La découverte de cyanure dans l’océan d’Encelade, la lune de Saturne, pourrait être propice à la vie
Encelade, la lune de Saturne, était autrefois considérée comme un point glacé sans intérêt dans l’immensité de l’espace. Mais elle apparait de plus en plus comme un foyer potentiel de vie extraterrestre.
Image d’entête : les scientifiques qui analysent les données de la sonde Cassini ont dénombré 101 geysers en éruption sur la lune glacée Encelade. (Cassini/ NASA)
Encelade était déjà un endroit prometteur, mais une nouvelle analyse des données de la sonde Cassini de la NASA, qui a passé plus d’une décennie à explorer le système saturnien, est à l’origine de cette nouvelle découverte. La mission Cassini a confirmé la présence de cyanure d’hydrogène, une molécule toxique, dans les océans souterrains d’Encelade. Bien que ce gaz soit donc toxique, il pourrait en fait être lié à l’émergence de la vie.
Un portrait d’Encelade et ses geysers (partie haute), par la sonde Cassini. (NASA)
Encelade est un monde gelé, trop éloigné du soleil pour conserver de l’eau liquide à sa surface. Mais l’attraction gravitationnelle de Saturne crée des frottements qui dégagent suffisamment de chaleur pour faire fondre la glace et créer un océan d’eau liquide. Une partie de cette eau liquide jaillit en énormes jets, ce qui permet aux chercheurs d’examiner sa composition plus en détail. De précédentes recherches ont ainsi révélé qu’Encelade était un monde étonnamment dynamique, avec des geysers qui crachent de la vapeur d’eau et des molécules organiques complexes dans l’espace. Ces jets, qui partent du pôle sud de la lune, donnent l’image d’un océan souterrain sous la croûte glacée, offrant un aperçu alléchant d’un monde où la vie pourrait exister.
Ce graphique illustre comment les scientifiques de la mission Cassini pensent que l’eau interagit avec la roche au fond de l’océan de la lune glacée de Saturne, Encelade, produisant de l’hydrogène gazeux. (NASA / JPL-Caltech / Southwest Research Institute)
Les études antérieures ont permis d’identifier du dioxyde de carbone, du méthane et de l’ammoniac dans les panaches, ce qui suggère déjà une activité hydrothermale similaire à celle des cheminées des grands fonds marins de la Terre, connues pour abriter de riches écosystèmes. À présent, les chercheurs ont trouvé une autre substance chimique prometteuse : le cyanure d’hydrogène.
Selon l’auteur principal Jonah Peter, étudiant en doctorat à l’université de Harvard, qui a effectué la majeure partie de ses recherches alors qu’il travaillait au Jet Propulsion Laboratory de la NASA, en Californie du Sud :
Nos travaux fournissent des preuves supplémentaires qu’Encelade abrite certaines des plus importantes molécules pour la création des éléments constitutifs de la vie et pour le maintien de cette vie par des réactions métaboliques. Non seulement Encelade semble répondre aux critères de base de l’habitabilité, mais nous avons maintenant une idée de la façon dont des biomolécules complexes pourraient s’y former et des voies chimiques qui pourraient être impliquées.
Un trio de lunes glacées de Saturne, Encelade, Pandore et Mimas, se presse le long de la ligne de visée de la sonde Cassini de la NASA sur cette image capturée le 28 juin 2007. (NASA/ JPL/ Space Science Institute)
La découverte du cyanure d’hydrogène fut particulièrement enthousiasmante, car c’est le point de départ de la plupart des théories sur l’origine de la vie.
La vie, telle que nous la connaissons, nécessite des éléments de construction, tels que les acides aminés. Le cyanure d’hydrogène est l’une des molécules les plus importantes et les plus polyvalentes nécessaires à la formation des acides aminés. Parce que ses molécules peuvent être combinées de différentes manières, les auteurs de l’étude qualifient le cyanure d’hydrogène de couteau suisse des précurseurs d’acides aminés.
La signature chimique de l’hydrogène moléculaire indique une activité hydrothermale au fond de l’océan, source potentielle d’énergie pour la vie. Sur Terre, les cheminées hydrothermales sont connues pour la richesse de leurs écosystèmes, qui prospèrent en l’absence de lumière solaire. Si Encelade possède des systèmes hydrothermaux similaires, ils pourraient fournir les conditions nécessaires à l’émergence et à l’évolution de la vie. Cette découverte fait passer Encelade du statut de terre gelée à celui de laboratoire dynamique pour la recherche astrobiologique. L’océan souterrain de la lune, avec son riche mélange chimique, rappelle de manière frappante la “soupe primitive” de la Terre, où l’on pense que la vie est apparue.
Selon Tom Nordheim, planétologue au JPL, coauteur de l’étude et membre de l’équipe Cassini :
Notre étude démontre qu’en dépit de la fin de la mission Cassini, ses observations continuent de nous fournir de nouvelles informations sur Saturne et ses lunes, y compris l’énigmatique Encelade.
Il s’agit également d’une des lunes gelées de Saturne qui pourraient réunir les conditions propices à la vie. Europe est une autre lune prometteuse qui présente des conditions similaires à celles d’Encelade.
Il ne fait aucun doute que notre système solaire est beaucoup plus intéressant que nous ne le pensions auparavant. Qui sait, nous pourrions même trouver de la vie ici même, dans notre jardin cosmique.
L’étude publiée dans Nature Astronomy : Detection of HCN and diverse redox chemistry in the plume of Enceladus et présentée sur le site du Jet Propulsion Laboratory de la NASA : NASA Study Finds Life-Sparking Energy Source and Molecule at Enceladus.