Nous pourrions enfin savoir pourquoi le pôle Nord magnétique de la Terre se déplace si rapidement
Le bouclier magnétique terrestre défend notre planète contre les effets néfastes du vent solaire et du rayonnement cosmique, rendant possible la vie sur notre planète. Mais tous les 10 ans environ, il présente des soubresauts géomagnétiques (sauts de variation séculaire ou en anglais Geomagnetic jerks). Et oui, le champ magnétique de la planète n’est pas statique.
Le pôle magnétique nord de la Terre (qui n’est pas le même que le nord géographique) a mené les scientifiques à une sorte de jeu de l’oie au cours du siècle dernier. Chaque année, il se déplace vers le nord d’environ 48 kilomètres en moyenne.
Ce mouvement a rendu imprécis le World Magnetic Model (modèle magnétique mondial), qui suit le champ et informe les compas, les téléphones intelligents GPS et les systèmes de navigation des avions et des navires.
Image à partir de : “Un nouveau rendu accéléré du turbulent champ magnétique de la Terre (vidéo)”. (ESA/ SWARM)
Comme la prochaine mise à jour du WMM n’était pas prévue avant 2020, l’armée américaine a demandé une mise à jour précoce sans précédent pour tenir compte de l’accélération du nord magnétique.
Votre Guru vous a décrit cette mise à jour dans son article de février 2019 :
Les auteurs d’une nouvelle étude ont maintenant compris pourquoi le nord magnétique pourrait se déplacer, et ils apprennent comment prévoir ces changements.
Le champ magnétique terrestre existe grâce au tourbillon de nickel liquide et de fer dans le noyau externe de la planète, à quelque 2 900 kilomètres sous la surface.
Ancré par les pôles magnétiques nord et sud (qui ont tendance à se déplacer et même à s’inverser tous les millions d’années environ), le champ fluctue en force, ondulant en fonction de ce qui se passe dans le noyau.
Image d’entête : cette représentation du noyau terrestre montre comment les ondes turbulentes (en rouge et bleu) tordent les lignes de champ magnétique de la planète (en orange) en poches d’activité intense. Ce mystérieux phénomène s’appelle une secousse géomagnétique. (Aubert et coll./ IPGP/ CNRS)
Des changements périodiques et parfois aléatoires dans la distribution de ce métal liquide turbulent peuvent causer des irrégularités dans le champ magnétique. Si vous imaginez ce dernier comme une série d’élastiques qui traversent les pôles magnétiques et le noyau de la Terre, alors le noyau change essentiellement en tirant sur différents élastiques à divers endroits. Ces remorqueurs géomagnétiques influencent la migration du pôle magnétique nord et peuvent même le faire dévier de sa position.
Jusqu’à présent, il a été difficile de prévoir ces variations. Mais dans la nouvelle étude, les géophysiciens Julien Aubert (Université de Paris, Institut de Physique du Globe de Paris, CNRS) et Christopher Finlay (National Space Institute, université technique du Danemark) ont tenté de simuler les conditions physiques du cœur de la Terre en demandant aux superordinateurs d’effectuer l’équivalent de 4 millions d’heures de calculs.
Les chercheurs savaient que le mouvement de la chaleur de l’intérieur de la planète vers l’extérieur pouvait influencer le champ magnétique. En général, cela se produit à environ 9 kilomètres par année.
Mais ils ont découvert qu’il y a parfois des poches de fer liquide dans le noyau qui sont beaucoup plus chaudes et plus légères que le liquide environnant. Si la différence entre ces parties chaudes et moins denses de liquide et leurs contreparties plus froides et plus denses est suffisamment grande, le liquide chaud peut monter très rapidement.
Ce mouvement rapide déclenche alors des ondes magnétiques qui se dirigent vers la surface du noyau, provoquant des soubresauts géomagnétiques.
Il est impératif pour les armées européennes et américaines de garder un œil sur le nord magnétique, car leurs systèmes de navigation reposent sur le WMM. Il en va de même pour les compagnies aériennes commerciales et les applications GPS des téléphones intelligents, afin d’aider les pilotes et les utilisateurs à localiser avec précision leur position et à naviguer en conséquence.
C’est pourquoi la British Geological Survey et la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA/ Etats-Unis) mettent à jour le WMM tous les 5 ans. La première mise à jour demandée par l’armée américaine a été achevée le 4 février.
Mais, pour Aubert, même avec ces mises à jour périodiques, les secousses géomagnétiques rendent difficile le maintien de la précision du modèle. Le nouveau modèle de son groupe pourrait résoudre ce problème en aidant à prédire comment le champ magnétique terrestre pourrait évoluer.
Selon M. Aubert :
Au cours des prochaines années, nous prévoyons qu’il devrait être possible pour nos groupes… de capturer les secousses passées et de prédire les futures avec une meilleure précision.
Le champ magnétique terrestre protège son atmosphère, qui fait « l’essentiel du travail » de protection contre le rayonnement solaire, comme le précise Revenaugh. Si nous perdions notre champ magnétique, nous finirions par perdre notre atmosphère. Mais selon le chercheur, c’est extrêmement improbable, car le noyau terrestre ne cesserait jamais de tourner.
Même si le champ s’effondrait, les effets dévastateurs décrits dans certains films, des gens avec des stimulateurs cardiaques tombants raides morts, des orages d’éclair incontrôlables… ne suivraient pas. Selon Revenaugh, un scénario beaucoup plus probable consisterait à une inversion des pôles magnétiques comme ce fut le cas il y a 780 000 ans. Lorsque de telles inversions se produisent (il y en a eu plusieurs dans l’histoire de la Terre), le champ magnétique chute à environ 30 % de sa pleine intensité.
Bien qu’il s’agisse d’un scénario lointain, M. Revenaugh a ajouté qu’il est toujours important d’améliorer la compréhension des scientifiques sur le champ magnétique.
Mieux nous pourrons le modéliser, mieux nous comprendrons ce qu’il en est.
L’étude publiée dans Nature Geoscience : Geomagnetic jerks and rapid hydromagnetic waves focusing at Earth’s core surface et présentée sur le site de l’Institut de Physique du Globe de Paris et sur le site du CNRS : Les secousses géomagnétiques enfin reproduites et expliquées.
Guru, 4 millions d’heures ça fait à peu près un demi-millénaire. Aucun ordinateur n’a fait un tel calcul!
Le Guru a rajouté ‘l’équivalent’ -> « …en demandant aux superordinateurs d’effectuer l’équivalent de 4 millions d’heures de calculs. » Désolé pour la confusion !