(Encore) pire que prévu : une nouvelle analyse triple les risques liés à l’élévation du niveau de la mer
Nous ne dérogerons pas à la triste règle, en matière de dérèglement climatique, chaque étude/ estimation publiée est pire que la précédente, foi de Guru…
Dans trois décennies, plus de 300 millions de foyers vivant sur les côtes pourraient être inondés chaque année et de nouveaux niveaux de marée haute pourraient couvrir les terres actuellement habitées par environ 150 millions de personnes, dont la plupart en Asie.
Image d’entête : inondations à Jakarta, Indonésie, février 2017. (Organisation météorologique mondiale/ Flickr)
Ces prévisions sont trois fois plus élevées que les estimations actuelles, ce qui suppose des réductions modérées des émissions mondiales de carbone.
Il s’agit donc, dans le meilleur des cas, de scénarios fondés sur les objectifs d’émissions de carbone fixés par l’Accord de Paris de 2015 qui sont atteints.
Des modèles à fortes émissions, combinés à une possible fonte précoce de la calotte glaciaire de l’Antarctique, prévoient que 40 millions de personnes supplémentaires devront faire face à des inondations côtières d’ici 2050, pour atteindre un total de 630 millions à la fin du siècle.
Selon l’auteur principal Scott Kulp de Climate Central aux États-Unis :
Ces évaluations montrent le potentiel du changement climatique pour remodeler les villes, les économies, les côtes et des régions entières de la planète au cours de notre vie.
Alors que le niveau de la marée monte plus haut que le niveau du sol que les gens appellent chez eux, les nations devront de plus en plus se demander si les remparts côtiers peuvent les protéger et pendant combien de temps.
Kulp et le coauteur Benjamin Strauss ont produit les estimations mises à jour à l’aide d’un nouveau modèle altimétrique numérique, CoastalDEM, qui corrige les erreurs systématiques dans les prévisions actuelles produites par la mission SRTM (Shuttle Radar Topography Mission) de la NASA.
Le SRTM mesure les altitudes les plus élevées détectables, y compris la cime des arbres et les toits. Cela peut entraîner des surestimations allant de plus de 2 mètres pour les élévations côtières, dépassant l’élévation prévue du niveau de la mer au cours du siècle, à 4 mètres dans les zones urbaines à forte densité.
CoastalDEM utilise un modèle de réseau neuronal qui intègre 23 variables, y compris des données sur la population et la végétation, réduisant ces erreurs moyennes à environ 10 centimètres, une petite fraction des estimations précédentes.
Selon Benjamin Strauss :
Malgré toutes les recherches critiques qui ont été faites sur le changement climatique et les projections du niveau de la mer, il s’avère que pour la majeure partie de la côte mondiale, nous ne connaissions pas la hauteur du sol sous nos pieds.
Même les prévisions optimistes fondées sur de faibles émissions de carbone et des calottes glaciaires stables de l’Antarctique dépassent largement les estimations antérieures faites à l’aide du SRTM, font remarquer les auteurs.
Indépendamment du modèle ou des scénarios d’émissions, ils rapportent que plus des deux tiers des personnes vivant sur des terres vulnérables se trouvent dans 8 pays asiatiques : Chine, Bangladesh, Inde, Inde, Vietnam, Indonésie, Thaïlande, Philippines et Japon.
Exemple, en rouge, futures menaces d’inondations côtières d’ici 2050 à Shanghai, Chine, qui compte 26 millions d’habitants, la plus grande agglomération urbaine de Chine. (Kulp & Strauss/ Nature)
Futures menaces d’inondations côtières à Kolkata, Inde, qui compte 15 millions d’habitants, et ce nombre ne cesse de croître. La ville est déjà confrontée à des inondations causées par de fortes pluies et d’autres événements ; au milieu du siècle, une grande partie de Kolkata pourrait se trouver dans la zone à risque d’inondation côtière annuelle. (Kulp & Strauss/ Nature)
Rien qu’en Chine, 43 à 57 millions de personnes pourraient se retrouver sous la limite de marée haute d’ici la fin du siècle, selon la stabilité des glaces en Antarctique.
Vingt autres pays, tous des nations insulaires, pourraient voir 10% ou plus de leur population tomber en dessous des niveaux de marée haute, même avec les réductions d’émissions les plus positives.
A partir de l’étude : population totale sur les terres vulnérables aux inondations. (Kulp & Strauss/ Nature)
Les États-Unis pourraient également être confrontés à des migrations massives au cours du siècle en raison de l’élévation du niveau de la mer, ce qui aurait des répercussions sur la répartition de la population et mettrait à rude épreuve les ressources intérieures. L’impact sur les pays moins développés est incertain.
Selon les chercheurs :
Il est difficile d’extrapoler de telles projections et leurs impacts à des pays en développement aux ressources plus limitées, bien que, historiquement, les phénomènes migratoires à grande échelle aient posé de sérieux défis à la stabilité politique, entraînant des conflits.
Si nos conclusions se maintiennent, les communautés côtières du monde entier doivent se préparer à un avenir beaucoup plus difficile qu’on ne le prévoit actuellement.
Vous pouvez explorer les zones menacées à l’aide d’une carte mondiale interactive produite par Climate Central à partir de ses nouvelles données altimétriques.
Toutefois, même si ces scénarios améliorent considérablement les estimations actuelles, il reste encore beaucoup à faire pour améliorer l’exactitude des prédictions.
Selon Strauss :
Nos données améliorent la situation, mais les gouvernements et les entreprises aérospatiales ont encore un grand besoin de produire et de diffuser des données altimétriques plus précises. La vie et les moyens de subsistance en dépendent.
L’étude publiée dans Nature : New elevation data triple estimates of global vulnerability to sea-level rise and coastal flooding et présentée sur le site du Climate Central : Flooded Future: Global vulnerability to sea level rise worse than previously understood.
On ne risque pas de s’ennuyer dans les décennies qui viennent.