Une reconstitution en 3D suggère que l’ancien mégalodon pouvait manger une orque en cinq bouchées seulement
En combinant une modélisation numérique de pointe et l’analyse d’un fossile rare et unique, des scientifiques ont réalisé la première reconstruction en 3D du mégalodon, le plus grand requin qui ait jamais vécu. Grâce à ce nouveau modèle 3D, les scientifiques ont pu obtenir de nouvelles et fascinantes informations sur le comportement de ce terrifiant prédateur préhistorique, notamment sur son régime alimentaire, qui comprenait des baleines riches en graisse et mesurant jusqu’à 8 mètres de long.
Heureusement pour les surfeurs et les nageurs en mer, le mégalodon s’est éteint il y a environ 3 millions d’années. Une grande partie de ce que nous savons sur cette créature redoutable provient de l’étude de ses énormes dents, chacune ayant la taille d’une main humaine. Comme les requins d’aujourd’hui, son squelette est constitué de cartilage qui, malheureusement, ne résiste pas très bien à l’environnement océanique.
Une dent de mégalodon. (Lonfat)
Selon le premier auteur de la nouvelle étude, Jack Cooper, doctorant à l’université de Swansea (Royaume-Uni) :
Les dents de requin sont des fossiles courants en raison de leur composition dure qui leur permet de bien se conserver. Cependant, leur squelette étant constitué de cartilage, il est rare qu’il se fossilise.
Cette très large mâchoire, aux 182 dents acérées, appartenait à l’ancêtre du requin : le mégalodon. (Heritage Auction)
Les chercheurs ont pu faire la lumière sur le mode de vie et la forme physique du mégalodon grâce à l’analyse isotopique de ses dents, par exemple, ou en analysant ses proches parents pour se faire une idée de sa taille. Cooper et ses collègues ont pu approfondir ces travaux en étudiant une rare colonne vertébrale fossilisée appartenant à un mégalodon mort au large de la Belgique il y a environ 18 millions d’années.
Les scientifiques ont mesuré et scanné chacune des vertèbres et ont reconstruit l’ensemble de la colonne vertébrale, qui a ensuite été combinée avec un scan 3D d’une série de dents de mégalodon. À partir de là, l’équipe a pu utiliser une modélisation 3D avancée et des scans de grands requins blancs pour reconstituer la chair autour du squelette, complétant ainsi ce qui est présenté comme le premier modèle 3D du Megalodon.
Selon le coauteur de l’étude, John Hutchinson, professeur au Royal Veterinary College au Royaume-Uni :
Le poids est l’une des plus importantes caractéristiques de tout animal. Pour les animaux disparus, nous pouvons estimer la masse corporelle avec des méthodes modernes de modélisation numérique 3D, puis établir la relation entre la masse et d’autres propriétés biologiques telles que la vitesse et l’utilisation de l’énergie.
A partir de l’étude : procédure de reconstitution du mégalodon en 3D à l’aide des vertèbres de la colonne vertébrale (A) et des dents (C). (Jack A. Cooper et col./ Science Advances)
Le mégalodon reconstitué mesurait 16 m de long, pesait plus de 61 tonnes et se déplaçait dans l’eau à une vitesse de 1,4 mètre par seconde. Avec un volume stomacal de près de 10 000 litres, le requin avait besoin d’environ 98 000 kilocalories par jour pour se nourrir. Selon les scientifiques, les petites proies mesurant de 3 à 6 m pouvaient être mangées en quelques bouchées seulement, tandis que les proies plus grandes mesurant environ 8 m, soit la même taille que l’orque moderne, pouvaient être consommées en cinq bouchées environ.
D’après la modélisation de la recherche de nourriture et de l’utilisation de l’énergie, les scientifiques affirment que le mégalodon se serait nourri de graisse de baleine, riche en calories. Le modèle optimal de rencontre des proies a révélé que la consommation d’une seule baleine de huit mètres de long aurait permis au mégalodon de parcourir des milliers de kilomètres à travers les mers, n’ayant besoin de se réalimenter que deux mois plus tard.
Selon Catalina Pimiento, professeur à l’université de Zurich et auteur principal de l’étude :
Ces résultats suggèrent que ce requin géant était un prédateur transocéanique super-apex. L’extinction de ce requin géant emblématique a probablement eu un impact sur le transport mondial des nutriments et a libéré les grands cétacés d’une forte pression prédatrice.
Pour les scientifiques, il s’agit d’un bond en avant dans ce que nous savons sur le mégalodon et la façon dont la mégafaune a façonné l’écosystème marin. Ces nouvelles données sur ses caractéristiques physiques et de son comportement peuvent également orienter les efforts de reconstruction et les recherches futures sur cet ancien prédateur.
L’étude publiée dans Science Advances : The extinct shark Otodus megalodon was a transoceanic superpredator: Inferences from 3D modeling et présentée sur le site de l’Université de Zurich : New 3D Model Shows: Megalodon Could Eat Prey the Size of Entire Killer Whales.