Découverte d’anciens tunnels de lave dans le désert d’Arabie habités il y a des milliers d’années
Une importante étude archéologique a permis, pour la première fois, de localiser un tunnel de lave en Arabie saoudite qui a été habité par des humains il y a jusqu’à 10 000 ans.
Image d’entête : au cœur du système de grottes d’Umm Jirsan. (Green Arabia Project)
Le site d’Umm Jirsan témoigne d’une activité humaine s’étalant sur plusieurs milliers d’années, de la période néolithique à l’âge du bronze. Soutenue par les autorités saoudiennes, cette fouille s’inscrit dans le prolongement de décennies de recherches entreprises dans la région pour reconstituer l’histoire de l’activité humaine au Moyen-Orient. Les fouilles confirment la présence d’êtres humains dans cette formation géologique unique, créée par des coulées de lave qui durcissent en surface, mais se creusent pour créer un long conduit habitable fait de roche durcie.
A partir de l’étude : photographies de la grotte d’Umm Jirsan et des sections intérieures du tube de lave. En haut à gauche, vue de l’entrée d’Umm Jirsan (la tranchée 1 est juste hors de vue à droite). En haut à droite, l’intérieur du tube de lave au-delà de la tranchée 1. Au milieu à gauche, un autre exemple de tube de lave près d’Umm Jirsan. Au milieu à droite, zone du Jebel Abyad avec des clastes d’obsidienne et des lithiques, sous des affleurements d’obsidienne. (M. Stewart et col./ PLOS One)
Des restes d’animaux, des objets en terre cuite fabriqués par les humains et des œuvres d’art rupestre figurent parmi les preuves de l’occupation humaine retrouvées. C’est la première fois qu’une telle formation géologique est étudiée en détail par une équipe archéologique dans la région.
A partir de l’étude : Espèces identifiables dans l’art rupestre d’Umm Jirsan. (A) mouton (panneau 8) ; (B) chèvre et deux personnages avec des outils à la ceinture (panneau 8) ; (C) bovin à longues cornes (panneau 6), photo améliorée en utilisant le paramètre ybk de DStretch ; (D) bouquetin avec des cornes striées et des marques de pelage (panneau 4). En bas : tracés des exemples A-D. (Stewart et col./ PLOS ONE)
Selon Mathew Stewart, de l’université Griffith, en Australie, premier auteur de l’étude (lien plus bas) et chargé de recherche au Centre de recherche australien sur l’évolution de l’homme :
Nous avions lu des rapports du Service géologique saoudien sur diverses grottes et tunnels de lave, ils les avaient enregistrés et cartographiés et sur la base de ces rapports, nous avons pensé aller en vérifier quelques-uns. Ces sites contiennent des centaines de milliers de fossiles, dont la plupart semblent dater de l’Holocène. Il s’agit d’un paysage où ce type de matériel n’a pas tendance à survivre à la surface, les archives fossiles de l’Holocène en Arabie sont très pauvres.
Lorsque nous étions là-bas, nous avons découvert des artefacts lithiques, des poteries, des coquilles d’œufs d’autruche, diverses structures dans le tunnel de lave et dans la zone environnante, de l’art rupestre, et c’est pourquoi nous avons décidé de procéder à des fouilles.
Les fouilles du site ont permis de comprendre l’utilisation du tunnel. Les chercheurs supposent qu’il servait de point de contrôle entre deux oasis, où les pasteurs se déplaçaient avec leur bétail, dont la plupart paissaient le long de ces itinéraires. Parmi les restes d’animaux, on trouve ceux d’anciens chevaux, de bovins, de gazelles, de chèvres et d’autres animaux à sabots. En outre, ces longues routes étaient probablement utilisées pour les enterrements.
A partir de l’étude : plan simple du système de tubes de lave d’Umm Jirsan, l’étoile rouge indiquant l’emplacement de la tranchée 1. (M. Stewart et col./ PLOS One)
Des « tombes à pendentifs » ont été identifiées dans le prolongement des oasis, ce qui suggère que ces routes étaient d’importantes « voies de vie » sociales, économiques et culturelles pour les anciennes sociétés pastorales saoudiennes.
Umm Jirsan est situé dans une région volcanique d’Arabie et s’étend sur 1,4 km de long. À l’intérieur des parois du tunnel, on trouve des traces d’art pariétal rupestre, consistant principalement en des représentations de moutons, de bouquetins, de chèvres et de bovins, généralement associées à des représentations d’hommes gardant ces animaux.
Pour les chercheurs, Il est certain que des personnes ont occupé ces lieux tout au long du Néolithique et à différents moments. Ces découvertes représentent un trésor d’informations archéologiques pour l’Arabie, une région gigantesque qui n’a fait l’objet que récemment d’une étude systématique de l’archéologie préhistorique.
Et pour l’anecdote, les tubes de lave ont également été suggérés comme des endroits où l’humain pourrait s’abriter sur la Lune et sur Mars.
L’étude publiée dans PLOS One : First evidence for human occupation of a lava tube in Arabia: The archaeology of Umm Jirsan Cave and its surroundings, northern Saudi Arabia et présentée sur le site de l’Université Griffith : First evidence of human occupation in lava tube cave in Saudi Arabia.