en collision.
Carte mettant en évidence les zones de subduction de l’Atlantique, les arcs des Petites Antilles et de Scotia (Ecosse) entièrement développés sur le côté ouest et l’arc de Gibraltar naissant sur le côté est. (João C. Duarte et col.)
Mais les zones de subduction ne se forment pas spontanément : des plaques tectoniques très résistantes doivent se briser et se plier pour que la subduction se produise. En général, le déclenchement de la subduction se produit lorsque celle d’un autre océan migre dans l’océan en croissance. Il s’agit d’une invasion par subduction, et les chercheurs affirment qu’elle se produit à Gibraltar, à l’extrémité sud de la péninsule ibérique.
Le détroit de Gibraltar, vu depuis l’ISS. (ESA/ NASA)
Selon João Duarte, chercheur à l’université de Lisbonne (Portugal) et premier auteur de l’étude :
Il existe deux autres zones de subduction de l’autre côté de l’Atlantique : les Petites Antilles, dans les Caraïbes, et l’Arc de Scotia (Ecosse), près de l’Antarctique. Cependant, ces zones de subduction ont envahi l’Atlantique il y a plusieurs millions d’années.
La mer Méditerranée est un “bassin fermant”, la plaque océanique étant subduite sous les plaques continentales qui abritent l’Afrique et l’Europe. Il existe une zone de subduction autour de Gibraltar, mais elle s’est ralentie au cours des derniers millions d’années et de nombreux chercheurs pensaient qu’elle n’était plus active. La nouvelle modélisation 3D utilisée dans cette étude suggère que ce n’est pas le cas.
Selon Duarte :
L’invasion par subduction est par nature un processus tridimensionnel qui nécessite des outils de modélisation avancés et des superordinateurs qui n’étaient pas disponibles il y a quelques années. Nous pouvons désormais simuler la formation de l’arc de Gibraltar dans les moindres détails, ainsi que son évolution dans un avenir lointain.
Duarte et ses collègues pensent que la zone de subduction de Gibraltar se trouve simplement dans une « période de quiescence », et que son activité reprendra dans environ 20 millions d’années. Elle envahira alors l’océan Atlantique et entamera le processus de rétrécissement.
Toujours selon Duarte :
L’étude de Gibraltar est une opportunité inestimable car elle permet d’observer le processus dans ses premiers stades, lorsqu’il est en train de se produire.
Outre l’intérêt géologique, les chercheurs affirment que leurs résultats ont des implications pour les tremblements de terre dans la région. Les zones de subduction sont souvent à l’origine des tremblements de terre les plus puissants, comme celui de Lisbonne en 1755. Ce tremblement de terre, le plus puissant jamais enregistré sur la côte atlantique de l’Europe, a également provoqué un énorme tsunami qui a fait des vagues jusqu’à la côte de la Baltique.
L’étude publiée dans la revue Geology : Gibraltar subduction zone is invading the Atlantic.