Le changement climatique est sans doute à l’origine des récentes inondations sur l’Europe
Les fortes précipitations qui ont provoqué des inondations meurtrières en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique en juillet dernier ont été favorisées par la crise climatique. Selon un groupe de chercheurs, les inondations en Europe, qui ont tué au moins 220 personnes alors que des villes étaient submergées, étaient jusqu’à 9 fois plus probables en raison du réchauffement climatique.
En juillet, de fortes précipitations ont entraîné de graves inondations, notamment dans les États allemands de Rhénanie-du-Nord-Westphalie et de Rhénanie-Palatinat, ainsi qu’au Luxembourg, et le long de la Meuse et de certains de ses affluents en Belgique et aux Pays-Bas. Les inondations ont fait 184 morts en Allemagne et 38 en Belgique, ainsi que des dégâts aux infrastructures.
Les scientifiques du groupe World Weather Attribution (WVA), un projet international visant à analyser et à communiquer l’influence possible du changement climatique sur les phénomènes météorologiques extrêmes, ont comparé la fréquence des précipitations observées en Europe dans le climat chaud actuel avec la fréquence attendue dans un monde sans changement climatique d’origine humaine. Ils ont utilisé des mesures météorologiques, des modèles informatiques à haute résolution et des méthodes de recherche évaluées par des pairs.
Selon Sjoukje Philip, chercheur en climatologie à l’Institut météorologique royal néerlandais et membre de l’équipe du WWA :
Nous avons combiné les connaissances de spécialistes de plusieurs domaines d’étude pour comprendre l’influence du changement climatique sur les terribles inondations du mois dernier, et pour préciser ce que nous pouvons et ne pouvons pas analyser dans le cadre de cet événement.
A partir de l’étude : précipitations cumulées sur deux jours (cumul sur 48h 13 juillet – 15 juillet 2021) et cumulées sur 24 heures pour chacun des jours individuels de l’événement de précipitations extrêmes. (Frank Kreienkamp et col./ World Weather Attribution)
S’il est difficile d’évaluer l’influence du climat sur les fortes précipitations au niveau local, les chercheurs ont pu montrer que l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre a rendu plus probables des événements comme celui observé en Europe. Dans le climat actuel, pour n’importe quel endroit d’Europe occidentale, un événement pluvieux comme celui qui vient d’être observé est attendu une fois tous les 400 ans.
Les chercheurs ont constaté que le changement climatique a multiplié par 1,2 à 9 la probabilité de survenue de ces précipitations extrêmes en Europe et que l’intensité de ces averses dans la région a augmenté de 3 à 19 %. Selon les conclusions de l’étude, l’air plus chaud résultant du réchauffement de la planète peut contenir jusqu’à 7 % de vapeur d’eau en plus pour chaque augmentation d’un degré Celsius.
Les chercheurs se sont concentrés sur deux zones particulièrement touchées par les précipitations : les districts allemands proches des rivières Ahr et Erft, où 93 millimètres de pluie sont tombés en une journée, et la région belge de la Meuse, où 106 millimètres sont tombés en deux jours. Les niveaux des rivières n’ont pas pu être analysés, notamment parce que les stations de mesure ont été détruites par les inondations.
Selon Friederike Otto, de l’université d’Oxford :
Ces inondations nous ont montré que même les pays développés ne sont pas à l’abri des graves conséquences des conditions météorologiques extrêmes que nous avons connues et dont on sait qu’elles vont s’aggraver avec le changement climatique. « Il s’agit d’un défi mondial urgent et nous devons le relever. Les données scientifiques sont claires. »
Dans une précédente étude, le même groupe de chercheurs avait déjà constaté que la vague de chaleur observée en juillet en Amérique du Nord aurait été « pratiquement impossible » sans changement climatique. Avant l’ère industrielle, ce type de vague de chaleur n’aurait tout simplement pas eu lieu. Même dans le monde qui se réchauffe aujourd’hui, la chaleur est un événement qui ne se produit qu’une fois par millénaire.
Les vagues de chaleur et les inondations renforcent les conclusions du récent rapport historique du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), selon lequel il existe des preuves « sans équivoque » que les émissions dues aux activités humaines sont la principale cause du réchauffement de la planète. Le rapport indique toutefois que les pires conséquences peuvent être évitées par une action climatique ambitieuse.
L’étude disponible sur le site du World Weather Attribution : Rapid attribution of heavy rainfall events leading to the severe flooding in Western Europe during July 2021 et présentée sur ce même site : Heavy rainfall which led to severe flooding in Western Europe made more likely by climate change.