Une dent de mégalodon vieille de 3,5 millions d’années découverte à 3 000 mètres de profondeur
Un requin perd jusqu’à 40 000 dents au cours de sa vie, et le mégalodon, le plus grand prédateur de tous, n’était pas une exception. En parcourant les océans du monde entier il y a 4 à 20 millions d’années, ce redoutable animal a laissé tomber des dents qui s’échouent encore sur les plages ou qui émergent de paysages autrefois submergés. Mais jusqu’à présent, aucune dent n’avait été découverte dans la même position que celle dans laquelle elle était tombée il y a des millions d’années.
Image d’entête : représentation et comparaison du mégalodon (au centre). (J. Kirch/ NPR)
Une équipe de chercheurs vient de décrire l’une de ces découvertes : une dent fossilisée d’Otodus megalodon partiellement enfouie dans le fond de l’océan, à quelque 3 000 mètres de profondeur, dans l’immensité de l’océan Pacifique. La dent fut difficile à repérer sur l’affleurement rocheux, mais les chercheurs qui ont visionné les images d’un submersible télécommandé l’ont aperçue qui sortait tout droit du sable, comme si elle s’y était posée il y a quelques instants à peine.
Lorsqu’ils ont inspecté l’ancienne dent sur la terre ferme, ils ont constaté qu’elle avait une pointe cassée et des bords dentelés qui semblent presque aussi tranchants que le jour où ils ont découpé de la viande fraîche pour la dernière fois.
A partir de l’étude : la dent d’Otodus megalodon. (J. Pollerspöck et col./ Historical Biology)
Le physique redoutable du mégalodon, assez grand pour dévorer les requins actuels en quelques bouchées, est connu presque exclusivement par ses dents, qui peuvent être aussi grosses qu’une main humaine, et ses vertèbres éparses. Contrairement à ces pièces anatomiques robustes, le reste des tissus mous et des cartilages de l’O. megalodon n’a pas survécu aux 3,6 millions d’années qui se sont écoulées depuis l’extinction de l’animal. Sur la base de ce départ, on pense que cette dent est au moins aussi ancienne. Elle a été trouvée dans un endroit isolé au sud-ouest d’Hawaï, à quelques centaines de kilomètres d’un avant-poste militaire américain appelé l’atoll Johnston, au bord d’un « désert » océanique.
Les chercheurs à bord du navire d’exploration EV Nautilus ont étudié la zone afin de mieux comprendre la géologie et la biologie des grands fonds marins.
Selon Tyler Greenfield, paléontologue à l’université du Wyoming (États-Unis) :
Il existe des zones du plancher océanique, en particulier de profonds bassins océaniques éloignés du continent, où il n’y a que peu ou pas de dépôt de sédiments pendant de longues périodes. Il est également possible que les dents soient érodées et remaniées dans des sédiments plus jeunes, mais ce n’est probablement pas ce qui s’est produit dans ce cas.
La dent a été trouvée sur la crête d’une dorsale, où les courants océaniques sont supposés être suffisamment forts pour empêcher l’accumulation de sédiments.
Capture d’écran de la vidéo de documentation du (ROV) Hercules à une profondeur de 3090 m sur un mont sous-marin sans nom situé à ~350 km au sud-est de l’atoll de Johnston montrant le site avec la dent d’Otodus megalodon. (J. Pollerspöck et col./ Historical Biology)
Le bord dentelé de la dent était également exceptionnellement bien préservé, ce qui suggère qu’elle n’a pas été ballottée et érodée. Bien qu’elle ne soit pas la plus grande du genre, la nouvelle dent qui mesure 63-68 millimètres, vient s’ajouter à un nombre croissant de spécimens qui retracent les mouvements du mégalodon à travers les océans.
En consultant les archives des expéditions passées en haute mer, Jürgen Pollerspöck, de la collection de zoologie de l’État de Bavière en Allemagne, et ses collègues ont identifié de nombreuses autres dents de mégalodon qui ont été ramassées à des profondeurs allant de 350 à 5 570 mètres. Mais ils affirment qu’il s’agit de la première dent documentée dans sa dernière demeure, telle qu’elle a été trouvée.
Les chercheurs de conclure :
La première documentation in situ d’un fossile de requin mégalodon des grands fonds souligne l’importance de l’utilisation de technologies avancées de plongée profonde pour étudier les parties les plus vastes et les moins explorées de nos océans.
L’étude publiée dans la revue Historical Biology : First in situ documentation of a fossil tooth of the megatooth shark Otodus (Megaselachus) megalodon from the deep sea in the Pacific Ocean.