Les anciens habitants de la Polynésie auraient d’abord profité d’une influence amérindienne avant l’arrivée des Européens
Selon une nouvelle étude, les Amérindiens ont eu une influence génétique et culturelle sur la Polynésie plus de cinq siècles avant l’arrivée des Européens dans la région.
Image d’entête : dessin représentant un Individu polynésien dont les racines génétiques remontent à diverses régions du Pacifique et des Amériques. (Ruben Ramos-Mendoza)
Et tout n’a pas commencé à un endroit bien connu, Rapa Nui (île de Pâques), selon l’équipe internationale de chercheurs.
Statues Moai sur le site de Rano Raraku sur l’île de Pâques. (Javier Blanco)
Selon eux, les preuves montrent que le premier contact a eu lieu sur l’un des archipels de la Polynésie orientale (Polynésie française, Îles Pitcairn et l’île de Pâques), comme le propose le défunt explorateur norvégien Thor Heyerdahl, qui a effectué son célèbre voyage du Pérou vers la Polynésie sur le radeau Kon-Tiki en 1947.
La nouvelle étude (lien plus bas), a été menée par Andrés Moreno-Estrada, de l’université de Stanford, aux États-Unis, et Alexander Ioannidis du Laboratoire national de génomique pour la biodiversité du Mexique (LANGEBIO).
Avec leurs collègues, ils ont examiné les génomes de plus de 817 personnes issues de 17 populations insulaires et de 15 groupes amérindiens de la côte Pacifique et ils ont trouvé des « preuves concluantes » de contact vers 1200 de notre ère, « à l’époque de la colonisation de la lointaine Océanie ».
Selon les chercheurs :
Nos analyses suggèrent fortement qu’un seul contact s’est produit en Polynésie orientale, avant la colonisation de Rapa Nui, entre des individus polynésiens et un groupe amérindien très proche des habitants indigènes de l’actuelle Colombie.
De précédentes études ont examiné de l’ancien ADN, mais celui-ci est souvent détérioré, affirment les chercheurs. Ils ont choisi d’adopter une approche « big data » en étudiant des personnes vivantes aujourd’hui.
Les méthodes de calcul leur ont permis de déterminer l’ascendance génétique probable et les origines géographiques ancestrales grâce à l’étude des flux de gènes.
Ils ont également pu faire la distinction entre différents mélanges coloniaux modernes, par exemple une grande influence française dans ce que l’on appelle la Polynésie française et une influence espagnole/chilienne à Rapa Nui.
Lever de soleil sur le site de Tongariki sur l’île de Pâques. (Andres Moreno-Estrada)
Ces résultats sont les derniers éléments de réflexion dans ce qui fut un long débat, souvent controversé, sur la question de savoir si des contacts avec des voyageurs avaient réellement eu lieu. Les avis sont partagés et, comme le notent les chercheurs, des études antérieures ont abouti à des conclusions contradictoires.
Et ils reconnaissent qu’ils ne peuvent pas non plus « écarter » une autre explication : un groupe de Polynésiens s’est rendu dans le nord de l’Amérique du Sud pour y revenir avec des Amérindiens, ou avec un mélange d’Amérindiens.
Néanmoins, ils affirment pouvoir « démontrer que les preuves des premiers contacts avec les Amérindiens se trouvent sur des îles très éloignées les unes des autres dans l’extrême est de la Polynésie, y compris des îles qui n’ont pas été influencées par des contacts plus récents avec des Amérindiens ».
Ces résultats spectaculaires ont des implications majeures pour les futures discussions concernant les premières migrations et interactions en Polynésie.
D’un point de vue archéologique, ajoute les chercheurs, l’étape suivante consisterait à évaluer dans quelle mesure leur modèle s’accorde avec les études sur la culture matérielle, les documents ethnohistoriques, la linguistique et les preuves de la répartition des plantes et des animaux.
L’étude publiée dans Nature : Native American gene flow into Polynesia predating Easter Island settlement et présentée sur le site de l’Université Stanford : Polynesians, Native Americans made contact before European arrival, genetic study finds.