À l’aube de l’univers : Hubble repère la plus lointaine étoile
Le télescope spatial Hubble a repéré l’étoile solitaire la plus lointaine, à environ 12,9 milliards d’années-lumière de la Terre. La lumière de cette étoile a été émise peu de temps après le Big Bang, et la lumière a été amplifiée par une galaxie située au premier plan et étirée par l’expansion de l’univers.
L’étoile a été surnommée Earendel, qui est apparemment un mot du vieil anglais signifiant « étoile du matin » ou « lumière montante ». Et cela convient parfaitement à une étoile que nous observons telle qu’elle était à peine 900 millions d’années après le début de l’univers. Cela en fait de loin l’étoile individuelle la plus lointaine jamais observée, la précédente détentrice du record, une supergéante bleue surnommée Icare, est plus proche de près de 4 milliards d’années-lumière.
Image d’entête : l’étoile Earendel (indiquée par une flèche) est positionnée le long d’une ondulation de l’espace-temps qui lui confère un grossissement extrême, lui permettant d’émerger de sa galaxie hôte, qui apparaît comme une tache rouge dans le ciel. (NASA/ ESA/ Alyssa Pagan)
Cela dit, ces chiffres peuvent prêter à confusion. La distance de 12,9 milliards d’années-lumière d’Earendel et de 9 milliards d’années-lumière d’Icare est exprimée en fonction de ce que l’on appelle le temps de retour en arrière, en utilisant le jour présent comme point de référence. Il a donc fallu 12,9 milliards d’années à la lumière d’Earendel pour nous parvenir ici sur Terre, mais l’étoile sera désormais beaucoup plus éloignée en raison de l’expansion de l’univers.
En fait, le taux de cette expansion est l’un des outils utilisés pour mesurer des distances aussi grandes. Lorsque la lumière voyage dans le cosmos, l’univers en expansion étire ses longueurs d’onde, la déplaçant vers l’extrémité rouge du spectre. Le calcul de ce décalage vers le rouge peut révéler la distance à laquelle se trouvait la source, plus le nombre de décalages vers le rouge est élevé, plus la distance est grande. Dans ce cas, le décalage vers le rouge d’Earendel était de 6,2, ce qui est absolument énorme comparé au décalage vers le rouge d’Icare, qui n’était que de 1,5.
Bien que des galaxies et des amas entiers aient été observés à des distances encore plus grandes, il est beaucoup plus difficile de distinguer des étoiles individuelles à une telle distance. Les astronomes ont donc bénéficié de l’aide d’une galaxie beaucoup plus proche, qui a déformé l’espace-temps grâce à son immense gravité. La lumière d’Earendel a ainsi été courbée et amplifiée, ce qui l’a rendue visible pour Hubble grâce à un phénomène connu sous le nom de lentille gravitationnelle.
Schéma/ exemple du phénomène de lentille gravitationnelle : un amas de galaxies, au centre de l’image, déforme par sa masse la lumière et la toile de l’espace-temps, représenter par la grille bleue. Ainsi, du point de vue de la Terre, en bas à droite, cette courbure de l’espace-temps crée un effet de loupe qui permet de grossir les galaxies se touvant plus loin derrière l’amas de galaxies entrainant l’effet de lentille gravitationnelle. (Hubble)
En tenant compte de ce phénomène, les astronomes ont pu estimer qu’Earendel avait une masse plus de 50 fois supérieure à celle du Soleil. Il est possible qu’il ne s’agisse pas d’une étoile solitaire, mais d’un système binaire de deux étoiles, mais cela ne diminue en rien la réussite de sa détection à une telle distance.
Cette vue détaillée met en évidence la position de l’étoile Earendel le long d’une ondulation de l’espace-temps (ligne pointillée) qui l’agrandit et permet de détecter l’étoile sur une si grande distance, près de 13 milliards d’années-lumière. La distorsion et le grossissement sont créés par la masse d’un énorme amas de galaxies situé entre Hubble et Earendel. (NASA/ ESA/ Brian Welch (JHU)/ Dan Coe (STScI)/ Alyssa Pagan (STScI))
Les astronomes n’ont pas été en mesure de mesurer d’autres propriétés d’Earendel, comme sa température, son spectre et le fait qu’il s’agisse d’une ou de deux étoiles, mais ces détails pourraient être révélés par le télescope spatial James Webb, qui doit commencer ses observations dans quelques mois.
L’étude publiée dans Nature : A highly magnified star at redshift 6.2 et présentée sur le site de l’Université Johns Hopkins : Stars align for Hubble Space Telescope discovery et sur le site de la NASA : Record Broken: Hubble Spots Farthest Star Ever Seen.