Nos bruits nuisent à la communication des milieux naturels, mais leurs sons nous aident-ils ?
Le son des feuilles qui bruissent dans le vent, de l’eau qui coule dans un ruisseau ou des oiseaux qui gazouillent dans le ciel peut considérablement améliorer notre santé, selon une nouvelle étude.
Pour cette dernière, des chercheurs de l’université Carleton (Canada), de l’université d’État du Michigan, de l’université d’État du Colorado et du National Park Service (Etats-Unis) ont demandé à des dizaines d’étudiants d’identifier différents types de sons dans une série d’enregistrements. La base de données des paysages sonores comprenait des enregistrements d’animaux sauvages et de sons naturels, allant de la pluie qui tombe au hurlement des loups, provenant de 251 sites dans 66 parcs nationaux des États-Unis.
Les chercheurs ont constaté que les participants ressentaient moins de douleur, étaient moins stressés, étaient de meilleure humeur et présentaient de meilleures performances cognitives. Les améliorations les plus importantes en termes d’émotions positives et de résultats pour la santé ont été associées aux sons de l’eau, tandis que le chant des oiseaux a le plus réduit le stress et amélioré l’humeur des personnes.
Ces résultats sont plus que jamais importants dans le contexte de cette pandémie, qui a conduit des millions de personnes à rester enfermées dans leurs maisons en ville pendant des mois. D’un côté, le fait de ne pas pouvoir visiter les parcs peut avoir contribué à accroître le stress et à réduire la santé mentale. Mais d’un autre côté, les confinements ont également réduit le trafic et mis fin à la pollution sonore urbaine, permettant aux gens de découvrir les paysages sonores naturels de leur propre jardin avec de nouvelles oreilles.
En 2017, une étude menée par Rachel Buxton, écologiste acoustique à l’université d’État du Colorado à Fort Collins, qui est également l’une des principales auteurs de la nouvelle étude publiée cette semaine (lien plus bas), a révélé que les zones protégées sont de plus en plus bruyantes. Selon l’étude, plus de la moitié des zones protégées aux États-Unis sont deux fois plus bruyantes qu’elles ne devraient l’être.
Cela signifie que si vous pouviez entendre le chant d’un oiseau à 30 mètres, vous ne l’entendez plus qu’à 15 mètres. Cependant, 21 % des zones protégées étaient même 10 fois plus bruyantes qu’elles ne devraient l’être, de sorte que vous ne pourriez entendre un oiseau qu’à 1,5 mètre de distance. Au total, le bruit de fond réduit de 50 à 90 % la distance à laquelle les autres sons peuvent être entendus. En outre, 58 % des zones abritant des espèces menacées présentaient des niveaux de bruit doublés.
Plus un parc est populaire, plus il est probable que les visiteurs ne profitent pas de tous les avantages pour la santé qu’ils auraient dans un parc calme.
Ce n’est pas la première étude à établir un lien entre l’exposition aux bruits de la nature et le bien-être. Dans une étude publiée en 2017, des chercheurs de l’école de médecine de Brighton et du Sussex, en Angleterre, ont recruté 17 adultes en bonne santé pour leur faire passer des scanners d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) pendant qu’ils écoutaient une série de paysages sonores de 5 minutes représentant des environnements naturels et artificiels.
Les scanners cérébraux ont montré que l’écoute de sons artificiels était associée à des schémas d’attention centrée sur soi, tandis que les sons naturels suscitaient une attention plus centrée sur l’extérieur. L’attention centrée sur l’intérieur peut amener les gens à s’inquiéter et à ruminer leurs malheurs quotidiens, mettant en place des schémas qui peuvent conduire au stress, à l’anxiété et même à la dépression. Cette étude a également révélé que les sons de la nature diminuaient la réponse sympathique du corps (qui provoque cette sensation de « combattre ou fuir »), ce qui aide le corps à se détendre davantage.
Dans cette optique, les auteurs de la nouvelle étude recommandent de mettre en œuvre des programmes qui augmentent l’exposition des personnes aux sons de la nature, associés à des programmes de gestion du bruit.
Selon Kurt Fristrup, coauteur de l’étude et chercheur en bioacoustique au Service des parcs nationaux des Etats-Unis :
Les parcs situés à proximité des zones urbaines et très fréquentés représentent des cibles importantes pour la conservation des paysages sonores afin d’améliorer la santé des visiteurs. Les interventions sanitaires fondées sur la nature sont de plus en plus courantes dans les parcs et l’intégration d’une prise en compte explicite de l’environnement acoustique est une occasion d’améliorer les résultats sanitaires pour les gens.
L’étude publiée dans The Proceedings of the National Academy of Sciences : A synthesis of health benefits of natural sounds and their distribution in national parks et présentée sur le site de l’Université Carleton : Want to Improve Your Health? A New Study Says Head into Nature and Absorb the Sounds.