Des scientifiques séquencent le génome d’un empereur chinois du VIe siècle pour déterminer à quoi il ressemblait
Des chercheurs ont reconstitué le visage de l’empereur chinois Wu des Zhou du Nord, qui vivait il y a 1 500 ans.
L’analyse en profondeur de l’ADN des polymorphisme nucléotidique, ou polymorphisme d’un seul nucléotide (PSN), est le type de variation génétique le plus courant chez les personnes et leur analyse a permis de révéler les traits du visage de Wu.
Image d’entête : reconstruction faciale de l’empereur Wu, d’ethnie Xianbei. (Pianpian Wei/ P. Du et col., Current Biology)
Wu a régné sur la dynastie des Zhou du Nord de 560 à 578 de notre ère. Sous son règne, une puissante armée a été mise en place et la partie septentrionale de la Chine a été unifiée après que l’armée de Wu a vaincu la dynastie des Qi du Nord. La dynastie des Zhou du Nord a duré de 557 à 581 de notre ère. Elle a été remplacée par la dynastie Sui, qui a fini par réunifier la Chine. Le règne de Wu a été interrompu par sa mort à l’âge de 36 ans. Outre le fait qu’elle nous donne un aperçu de cet ancien souverain chinois, la recherche suggère également que Wu est peut-être mort d’une attaque cérébrale. Sa tombe a été découverte dans le nord-ouest de la Chine en 1996.
Les divisions de la Chine, 535-560 après J.-C. (Albert Herrmann (1935) History and Commercial Atlas of China. Harvard Press.)
L’empereur Wu était d’ethnie Xianbei. Il s’agissait d’un peuple nomade qui vivait dans ce qui est aujourd’hui la Mongolie et dans le nord et le nord-est de la Chine. Certains spécialistes ont affirmé que les Xianbei avaient une apparence « exotique », comme une barbe épaisse, une arête nasale haute et des cheveux jaunes », explique l’auteur correspondant, Shaoqing Wen, de l’université Fudan de Shanghai (Chine), qui ajoute :
Notre analyse montre que l’empereur Wu avait des caractéristiques faciales typiques de l’Asie de l’Est ou du Nord-Est.
L’équipe a pu retrouver plus d’un million de polymorphisme d’un seul nucléotide (PSN) sur son ADN. Les PSN sont des variations à des positions uniques dans une séquence d’ADN chez un individu. En étudiant ces changements d’une seule lettre (l’ADN est codé par les lettres A, C, G et T correspondant à différentes molécules), les généticiens peuvent déterminer les différents traits des individus. Dans ce cas, les chercheurs ont pu trouver des informations sur la peau et les cheveux de Wu et les combiner avec son crâne pour reconstituer le visage de l’ancien empereur.
A partir de l’étude : reconstruction faciale et prédiction phénotypique de Wudi : (A) Modèle numérique virtuel en 3D du crâne – (B) La reconstruction virtuelle originale – (C) Prédiction de l’apparence à l’aide des SNP du système HIrisPlex-S – (D) La reconstruction faciale finale – (E) Le portrait de Wudi tiré du rouleau des treize empereurs. (P. Du et col./ Current Biology)
Selon l’auteur correspondant, Pianpian Wei, également de l’université Fudan :
Notre travail a permis de donner vie à des personnages historiques. Auparavant, les gens devaient se fier à des documents historiques ou à des peintures murales pour se faire une idée de l’apparence des anciens. Nous sommes en mesure de révéler directement l’apparence du peuple Xianbei.
Certains archéologues affirment que Wu est mort de maladie, d’autres qu’il a été empoisonné. Selon les archives historiques, l’empereur souffrait d’aphasie (trouble du langage), de “paupières tombantes” et d’une démarche anormale, autant de symptômes potentiels d’une attaque cérébrale (AVC).
L’analyse révèle également que le peuple Xianbei s’est mélangé aux Chinois de souche Han lorsqu’ils ont migré vers le sud et le nord de la Chine.
Selon Wen :
Il s’agit d’une information importante pour comprendre comment les anciennes populations se sont répandues en Eurasie et comment elles se sont intégrées aux populations locales.
L’équipe prévoit d’utiliser les méthodes d’analyse génétique pour étudier les habitants de l’ancienne ville de Chang’an, dans le nord-ouest de la Chine. Cette ville fut la capitale de nombreux empereurs chinois pendant des milliers d’années et le point d’arrivée occidental de la route de la soie. Les chercheurs espèrent que de futures études permettront d’en savoir plus sur la façon dont les populations ont migré et échangé leurs cultures dans la Chine ancienne.
L’étude publiée dans Current Biology : Ancient genome of the Chinese Emperor Wu of Northern Zhou.