Des archéologues découvrent des indices cachés sur les véritables bâtisseurs des “mégaforts” de l’âge du bronze en Europe
Des archéologues ont découvert en Europe centrale un réseau jusqu’alors inconnu de sites imposants de l’âge du bronze qui pourrait documenter ce que l’on appelle les « mégaforts » de l’âge du bronze.
Les mégaforts européens sont les plus grandes constructions antérieures à l’âge du fer (1200-550 avant notre ère).
Selon l’auteur principal, Barry Molloy, professeur associé à l’University College Dublin (UCD), en Irlande :
Certains des plus grands sites, que nous appelons ces mégaforts, sont connus depuis quelques années, comme Gradište Iđoš [Serbie actuelle], Csanádpalota, Sântana [Hongrie] ou l’incroyable Corneşti Iarcuri [Roumanie], entouré de 33 km de fossés et éclipsant en taille les citadelles et fortifications contemporaines des Hittites, des Mycéniens ou des Égyptiens.
Ce qui est nouveau, cependant, c’est la découverte que ces sites massifs n’étaient pas isolés, mais qu’ils faisaient partie d’un réseau dense de communautés étroitement liées et interdépendantes. À leur apogée, les habitants de ce réseau de sites de la basse Pannonie devaient se compter par dizaines de milliers.
À l’aide d’images satellites et de photographies aériennes, les archéologues ont pu reconstituer le bassin des Carpates méridionales de l’âge du bronze. Ils ont découvert plus de 100 sites appartenant à une société complexe. Ces sites sont situés derrière les rives de la rivière Tisza. Ces communautés, jusqu’alors inconnues, sont désormais appelées le groupe de sites de Tisza (TSG pour Tisza Site Group).
Image d’entête, à partir de l’étude : site TSG de Kačarevo 2 montrant : A) Terrain de basse altitude, B) plateau de sable surélevé, C) fossé d’enclos, D) zones d’activité. (Barry Molloy et Darja Grosman/ PLOS ONE)
Ci-dessous, à partir de l’étude : Zone centrale du site TSG de Baranda montrant 1) le tumulus, 2) le cours d’eau et 3-5) les zones d’activité alignées avec le tumulus (Photographie de Barry Molloy)
Les études de terrain, les fouilles et les analyses géophysiques révèlent que la plupart des sites ont été établis entre 1600 et 1450 avant notre ère. Presque tous ont été abandonnés vers 1200 avant notre ère.
Les auteurs de l’étude (lien plus bas) estiment que le TSG était un important centre d’innovation et une plaque tournante régionale entre 1500 et 1200 avant notre ère, à l’apogée de civilisations célèbres telles que les Mycéniens en Crète, les Hittites dans l’actuelle Turquie et le Nouvel Empire en Égypte.
Molloy et son équipe, qui comprend des archéologues de Serbie et de Slovénie, affirment que leurs recherches modifient notre vision de la préhistoire européenne. L’Europe de l’âge du bronze semble avoir connu un tournant majeur au cours du deuxième millénaire avant notre ère. Des technologies militaires et de terrassement perfectionnées se sont répandues dans toute l’Europe après 1200 avant notre ère. Les similitudes entre la culture et l’iconographie à travers le continent pourraient s’expliquer par l’importance et l’influence de groupes comme le TSG.
A partir de l’étude : image aérienne de Mramorak indiquant les cours d’eau, les zones d’activité et l’emplacement du site à la base de la terrasse la plus élevée (Barry Molloy/ Darja Grosman)
Bien que les plus de 100 sites ne soient probablement pas d’anciennes garnisons guerrières, Molloy affirme que la période était loin d’être paisible. Les TSG étaient manifestement puissants et bien équipés pour se défendre, il ajoute :
L’année 1200 avant J.-C. a marqué un tournant décisif dans la préhistoire de l’Ancien Monde : des royaumes, des empires, des villes et des sociétés entières se sont effondrés en l’espace de quelques décennies dans une vaste région d’Asie du Sud-Ouest, d’Afrique du Nord et d’Europe méridionale. Il est fascinant de découvrir ces nouvelles polities et de voir comment elles étaient liées à des sociétés influentes bien connues, mais cela donne à réfléchir de voir qu’elles ont finalement subi le même sort dans la vague de crises qui a frappé cette région plus large.
L’étude publiée dans PLOS ONE : Resilience, innovation and collapse of settlement networks in later Bronze Age Europe: New survey data from the southern Carpathian Basin et préentée sur le site de l’University College Dublin : UCD archaeology brings to light Europe’s hidden Bronze Age megastructures.