Le coucou change la forme de ses œufs en fonction des occupants du nid qu’ils squattent
L’un des objectifs de la femelle coucou, dans sa vie de parasite de couvée, est de pondre ses œufs dans le nid d’autres espèces d’oiseaux plus petits, en espérant que l’œuf, au demeurant assez gros, passe inaperçu et que la mère dupée s’en occupe comme de ses propres petits. Cette escroquerie prend une tournure sordide, lorsque le jeune coucou fait en sorte de se débarrasser des autres oisillons légitimes du nid en les boutant littéralement hors de celui-ci. Mais les victimes ne sont pas resté sans rien faire, ils essayent ainsi de repérer l’œuf intrus par ses couleurs ou par sa forme pour le mettre hors d’état de nuire.
Image d’entête : un coucou oriental (Cuculus optatus). (Wikimedia/ Aviceda)
Une étude internationale sur la taille des œufs du coucou oriental en Russie a comparé celle-ci aux œufs de leurs quatre hôtes correspondants et elle a montré, pour la première fois, que les coucous font varier la taille de leurs œufs en fonction de celle de leurs hôtes, ce qui témoigne d’une adaptation évolutive.
Ce sont les résultats d’une étude collaborative internationale dans laquelle des chercheurs de l’université du Hertfordshire au Royaume-Uni ont travaillé avec des universitaires de Russie et d’Ukraine pour étudier 173 œufs de coucou oriental, ce qui en fait l’une des plus grandes études de ce genre.
Le coucou oriental parasite les petits pouillots (passereaux), dont les nids sont difficiles à atteindre puisqu’ils nichent haut dans la canopée des arbres, ce qui rend l’étude de leurs œufs plus difficile. La taille des œufs du coucou oriental (Cuculus optatus) a été comparée à celle de leurs quatre hôtes correspondants en Russie : le Pouillot boréal (Phylloscopus borealis), le Pouillot véloce (P. collybita tristis), le Pouillot à grands sourcils (P. inornatus) et Pouillot de Pallas (P. proregulus). En plus des données de terrain, les chercheurs ont étudié le coucou oriental et les œufs d’hôtes de collections ologiques russes.
L’étude a suggéré qu’une correspondance entre la largeur de l’œuf du coucou et celle de l’hôte aurait pu évoluer en réponse au comportement de rejet de ce dernier, puisqu’il a été démontré qu’un hôte est susceptible de rejeter un œuf plus gros que le reste de la couvée.
Image à partir de l’étude : Œuf de coucou oriental pondu dans un nid de Pouillot à grands sourcils contenant deux œufs d’hôte. (S. G. Meshcheryagina et Col./ Journal of Zoology)
Selon Alla Mashanova, statisticienne à l’université du Hertfordshire et coauteure de la récente étude :
Nous avons constaté que la largeur des œufs correspondait bien à celle des hôtes, probablement parce que l’œuf d’un coucou qui dépasse le reste de la couvée est susceptible d’être rejeté par l’hôte. La longueur de l’œuf, par contre, était beaucoup plus variable.
Un œuf plus gros contenant plus d’éléments nutritifs améliore la qualité de la progéniture, ce qui est particulièrement important lorsque seule la femelle nourrit la progéniture, comme c’est le cas avec le Pouillot de Pallas.
Alla de rajouter :
Il a été suggéré que la longueur des œufs est déterminée par la demande pour produire des œufs plus gros que ceux de l’hôte et elle est influencée par le niveau de soins parentaux. Ainsi, les œufs les plus longs ont été produits par des coucous parasitant le plus petit hôte avec seulement la femelle nourrissant les jeunes. À notre avis, les différences dans la taille des œufs du coucou oriental témoignent de l’adaptation au parasitisme du couvain chez les espèces de petits pouillots.
A partir de l’étude, exemples de variation des œufs dans les phénotypes de coucou oriental (en haut) et les espèces hôtes correspondantes (en bas). I : phénotype de coucou ‘borealis’ et P. borealis ; II : phénotype de coucou ‘collybita’ et P. collybita tristis ; III : phénotype de coucou ‘inornatus’ et P. inornatus ; IV : phénotype de coucou ‘proregulus’ et P. proregulus. (S. G. Meshcheryagina et Col./ Journal of Zoology)
Le comportement inhabituel du coucou, qui pond ses œufs dans les nids d’autres oiseaux et laisse tous les soins aux parents hôtes, a fait l’objet de nombreuses études universitaires et les coucous sont utilisés comme exemple des changements évolutifs dans le programme GCSE du Royaume-Uni. Cependant, il existe peu d’études sur le coucou oriental, qui est principalement une espèce asiatique.
L’étude publiée dans le Journal of Zoology : Host species determines egg size in Oriental cuckoo.
C’est pourtant connu – je crois que c’est Dawkin dans un de ses livres qui évoque le cas du coucou, en expliquant que les coucous profitent du système ZW/ZZ des oiseaux. Les femelles se sont adaptées à coloniser préférentiellement telle ou telle espèce en pondant des oeufs d’apparence correspondante, et ces traits sont portés par des variantes du gène W (femelle). Du coup, s’il n’y a qu’une espèce mâle de coucou (ZZ), il y a plusieurs sous-espèces femelles (ZWn) suivant les nids colonisés ; l’ensemble étant interfécond mais les différents W ayant eu une évolution indépendante…
Les coucous ne daignent même pas imiter les œufs de certaines espèces crédules quant ils pondent dans le nid de celles-ci, exemple l’accenteur mouchet qui, même si les œufs étrangers ne ressemblent pas au sien, ne se doutera de rien. Mais même avec des espèces crédules, ça ne marche pas toujours…