Sur cette lointaine planète, l’année ne dure que 16 heures et ne fait que s’accélérer
Des astronomes ont battu un nouveau record, en repérant une nouvelle géante gazeuse à l’orbite la plus courte connue. Cette planète ne met que 16 heures à tourner autour de son étoile, mais un jour, leur danse pourrait brusquement prendre fin.
L’exoplanète récemment repérée appartient à une catégorie que les scientifiques appellent les Jupiters chauds. Ces mondes sont bâtis plus ou moins comme notre Jupiter, mais elles orbitent beaucoup plus près de leur étoile, d’où leur surnom. Bien que les astronomes aient identifié plus de 400 jupiters chauds à ce jour, les chercheurs affirment qu’aucune n’est tout à fait comme cette dernière découverte, qui porte le nom de TOI-2109b.
Selon Avi Shporer, scientifique spécialiste des exoplanètes au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et coauteur de la nouvelle recherche :
Tout indiquait qu’il s’agissait d’une planète, et nous avons compris que nous tenions là quelque chose de très intéressant et de relativement rare.
Shporer et ses collègues ont fait leur découverte dans les données recueillies par le satellite TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite) de la NASA, qui est en orbite autour de la Terre depuis avril 2018.
TESS est spécialisé dans la découverte de planètes qui orbitent très rapidement autour de leur étoile, puisque le télescope fixe une parcelle du ciel pendant environ un mois avant de passer à autre chose. TESS ne voit pas les planètes directement, mais surveille plutôt les petites baisses de luminosité rythmées qui marquent l’arrivée d’une planète entre le télescope et l’étoile.
Dans le cas de TOI-2109b, ces baisses sont survenues toutes les 16 heures, plus rapidement que pour toute autre géante gazeuse repérée par les scientifiques à ce jour. L’étoile de la planète est située à environ 855 années-lumière de la Terre, dans la constellation d’Hercule. Après avoir repéré le signal, les chercheurs ont fait appel à d’autres télescopes pour vérifier l’étoile, appelée TOI-2109. (TOI signifie « TESS Object of Interest« ).
Ces observations combinées n’ont pas seulement confirmé l’existence d’une planète en orbite autour de l’étoile, les scientifiques ont également pu mesurer une série de caractéristiques importantes de TOI-2109b. Par exemple, elle se trouve à environ 2,4 millions de kilomètres de son étoile. (À titre de comparaison, Mercure est environ 24 fois plus éloignée de notre soleil).
Pour Shporer, c’est déjà très étrange :
Depuis le début de la science des exoplanètes, les Jupiters chauds ont été considérés comme des excentriques. Comment une planète aussi massive et grande que Jupiter peut-elle atteindre une orbite qui ne dure que quelques jours ? Nous n’avons rien de tel dans notre système solaire, et nous voyons là une occasion de les étudier et de contribuer à expliquer leur existence.
TOI-2109b est environ 5 fois plus massive et un tiers plus grande que notre propre Jupiter, et l’étoile a environ 2 fois la taille et la masse de notre soleil. De plus, la nouvelle planète semble être la deuxième exoplanète connue la plus chaude, avec des températures diurnes atteignant près de 3 300 °C, bien que la partie nocturne soit trop sombre pour que TESS puisse la voir. (Les mondes extraterrestres en orbite proche sont souvent en rotation synchrone (ou tidally locked en anglais), montrant toujours la même face à leur étoile, tout comme la Lune montre toujours sa face proche à la Terre.
Pour Shporer, c’est aussi assez intéressant :
La température y est-elle très froide, ou la planète prend-elle la chaleur du côté jour et la transfère-t-elle au côté nuit ? . Nous sommes au début de la tentative de réponse à cette question pour ces Jupiters ultra-chauds.
Mais pour les scientifiques, la caractéristique la plus intrigante de TOI-2109b est peut-être le changement de son orbite : la planète semble se rapprocher de son étoile au rythme le plus rapide jamais observé par les astronomes, entre 10 et 750 millisecondes par an.
Ce n’est pas assez rapide pour laisser aux scientifiques l’espoir de pouvoir réellement observer le destin de la planète. Mais TESS est toujours en activité et reviendra sur TOI-2109 en mai et juin 2022, et les scientifiques espèrent que ces observations leur permettront d’étudier plus en détail le phénomène de “décroissance orbitale”.
Selon Ian Wong, auteur principal de la recherche, qui était au MIT pendant l’étude et se trouve maintenant au Goddard Space Flight Center de la NASA :
Dans un ou deux ans, si nous avons de la chance, nous pourrons peut-être détecter comment la planète se rapproche de son étoile. De notre vivant, nous ne verrons pas la planète tomber dans son étoile. Mais donnez-lui encore 10 millions d’années, et cette planète ne sera peut-être plus là.
L’étude publiée dans The Astronomical Journal : TOI-2109: An Ultrahot Gas Giant on a 16 hr Orbit et disponible en prépublication dans arXiv et présentée sur le site du Massachusetts Institute of Technology : One year on this giant, blistering hot planet is just 16 hours long.