Les coqs présentent des signes d’une conscience d’eux même en se reconnaissant dans un miroir
Une équipe internationale de neuroscientifiques et de psychologues a découvert que les coqs pouvaient se reconnaître dans un miroir, et les chercheurs à l’origine de ces travaux estiment que leur découverte pourrait être importante pour d’autres espèces animales.
Image d’entête : pour cette étude, un coq se regarde dans un miroir. (Sonja Hillemacher/ Université de Bonn)
Cette capacité à passer le test du miroir est souvent considérée comme une caractéristique de la conscience de soi et constitue donc une fenêtre unique sur l’esprit de l’animal. Des études ont montré que cette capacité n’est pas nécessairement une caractéristique humaine, mais qu’elle semble être présente chez certains grands singes, les Grands dauphins, les éléphants d’Asie, les macaques, les pies d’Eurasie et les labres nettoyeurs. En fait, on se demande combien d’autres animaux peuvent passer le test du miroir.
La capacité des poulets à se reconnaitre dans leur reflet n’est pas surprenante si l’on considère le contexte social dans lequel ils évoluent. Les poulets utilisent des stratégies cognitives complexes qui comportent des éléments de mise en perspective. Ils vivent au sein d’une communauté très unie, avec des hiérarchies complexes, dynamiques et rigoureuses, qui nécessitent la capacité d’apprendre à connaître les positions dans une hiérarchie. Mais il n’était pas certain que les poulets soient capables de passer ce test pour autant.
Selon Sonja Hillemacher, doctorante à l’Institut d’ingénierie agricole de l’Université de Bonn et auteur de l’étude :
La question de savoir si les animaux peuvent se reconnaître et donc avoir conscience d’eux-mêmes est l’une des questions centrales de la recherche comportementale.
Le test de la marque est l’un des plus courants pour la reconnaissance de soi. Par exemple, une marque colorée est placée sur le devant de la tête de l’animal, que celui-ci ne peut voir que s’il se trouve devant un miroir. Si l’animal commence à explorer la zone marquée sur son corps devant le miroir, cela prouve qu’il a reconnu son propre reflet.
Issue d’une précédente étude, des macaques ont appris à reconnaître leurs propres reflets à l’aide de marques laser. (Neng Gong et col./ Current Biology)
Cependant, ce test ne fonctionne pas toujours. De nombreux animaux n’ont pas de bras, de mains ou de doigts qui pourraient être utilisés pour répondre à une marque sur une partie du corps si elle était remarquée dans un miroir. Même certains animaux dont on pense qu’ils ont conscience d’eux-mêmes ne remarquent pas le miroir. C’est pourquoi les chercheurs ont imaginé une nouvelle façon de tester la reconnaissance de soi.
Selon Onur Güntürkün, auteur de l’étude :
Certains poulets, mais surtout les coqs, avertissent leurs congénères par des cris spéciaux lorsqu’un prédateur, tel qu’un oiseau de proie ou un renard, apparaît. En revanche, si le coq est seul face au prédateur, il reste silencieux pour éviter d’attirer son attention et de devenir sa victime.
Le cri d’alarme était donc le comportement idéal à intégrer dans un test de conscience de soi pour les coqs, ont expliqué les chercheurs. Dans un premier temps, ils ont voulu vérifier si le coq émet réellement des cris d’alarme en présence d’un congénère (un autre coq) et reste silencieux lorsqu’il est seul. Pour ce faire, ils ont aménagé une aire sur le campus de l’université de Bonn.
Une grille divise les deux compartiments, permettant aux coqs de rester en contact visuel les uns avec les autres à travers la grille. Ensuite, une image de rapace (oiseau) a été affichée au plafond de l’un des compartiments. Les chercheurs ont testé 58 coqs. Au total, ces derniers ont émis 77 cris d’alarme en présence d’un congénère, mais seulement 17 lorsque le coq était seul face à la menace. Les chercheurs ont ensuite placé un miroir entre les deux compartiments à la place de la grille. Au total, seuls 25 cris d’alarme ont été émis au cours des 174 essais. Ce résultat indique que les coqs se sont probablement reconnus dans l’image du miroir. Il est également possible qu’ils aient vu dans leur image un animal étrange qui imite leur propre comportement.
A partir de l’étude : représentation graphique des quatre conditions du test du miroir décrites ci-dessus et de ses résultats. (S. Hillemacher et col./ PLOS ONE)
Cela montre que le test du miroir donne des résultats plus fiables lorsque le comportement d’une espèce est placé dans un contexte écologique pertinent.
Toujours selon Güntürkün :
Dans une situation classique, un coq peut ne pas se reconnaître. Mais lorsqu’un prédateur le menace, il devient évident que son reflet n’est pas un autre coq, mais lui-même.
L’étude publiée dans PLOS ONE : Roosters do not warn the bird in the mirror: The cognitive ecology of mirror self-recognition et présentée sur le site de l’Université de Bonn : The ego-consciousness of the feathered fowl?