Les animaux pratiquent-ils l’isolement social en cas de maladies transmissibles ?
Une étude sur la manière dont différents animaux, des chauves-souris aux homards en passant par les grenouilles, les gorilles et les abeilles, font face au problème croissant des maladies infectieuses sur Terre révéle que certains semblent devenir moins sociaux, mais pas tous.
Pour les animaux sociaux, y compris les humains, l’isolement peut empêcher la propagation d’une maladie, mais il peut causer d’autres problèmes qui peuvent être aussi graves que l’infection, selon une étude publiée cette semaine.
C’est une énigme. La lutte contre les maladies infectieuses « pourrait faire la différence entre la persistance et l’extinction », écrivent Andrea Townsend, du Hamilton College (États-Unis), et ses collègues.
Mais l’isolement social a un coût. Chez l’homme, la solitude contribue à une mauvaise santé, à une mortalité plus élevée et, ironiquement, à un affaiblissement des défenses immunitaires.
L’hypervigilance peut conduire au rejet des membres du groupe extérieur et à l’évitement des « autres étrangers », ce qui, selon Townsend et ses coauteurs, « pourrait donc favoriser l’équilibre vers un phénotype plus averse au risque, plus xénophobe et moins social ».
Qu’en est-il des autres animaux ?
Certains animaux comme les poissons et les pinsons sont également “hypervigilants”, évitant les autres qui présentent des signes visuels de maladie, comme la léthargie ou une apparence inhabituelle. On sait que les chimpanzés (Pan troglodytes) évitent les membres de leur groupe qui présentent des changements de comportement après s’être rétablis de la polio.
D’autre part, cela peut aussi accroître la proximité entre les membres du groupe. Les mandrills (Mandrillus sphinx), par exemple, semblent rendre le toilettage des proches plus important que le fait d’éviter l’infection.
Les humains ont également des qualités rédemptrices, notent les auteurs, car la maladie peut rassembler les gens et lier les familles.
Parmi les autres exemples de coûts par rapport aux avantages, on peut citer les gorilles des plaines occidentales (Gorilla gorilla). Ceux qui étaient plus solitaires au Congo présentaient moins de risques de mourir d’Ebola. Mais l’isolement pourrait accroître leur vulnérabilité face aux prédateurs.
Les langoustes blanches des caraïbes (Panulirus argus) évitent les autres qui sont infectés par le virus mortel Panulirus argus Virus 1 (PaV1). Cela semble les rendre moins sociables, avec des impacts potentiels sur leur reproduction, leur croissance et leur survie.
Certaines chauves-souris de l’Indiana (Myotis sodalis), qui sont menacées d’extinction par le syndrome du nez blanc (Geomyces destructans), ont réduit la taille de leur groupe. Mais pour hiberner en isolement, elles doivent produire davantage d’énergie pour rester au chaud.
Certains insectes eusociaux semblent avoir une approche désintéressée. Les abeilles butineuses (Apis mellifera) infectées par les pathogènes émergents Varroa destructor ou Nosema sont moins susceptibles de retourner dans leur ruche, mourant seules, se sacrifiant ainsi pour éviter d’infecter la colonie.
Rappelant les bulles sociales qui ont aidé les humains à atténuer la propagation de la COVID-19, certaines espèces limitent leurs déplacements entre les groupes, comme la fourmi noire des jardins (Lasius niger).
D’autre part, l’isolement social ne semble pas être favorisé pour les maladies infectieuses qui peuvent être mieux atténuées par des groupes.
Les merles d’Amérique (Turdus migratorius) et les moineaux domestiques (Passer domesticus), par exemple, qui se perchent ensemble lorsque le virus du Nil occidental est répandu, sont moins susceptibles d’être piqués par des moustiques infectés.
De même, les loups gris (Canis lupus) infectés par la gale, maladie chronique, s’en sortent mieux en groupe.
Qu’est-ce que tout cela signifie pour nous ?
Selon Townsend et d’autres, les pressions sociales liées aux maladies infectieuses sont susceptibles de s’accroître à mesure que leur risque augmente avec la surpopulation, la pauvreté, l’agriculture intensive et le commerce mondial.
Nous sommes avantagés par les tests de diagnostic, la recherche des contacts, la communication virtuelle et les médias sociaux, qui nous mettent au défi de trouver de meilleurs moyens d’amortir les effets et de maintenir des relations sociales solides.
L’étude publiée dans Proceedings of the Royal Society B. : Emerging infectious disease and the challenges of social distancing in human and non-human animals et présentée sur le site du Hamilton College : From lobsters to honey bees, social distancing is common.