Des lentilles à métasurfaces permettent de piéger individuellement des atomes avec de la lumière
Les « pinces optiques« , des systèmes qui concentrent la lumière pour piéger et manipuler individuellement des atomes, pourraient ouvrir la voie à de puissants dispositifs quantiques, mais elles peuvent être un peu encombrantes. Des chercheurs ont maintenant mis au point une version simplifiée et plus petite des pinces optiques, qui utilise une lentille à métasurface constellée de millions de minuscules colonnes.
Image d’entête : un schéma illustrant comment la nouvelle métasurface fonctionne comme une « pince optique » pour piéger les atomes. (Sean Kelley/ NIST)
Étant donné leur taille minuscule, individuellement, les atomes sont notoirement difficiles à voir et à manipuler, mais il serait extrêmement utile de trouver des moyens de le faire. L’invention du laser dans les années 1960 a permis de réaliser que la pression de radiation de la lumière pouvait être exploitée pour piéger des particules, des atomes et même des bactéries vivantes. Dans les années 1980, les pinces optiques étaient nées, ce qui a valu à leurs créateurs le prix Nobel de physique en 2018.
Aussi puissants que ces « outils de lumière » aient été, ils nécessitent des lentilles relativement grandes à l’échelle du centimètre, et l’imagerie des atomes à l’aide de systèmes de microscopie séparés qui ne peuvent pas fonctionner dans le vide où les atomes sont initialement conservés et piégés. Mais pour cette nouvelle étude, les scientifiques du National Institute of Standards and Technology (NIST/ Etats-Unis) et du JILA (Joint Institute for Laboratory Astrophysics/ Etats-Unis) ont mis au point un nouveau type de pinces optiques qui résout ces deux problèmes.
La nouvelle méthode utilise un carré de verre de 4 mm de côté, gravé de minuscules piliers de silicium de quelques centaines de nanomètres chacun. Cela forme une “métasurface” qui accorde avec précision la lumière laser entrante et la concentre sur un nuage d’atomes dans le vide, pour en sélectionner un à piéger.
Le système fonctionne de manière très intelligente. Tout d’abord, la lumière laser est émise comme une onde plane, c’est-à-dire qu’elle se déplace comme une série de couches plates. Lorsque ces couches touchent la métasurface, les nanopiliers transforment les ondes lumineuses en petites « vaguelettes », légèrement désynchronisées les unes par rapport aux autres, de sorte qu’elles atteignent leurs maximums/ pics à des moments différents. Cette structure fait interférer les ondelettes entre elles et concentre toute leur énergie en un point très fin et l’atome qui se trouve à ce point est piégé.
En frappant la métasurface avec des ondes planes provenant de différents angles, les ondelettes peuvent être concentrées sur différents points, ce qui permet aux pinces de piéger plusieurs atomes individuels simultanément. Contrairement aux systèmes existants, cette opération peut être réalisée directement dans la chambre à vide où sont conservés les atomes ciblés, et ne nécessite aucune pièce mobile.
A partir de l’étude : Optique métasurface pour le piégeage par pinces optiques. (a) Micrographie électronique à balayage de la lentille à métasurface fabriquée contenant un réseau périodique de nanopiliers d’une largeur allant de 85 nm à 185 nm (bleu foncé) sur le dessus d’un substrat en silice fondue de 500-μm d’épaisseur (bleu clair). L’encart montre la variation de la largeur des nanopiliers pour obtenir le déphasage souhaité. (b) Illustration théorique du fonctionnement de la métasurface-lentille, montrant la propagation de la lumière. (c) Le montage optique pour le piégeage (rose) et l’imagerie de fluorescence (vert) d’atomes uniques dans un réseau créé avec plusieurs faisceaux d’entrée générés à l’aide de déflecteurs acousto-optiques à deux axes. (d) Image d’un réseau de 87 Rb piégé créée en faisant la moyenne de plusieurs itérations de l’expérience.. (T.-W. Hsu et col./ PRX Quantum)
Lors de tests, l’équipe a fait la démonstration de la métasurface en piégeant neuf atomes de rubidium séparément, en les retenant chacun pendant environ 10 secondes. Les chercheurs ont suivi les atomes piégés en les frappant avec une source lumineuse distincte qui les a rendus fluorescents, ce qui a mis en évidence un autre avantage de leur nouveau système : la métasurface peut fonctionner en sens inverse, en recueillant la fluorescence émise par les atomes et en la dirigeant vers une caméra externe pour prendre des images de ces derniers.
Les chercheurs affirment que le nouveau système pourrait être mis à l’échelle avec un champ de vision plus large ou plusieurs métasurfaces travaillant à l’unisson, ce qui leur permettrait potentiellement de capturer et de manipuler des centaines d’atomes à la fois. Cela pourrait constituer la base de la mémoire des ordinateurs quantiques, où les données sont traitées et stockées dans les états quantiques de chaque atome.
L’étude publiée dans la revue PRX Quantum : Single-Atom Trapping in a Metasurface-Lens Optical Tweezer et présentée sur le site du National Institute of Standards and Technology : NIST Researchers Develop Miniature Lens for Trapping Atoms.