Dans de nombreuses régions de la Terre, l’agriculture et le changement climatique réduisent de moitié le nombre d’insectes
Les insectes sont essentiels à la vie sur notre planète, car ils contrôlent les espèces nuisibles, pollinisent de nombreuses cultures importantes comme les fruits et décomposent les matières mortes pour libérer des nutriments dans le sol. Cependant, leur nombre est actuellement en forte baisse, ayant chuté de moitié dans les régions du monde les plus touchées, selon une nouvelle étude.
Depuis des années, des études mettent en garde contre le déclin du nombre d’insectes et les conséquences que cela aurait sur la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des populations. Mais si certaines régions ont été bien étudiées, les connaissances sur l’ampleur et la nature de ce déclin dans d’autres parties du monde sont insuffisantes. La plupart des études se concentrent sur les régions tempérées de la planète, notamment l’Amérique du Nord et l’Europe, et l’on doute que les tendances observées dans ces régions soient représentatives de l’ensemble de la planète.
C’est dans cette optique que des chercheurs britanniques ont réalisé l’une des plus grandes évaluations de l’évolution de la biodiversité des insectes jamais réalisées. Ils ont analysé environ trois quarts de millions d’échantillons provenant d’environ 6 000 sites pour près de 20 000 espèces différentes. Ils ont comparé la biodiversité des insectes dans différentes zones, en tenant compte des émissions et de l’intensité de l’agriculture.
Selon Charlie Outhwaite, auteur principal de l’étude :
De nombreux insectes semblent très vulnérables aux pressions humaines, ce qui est préoccupant alors que le changement climatique s’aggrave et que les zones agricoles continuent de s’étendre. Nos résultats soulignent l’urgence d’actions visant à préserver les habitats naturels, à ralentir l’expansion de l’agriculture à haute intensité et à réduire les émissions.
Les chercheurs ont constaté que les insectes sont confrontés à une menace « sans précédent » due au changement climatique et à la perte d’habitat. Pour la première fois, ils ont pu intégrer l’interaction entre ces deux phénomènes dans leur modélisation de la biodiversité mondiale. Ceux-ci ont révélé que le déclin des insectes est le plus marqué dans les zones agricoles des pays tropicaux.
Dans les zones où l’agriculture est très intensive et où l’on observe un réchauffement climatique important, le nombre d’insectes était inférieur de 49 % à celui des habitats naturels sans réchauffement climatique enregistré, tandis que le nombre d’espèces différentes était inférieur de 29 %. L’étude a également montré que la présence d’un habitat naturel atténuait les pertes, en particulier dans les zones où l’agriculture était peu intensive.
Les chercheurs affirment que les déclins d’insectes dus à l’influence de l’humain pourraient être encore plus importants que ne le suggèrent leurs résultats. En effet, les zones où l’impact humain est connu depuis longtemps pourraient avoir déjà subi des pertes de biodiversité avant le début de la période d’étude. En outre, cette dernière n’a pas pris en compte l’effet d’autres facteurs, tels que la pollution.
Selon Tim Newbold, auteur principal :
Les effets néfastes de l’agriculture intensive sur l’environnement constituent un défi difficile à relever alors que nous essayons de répondre à la demande alimentaire d’une population croissante. Une gestion attentive des zones agricoles, comme la préservation des habitats naturels à proximité des terres agricoles, peut contribuer à garantir que les insectes essentiels puissent encore prospérer.
Selon les chercheurs, les gouvernements et les organisations publiques et privées devraient davantage prendre en compte l’impact de leurs actions sur les insectes. Il peut s’agir de s’assurer que les produits ne proviennent pas de zones liées à des taux de déforestation élevés ou de prendre en compte la biodiversité dans les politiques et les accords commerciaux. En tant qu’individus, nous pouvons également prendre des mesures positives, par exemple en réduisant la quantité de pesticides dans notre alimentation, en optant pour des produits durables et en soutenant une politique respectueuse de l’environnement.
L’étude publiée dans Nature : Agriculture and climate change are reshaping insect biodiversity worldwide et présentée sur le site de l’University College de Londres : Warming climate and agriculture halve insect populations in some areas et les chercheurs décrivent leur étude dans un article publiée dans The Conversation : Climate change triggering global collapse in insect numbers: stressed farmland shows 63% decline – new research.