La tentation d’ouvrir la boîte de Pandore pourrait nous différencier des autres singes
Selon une nouvelle étude, les enfants humains sont plus enclins que les grands singes à ouvrir une « boîte » au contenu mystérieux plutôt qu’une boîte dont le contenu est connu. Cela suggère que notre sens inné de la curiosité pourrait être l’un des éléments qui nous rend uniques en tant qu’espèce.
Image d’entête : Pandora (la boite de Pandore) par le peintre John William Waterhouse (1896). (Wikimedia)
Selon le psychologue Alejandro Sánchez-Amaro, de l’Institut Max Planck d’anthropologie évolutive en Allemagne, et le chercheur en sciences cognitives Federico Rossano, de l’Université de Californie à San Diego aux Etats-Unis, dans leur étude (lien plus bas) :
Les enfants ont exploré les options incertaines avant que les alternatives ne soient présentées, faisant preuve d’un degré de curiosité plus élevé que les grands singes.
Des groupes de 15 à 29 singes captifs, un mélange de chimpanzés, de gorilles et de bonobos, ont été testés à l’aide de gobelets renversés opaques et transparents contenant des friandises juteuses à base de raisin. Après quelques essais destinés à les familiariser avec les objets, les primates se sont vus présenter des combinaisons telles qu’un gobelet transparent contenant un raisin et un gobelet opaque qui, à leur insu, contenait davantage de raisins. Les singes devaient ensuite choisir un gobelet et recevoir la récompense qui s’y trouvait.
Représentation de l’étude 3 dans laquelle les singes peuvent soit choisir la coupe transparente et obtenir un raisin, soit choisir la coupe opaque et obtenir deux raisins. (Sánchez-Amaro, Rossano/ Institut Max-Planck d’anthropologie évolutionniste)
Les chercheurs ont répété ces expériences avec des groupes de 24 à 27 enfants âgés de 3 à 5 ans, en utilisant des autocollants comme récompense. Dans le dernier essai de l’expérience, les enfants n’étaient pas informés de la récompense afin de rendre leur expérience plus exploratoire, comme celle des singes.
Dès le départ, dans la première phase des études (avant qu’ils ne disposent de plus d’informations), les enfants étaient plus enclins à choisir l’option incertaine que le gobelet transparent, où la récompense était apparente : 52 et 85 % des enfants humains ont choisi le gobelet opaque au moins une fois. Néanmoins, tous les enfants n’étaient pas prêts à prendre l’option la plus risquée, et encore moins lorsqu’on ne leur montrait pas la récompense sous forme d’autocollant.
Les chercheurs de conclure :
Dans l’ensemble, les motivations internes ont fortement influencé la décision des enfants, car ils voulaient examiner les gobelets opaques même s’ils ne savaient pas qu’il y avait une plus grande récompense possible.
Alors que les singes étaient plus réticents à explorer les gobelets au contenu caché dès le départ, ils choisissaient plus souvent les gobelets opaques une fois qu’ils avaient eu un indice de la plus grande récompense cachée. Les singes maximisaient leurs récompenses. Cependant, les enfants humains ont continué à faire des mélanges entre les différents essais, ce qui suggère qu’un autre type de motivation les anime. Les chercheurs pensent qu’il s’agit de la curiosité.
La curiosité est un puissant outil d’apprentissage. Les êtres humains sont connus pour sacrifier des ressources pour obtenir des informations, même si ces informations ne semblent pas avoir d’avantages externes évidents. Certains chercheurs ont même suggéré que des niveaux élevés de curiosité pourraient avoir facilité l’expansion de l’humanité hors d’Afrique.
Ainsi, notre tendance à fouiller là où il ne faut pas, à ouvrir la boîte qui laisse échapper tous les problèmes du monde et à manger du fruit défendu pourrait être une partie intrinsèque de ce qui fait de nous des êtres humains.
L’étude publiée dans PLOS ONE : Comparative curiosity: How do great apes and children deal with uncertainty? et présentée sur le site de l’Institut Max-Planck d’anthropologie évolutionniste : Curious children, less curious apes.